Page:Dickens - Dombey et fils, 1881, tome 2.djvu/176

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et légèrement flétris ; mais l’image imposante de M. Dombey avec son gilet lilas, son pantalon ventre de biche se représente à son esprit, et miss Tox, derrière son voile, pleure de nouveau en regagnant son domicile de la place de la Princesse. Le capitaine Cuttle, qui s’est associé à la cérémonie en disant amen et en chantant pieusement les répons avec sa grosse voix, se sent tout sanctifié après ces exercices religieux ; dans un état de béatitude parfaite, il traverse la nef, son chapeau de toile cirée à la main, et lit la plaque mortuaire gravée en souvenir du petit Paul. Le galant M. Toots, accompagné du fidèle Coq-Hardi, quitte l’édifice en proie aux tourments de l’amour. Coq-Hardi, jusqu’ici, est incapable d’imaginer un stratagème pour faire donner à Toots la main de Florence : mais il tient à sa première idée ; et il songe que si l’on pliait en deux M. Dombey d’un coup de poing, ce serait déjà quelque chose. Les domestiques de M. Dombey sortent de la retraite où ils s’étaient cachés pour assister à la cérémonie, et se disposent à s’élancer dans la direction de Brook-street, quand tout à coup une indisposition de Mme  Perch les arrête dans leur élan. Mme  Perch demande un verre d’eau, son état devient alarmant ; mais bientôt elle se trouve mieux : on l’emporte.

Cependant Mme  Miff et le bedeau, M. Sownds, s’asseyent sur les marches pour calculer ce que la cérémonie leur a rapporté, et se mettent à jaser pendant que le sacristain sonne pour un mort.

En ce moment, les voitures arrivent à la demeure de la mariée ; on entend les clochettes, la musique militaire ; et M. Polichinelle, ce type de la félicité conjugale, fait des politesses à sa femme : puis les gens de la maison se précipitent, se poussent, se pressent, la bouche béante, pendant que M. Dombey, conduisant Mme  Dombey par la main, fait son entrée solennelle dans les salons de la maison des Feenix ; le reste de la société descend de voiture et entre derrière eux. Pourquoi M. Carker, en traversant la foule, pense-t-il à la vieille femme qui lui a parlé un matin dans le bois ? Pourquoi Florence pense-t-elle, en frissonnant, au jour où, tout enfant, elle était perdue ? Pourquoi revoit-elle la figure de la bonne madame Brown ?

Les félicitations à l’occasion de ce jour, le plus heureux jour de la vie, se renouvellent à mesure qu’il entre plus de monde ; il est vrai que la société n’est pas nombreuse. On quitte le salon pour aller se mettre à table dans la sombre salle à manger, qu’aucun Vatel au monde ne peut se flatter