Page:Dickens - Le Mystère d'Edwin Drood, 1880.djvu/174

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marche, car le vent souffle très-fort en cet endroit, ils arrivent au faîte et dominent Cloisterham.

La petite ville est belle à voir ainsi au clair de lune ; avec ses monuments en ruines, sanctuaires de la mort, à la base de la tour, puis ses maisons couvertes de mousse, et leurs toits en tuiles et leurs murs de briques rouges, destinées aux vivants.

Un peu plus loin, la rivière serpente jusqu’à la limite de l’horizon.

Le flot s’enfle et s’agite déjà aux approches de la mer.

Quelle étonnante expédition !

Jasper, toujours se mouvant sans bruit et sans raison apparente, contemple la scène et surtout la partie la plus tranquille qu’enveloppe l’ombre projetée par la cathédrale.

Mais il ne considère pas Durdles avec une moindre curiosité, et Durdles, par moments, a conscience des regards scrutateurs qui se fixent sur lui.

Nous disons par moments, parce que, dans d’autres, Durdles commence à devenir quelque peu engourdi et somnolent.

De même que les aéronautes diminuent leur lest quand ils veulent s’élever, de même Durdles a allégé la gourde d’osier à mesure qu’il montait.

Il dort tout debout, et le sommeil lui coupe la parole.

Un léger accès de délire s’empare même de lui ; il se figure que le sol qui est à une si grande distance, est de niveau avec la plate-forme de la tour, et il serait bien capable de prolonger sa promenade au-delà dans l’espace.

Jasper le soutient et tous deux vont commencer la descente.

Comme les aéronautes chargent leur ballon quand ils veulent descendre, de même Durdles se charge encore une fois du liquide emprunté à la gourde pour descendre plus facilement.

Ils atteignent la grille de fer qu’ils referment, non sans que Durdles ne soit tombé deux fois.

À la seconde fois il se fend un sourcil.

Ils redescendent dans la crypte, et Jasper pense qu’on en sortira comme on y est entré.