Page:Dickens - Les Papiers posthumes du Pickwick Club, Hachette, 1893, tome 1.djvu/214

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avait déjà prédit avec confiance, dans la Gazette d’Eatanswill, que la Caverne offrirait une scène d’enchantement aussi variée que délicieuse, un éblouissant foyer de beautés et de talents, un spectacle touchant d’hospitalité abondante et prodigue, et surtout un degré de splendeur, adouci par le goût le plus délicieux ; un luxe embelli par une parfaite harmonie et par le plus exquis bon ton, et auprès duquel les merveilles fabuleuses des Mille et une Nuits paraîtraient revêtues de couleurs aussi lugubres et aussi sombres que doit l’être l’esprit de l’être atrabilaire et grossier qui oserait souiller du venin de l’envie les préparatifs faits par l’illustre et vertueuse dame, à l’autel de laquelle est offert cet humble tribut d’admiration. Cette dernière phrase était un mordant sarcasme dirigé contre l’Indépendant, qui n’ayant pas été invité à la fête, avait affecté, dans ses quatre derniers numéros, de la tourner en ridicule ; et qui avait imprimé ses plaisanteries à ce sujet avec ses plus gros caractères, en écrivant, qui pis est, tous les adjectifs en lettres majuscules.

Le matin arriva. C’était un séduisant spectacle de voir M. Tupman, en costume complet de brigand, avec une veste tellement serrée qu’elle en était plissée sur son dos et sur ses épaules. La portion supérieure de ses jambes se trouvait comprimée dans une culotte de velours, et la partie inférieure était enlacée dans les bandages compliqués, pour lesquels tous les brigands ont un attachement si inconcevable. C’était plaisir de voir ses moustaches retroussées et son col de chemise ouvert, d’où sortait un visage plus ouvert encore ; c’était plaisir de contempler son chapeau en pain de sucre décoré de rubans de toutes couleurs, et que le brigand était obligé de porter sur ses genoux, car nul mortel ne saurait mettre un semblable chapeau sur sa tête, dans une voiture fermée. L’apparence de M. Snodgrass était également agréable et réjouissante : il avait des chausses de satin bleu, des souliers de satin et de soie ; sa tête était ombragée d’un casque grec ; et, comme tout le monde le sait, comme l’affirmait M. Salomon Lucas, il possédait ainsi le costume journalier, authentique, des troubadours, depuis les temps les plus reculés jusqu’à l’époque où ils disparurent finalement de la surface de la terre.

La calèche qui transportait le brigand et le troubadour s’arrêta derrière le coupé de M. Pott, lequel coupé lui-même s’était arrêté à la porte de M. Pott, laquelle porte s’ouvrit, et parmi les cris de la populace laissa voir le grand journaliste, accoutré