Page:Dickens - Le Mystère d'Edwin Drood, 1880.djvu/244

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— Non, monsieur, je sais que je n’ai rien à attendre que de la longueur du temps et des circonstances.

— Le temps amènera votre justification, Neville.

— Je le crois et j’espère vivre assez pour voir ce grand jour. »

Mais s’apercevant que l’accablement dans lequel il était tombé jetait une ombre sur le visage du chanoine, et peut-être aussi, sentant que la large main qui s’appuyait sur son épaule n’était plus aussi ferme, il secoua sa tristesse et dit :

« Excellentes circonstances pour se livrer à l’étude, dans tous les cas ! Et vous savez, monsieur Crisparkle, combien j’ai besoin d’étudier. Vous m’avez conseillé de me livrer spécialement à l’étude difficile du droit : je me suis laissé guider par les avis d’un ami et d’un protecteur tel que vous. Un si bon ami et un si tendre protecteur. »

Il prit la main qui était sur son épaule et la baisa.

M. Crisparkle regarda les poutres du plafond ; son œil n’était plus aussi brillant que lorsqu’il était entré.

« Je conclus de votre silence sur mon tuteur que celui-là aussi m’est hostile, monsieur Crisparkle, dit Neville.

Le chanoine répondit :

« Votre ex-tuteur est un fou et il n’importe absolument rien aux yeux de toute personne sensée que vous l’ayez pour vous ou contre vous.

— Il est heureux que j’aie de quoi vivre avec économie, reprit Neville avec un mélange de mélancolie et de gaieté, jusqu’à ce que mon éducation soit complète et l’heure de ma justification arrivée ! Sans cela j’aurais pu fournir une nouvelle preuve de la vérité du proverbe : En attendant que l’herbe pousse, le cheval meurt de faim ! »

Il avait ouvert un livre en disant cela, et il s’était replongé dans la lecture.

Il s’attachait surtout aux passages annotés sur des pages blanches intercalées entre chaque feuille du texte.

M. Crisparkle, assis auprès de lui, se mit à lui exposer ses avis et ses corrections.

Les devoirs que le Chanoine avait à remplir à la cathédrale rendaient ses visites à Londres difficiles et souvent