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épaules ; tandis que le maître d’armes lève la tête, elle donne un coup pareil à son estimable grand-père, et, les ayant ainsi rapprochés et remis face à face, elle redevient immobile et tourne vers le feu son regard dur et sévère.

«  Aye, aye ! oh ! oh ! oh ! euh ! euh ! s’écrie M. Smallweed en étouffant sa rage, mon cher ami !

— Je vous répète, dit M. Georges, que, si vous voulez causer avec moi, il faut dire franc et net ce que vous avez à dire ; je n’entends rien à toutes vos finasseries, je ne suis pas assez habile, et ça ne me convient pas ; quand vous êtes là, m’entortillant de vos phrases qui ne veulent jamais sortir, dit l’ancien militaire en reprenant sa pipe, l’air me manque, il me semble que je suffoque. »

M.. Georges gonfle sa poitrine et respire largement, comme pour s’assurer qu’il n’est pas encore étouffé.

«  Si vous êtes venu d’amitié, pour me faire une visite, je vous en remercie et je vous salue ; si vous avez voulu voir ce qu’il y avait dans mon établissement, regardez autour de vous ; si c’est avec l’intention d’emporter quelque chose, prenez-le et partez. »

La charmante Judy, toujours les yeux fixés dans la cheminée, donne à son grand-père un coup de poing, sans détourner la tête.

« Vous le voyez, c’est aussi l’opinion de mademoiselle ; mais pourquoi diable ne s’est-elle pas assise ? dit M. Georges.

— Elle reste à côté de moi pour me servir, mon cher monsieur, répond le grand-père Smallweed. Je suis un vieillard et j’ai besoin de quelques petites attentions ; je porte bien les années, je ne suis pas comme cette vieille tête de perroquet fêlée, ajoute-t-il en cherchant instinctivement son coussin par souvenir de sa femme, mais il faut qu’on me soigne de temps en temps.

— Très-bien, dit le maître d’armes en tournant sa chaise pour être en face de l’avare ; et maintenant ?

— Mon ami de la Cité a fait une petite affaire avec un de vos élèves, monsieur Georges.

— Ah ! j’en suis fâché pour mon élève.

— Oui, dit le vieillard en se frottant les jambes. Oui, monsieur, un beau jeune homme, à présent officier, un appelé M. Carstone ; des amis sont venus, qui ont tout payé fort honorablement.

— Pensez-vous, dit M. Georges, que votre ami veuille écouter un bon conseil ?

— Mais je le suppose, si c’est vous qui le donnez.