Page:Dickens - Dombey et fils, 1881, tome 3.djvu/149

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rêta court, tourna autour d’elle, s’approcha, recula, bondit vers elle, et Diogène, car c’était Diogène, tout haletant, et pourtant faisant retentir la rue de ses aboiements joyeux, se coucha à ses pieds.

« Ô Diogène, mon cher, mon fidèle, mon sincère Diogène ! comment es-tu venu jusqu’ici ? Comment ai-je pu te quitter, toi qui n’aurais jamais quitté ta maîtresse ? »

Florence se baissa et serra contre son cœur la tête de ce chien si laid, mais si bon, qui frottait de bonheur son vieux museau contre elle ; puis ils partirent ensemble. Diogène allait par sauts et par bonds, essayant, au milieu de ses gambades, d’embrasser sa maîtresse et faisant culbute sur culbute sans la moindre vergogne. Puis il s’élançait sur de gros chiens qui semblaient se moquer de sa taille, faisait fuir les jeunes bonnes qui balayaient le devant des boutiques, s’arrêtait au milieu de ses mille extravagances, pour regarder Florence, et jappait avec tant d’ivresse, qu’il amassait autour de lui tous les chiens du voisinage.

Accompagnée de ce fidèle serviteur, Florence marchait d’un pas rapide, toujours vers la Cité. La matinée s’avançait déjà, le soleil s’élevait dans le ciel. Les rues devenaient de plus en plus bruyantes, les passants étaient plus nombreux, les boutiques se remplissaient de monde, et elle se trouvait emportée par le flot tumultueux des gens affairés qui se dirigeaient de ce côté et qui passaient avec indifférence devant les entrepôts, les hôtels, les prisons, les églises, les marchés, devant la richesse, la pauvreté, le bien, le mal, semblables au large fleuve que tout ce bruit troublait au milieu de ses roseaux, de ses saules, de ses vertes prairies, et qui coulait bourbeux et sale devant les travaux et les soucis des hommes pour aller se jeter dans la mer profonde.

Enfin le quartier du petit Aspirant de marine commença à poindre : encore quelques pas et le petit Aspirant, en personne, apparut à son poste, toujours attentif à ses observations astronomiques ; encore quelques pas et la porte toute grande ouverte l’invitait à entrer. Florence, qui avait hâté sa marche à mesure qu’elle approchait du terme de son voyage, traversa, en courant, la rue, suivie de près par Diogène, que le bruit avait un peu ahuri, et s’élançant vers la boutique, elle tomba sur le seuil de la petite salle à manger, qu’elle n’avait pas oubliée.

Le capitaine, son chapeau de toile cirée sur la tête, était as-