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M. Jobling, M. Guppy et M. Smallweed mettent leurs coudes sur la table, leur menton sur leurs mains et lèvent les yeux au plafond. Quelques instants après, ils boivent tous une gorgée de rhum, s’appuient contre le mur, enfoncent leurs mains dans leurs poches et se regardent mutuellement.

«  Si j’avais l’énergie que je possédais autrefois, Tony, dit en soupirant M. Guppy…, mais il y a dans le cœur humain de ces cordes… »

Après avoir exprimé la fin de sa triste pensée en buvant d’un air sentimental quelques gouttes de son grog, M. Guppy se résume en disant à M. Jobling que c’est à lui maintenant de décider de cette affaire, et lui offre sa bourse « jusqu’à concurrence de trois ou quatre, et même cinq livres ; car jamais on ne pourra dire, ajoute-t-il avec emphase, que William Guppy ait tourné le dos à un ami dans le malheur. »

Cette dernière proposition arrive tellement à point, que M. Jobling s’écrie tout ému : « Guppy ! mon brave garçon, mon sauveur, votre main, je vous en prie.

— Jobling, mon ami, la voilà et de grand cœur.

— Savez-vous, Guppy, que nous sommes de vieux camarades ?

— Oui, Jobling. »

Ils se serrent la main avec effusion, et M. Jobling ajoute avec sentiment :

«  Je crois, Guppy, que je prendrais volontiers encore un grog en l’honneur de notre vieille amitié.

— Le dernier locataire de Krook est mort dans la chambre que vous allez occuper, fait observer M. Guppy sous forme d’incident.

— Bah ! répond M. Jobling.

— Il y a eu verdict ; et l’on a déclaré qu’il était mort par accident ; cela vous est bien égal ?

— Assurément, réplique M. Jobling ; mais il aurait pu tout aussi bien aller mourir ailleurs ; qu’avait-il besoin de trépasser dans ma chambre ? Quelle idée saugrenue. » M. Jobling est profondément choqué de la liberté que s’est permise le défunt, et ne peut s’empêcher de s’écrier à diverses reprises : « Comme s’il n’y avait pas assez d’autres endroits pour mourir ! Il n’aurait pas été bien aise, je suppose que j’allasse mourir dans sa chambre ? »

Néanmoins, l’affaire étant agréée, M. Guppy propose d’envoyer le fidèle Smallweed chez M. Krook, pour savoir si ce dernier est chez lui, afin qu’on puisse régler immédiatement