Page:Dickens - David Copperfield, Hachette, 1894, tome 2.djvu/175

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— L’enfant de notre frère Francis, fit remarquer miss Clarissa. Si la femme de notre frère Francis avait, de son vivant, jugé convenable (bien qu’elle eût certainement le droit d’agir différemment) d’inviter la famille à dîner chez elle, nous connaîtrions mieux aujourd’hui l’enfant de notre frère Francis.

—Ma sœur Savinia, continuez. »

Miss Savinia retourna ma lettre, pour en remettre l’adresse sous ses yeux, puis elle parcourut avec son lorgnon quelques notes bien alignées qu’elle y avait inscrites.

« Il nous semble prudent, monsieur Traddles, dit-elle, de juger par nous-mêmes de la profondeur de tels sentiments. Pour le moment nous n’en savons rien, et nous ne pouvons savoir ce qu’il en est réellement ; tout ce que nous croyons donc pouvoir faire, c’est d’autoriser M. Copperfield à nous venir voir.

— Je n’oublierai jamais votre bonté, mademoiselle, m’écriai-je, le cœur soulagé d’un grand poids.

— Mais, pour le moment, reprit miss Savinia, nous désirons, monsieur Traddles, que ces visites s’adressent à nous. Nous ne voulons sanctionner aucun engagement positif entre M. Copperfield et notre nièce, avant que nous ayons eu l’occasion…

— Avant que vous ayez eu l’occasion, ma sœur Savinia, dit miss Clarissa.

— Je le veux bien, répondit miss Savinia, avec un soupir, avant que j’aie eu l’occasion d’en juger.

— Copperfield, dit Traddles en se tournant vers moi, vous sentez, j’en suis sûr, qu’on ne saurait rien dire de plus raisonnable ni de plus sensé.

— Non, certainement, m’écriai-je, et j’y suis on ne peut plus sensible.

— Dans l’état actuel des choses, dit miss Savinia, qui eut de nouveau recours à ses notes, et une fois qu’il est établi sur quel pied nous autorisons les visites de M. Copperfield, nous lui demandons de nous donner sa parole d’honneur qu’il n’aura avec notre nièce aucune communication, de quelque espèce que ce soit, sans que nous en soyons prévenues ; et qu’il ne formera, par rapport à notre nièce, aucun projet, sans nous le soumettre préalablement.

— Sans vous le soumettre, ma sœur Savinia, interrompit miss Clarissa.

— Je le veux bien, Clarissa, répondit miss Savinia d’un ton résigné,