Page:Dickens - Les Grandes Espérances, Hachette, 1896, tome 2.djvu/359

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« C’est aujourd’hui le jour de mon mariage ! s’écria Biddy dans un transport de bonheur, et je suis la femme de Joe !… »

. . . . . . . . . . . . . . . . . .

Ils m’avaient porté dans la cuisine, et j’avais la tête posée sur la vieille table de sapin. Biddy tenait une de mes mains sur ses lèvres, et je sentais sur mon épaule le contact bienfaisant de Joe.

« C’est qu’il n’était pas assez fort, ma chère, pour supporter la surprise, dit Joe.

— J’aurais dû y penser, cher Joe, dit Biddy, mais j’étais trop heureuse. »

Ils étaient tous deux si transportés et si fiers de me voir, si touchés que je fusse revenu à eux, si enchantés que je fusse arrivé par hasard pour compléter la journée !…

Ma première pensée fut de remercier le ciel de n’avoir pas soufflé mot à Joe de ce dernier espoir perdu. Combien de fois, lorsqu’il était près de moi pendant ma maladie, cet aveu était-il venu sur mes lèvres ! Combien la reconnaissance de ce fait eût été irrévocable s’il était resté une heure de plus avec moi.

« Chère Biddy, dis-je, vous avez le meilleur mari qui soit dans le monde entier, et si vous aviez pu le voir auprès de mon lit, vous l’auriez… mais non, vous ne pourriez l’aimer plus que vous ne le faites.

— Non, je ne le pourrais point vraiment, dit Biddy.

— Et vous, cher Joe, vous avez la meilleure femme qui soit dans le monde entier, et elle vous rendra aussi heureux que vous méritez de l’être, cher et noble Joe. »

Joe me regarda les lèvres tremblantes, et tout franchement il porta sa manche sur ses yeux.

« Allons, Joe et Biddy, puisque vous avez été tous deux à l’église aujourd’hui, et que vous êtes en disposi-