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LE CRICRI DU FOYER.

en effet. Caleb pouvait bien cette fois répondre ainsi sans avoir recours à son génie inventif.

« Elle a des cheveux noirs, dit Berthe d’un ton pensif, plus noirs que les miens ; sa voix est douce et mélodieuse, je le sais : j’ai aimé souvent à l’écouter. Sa taille…

— Il n’y a pas une poupée ici qui en ait une aussi fine, dit Caleb ; et ses yeux… »

Il s’arrêta, car Berthe s’était suspendue tout-à-fait à son cou, et son bras l’entourait d’une étreinte qu’il ne comprit que trop bien.

Il toussa un moment, il bégaya un moment, et puis se remit à entonner la chanson à boire, son infatigable ressource dans des embarras pareils.

« Notre ami, notre bienfaiteur, je ne me lasse jamais, vous le savez, mon père, d’entendre parler de lui. M’en suis-je jamais lassée ? répéta-t-elle avec une certaine précipitation.

— Non, assurément, répondit Caleb ; non, et avec raison.

— Ah ! avec combien de raison ! » s’écria la jeune aveugle ; et son accent fut si pénétrant que Caleb, quoique ses motifs fussent si purs, n’osa pas la regarder ; il baissa les yeux comme si sa fille elle-même avait pu y lire son innocent mensonge.

« Eh bien ! donc, parlez-m’en encore, père chéri, dit Berthe ; reparlez-m’en souvent. Redites-moi que sa