Page:Dickens - Les Papiers posthumes du Pickwick Club, Hachette, 1893, tome 1.djvu/129

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Rien, dans toute cette aventure, n’avait pu troubler l’humeur égale et tranquille de M. Pickwick, pas même la culbute de sa voiture et de sa personne. Mais il ne put supporter patiemment l’infamie de celui qui, après avoir emprunté de l’argent à son fidèle disciple, se permettait d’abréger son nom en celui de Tuppy. Il devint rouge jusqu’au bord de ses lunettes, et, ayant respiré fortement, il dit d’une voix lente et emphatique : « Si jamais je rencontre cet homme, je veux…

— Oui, oui, interrompit M. Wardle, tout cela est fort bien, mais, tandis que nous restons là à parler, ils obtiendront une licence et seront mariés à Londres. »

M. Pickwick s’arrêta et renferma sa vengeance au fond de son cœur.

« Combien y a-t-il d’ici au premier relais ! demanda M. Wardle à l’un des postillons.

— Six milles, n’est-ce pas, Tom ?

— Un peu plus.

— Un peu plus de six milles, monsieur.

— Il n’y a pas de remède, il faut les faire à pied, Pickwick.

— Il n’y a pas de remède, » répéta cet homme vraiment grand.

Par l’ordre de M. Wardle, l’un des postillons partit devant, à cheval, pour faire atteler une nouvelle chaise, et l’autre resta en arrière pour prendre soin de celle qui était brisée. En même temps, M. Pickwick et le vieux gentleman se mettaient courageusement en marche, après avoir soigneusement attaché leurs châles autour de leur cou et avoir enfoncé leur chapeau sur leurs oreilles, pour éviter autant que possible le déluge de pluie qui recommençait à tomber.





CHAPITRE X.

Destiné à dissiper tous les doutes qui pourraient exister sur le désintéressement de M. Jingle.

Il y a dans Londres plusieurs vieilles auberges qui servaient de quartier général aux coches les plus célèbres, dans le temps où les coches accomplissaient leurs voyages d’une ma-