Page:Dickens - Les Papiers posthumes du Pickwick Club, Hachette, 1893, tome 2.djvu/181

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si légère dose de satisfaction à l’apparence de son logement, que M. Roker reporta ses regards vers Samuel Weller, qui jusqu’alors avait gardé un silence plein de dignité, espérant apparemment trouver plus de sympathie sur son visage.

« Voilà une chambre ! jeune homme, répéta-t-il.

— Oui, je la vois, répondit Sam, avec un signe de tête pacifique.

— Vous ne vous attendiez pas à trouver une chambre comme ça dans l’hôtel de Farringdon, hein ? » dit M. Roker avec un sourire plein de complaisance.

Sam répondit à ceci en fermant d’une manière aisée et naturelle un de ses yeux, ce qui pouvait signifier ou qu’il l’aurait pensé, ou qu’il n’y avait jamais pensé du tout, au gré de l’imagination de l’observateur. Ayant exécuté ce tour de force, Sam rouvrit son œil et demanda à M. Roker quel était le lit particulier qu’il avait désigné d’une façon si flatteuse en disant qu’on y dormait comme une douzaine de marmottes.

« Le voilà, dit M. Roker en montrant dans un coin un vieux lit de fer rouillé. Ça ferait dormir quelqu’un, qu’il le veuille ou non.

— Ça me fait c’t effet-là, répondit Sam en examinant le meuble en question avec un air de dégoût excessif. J’imagine que l’eau d’ânon n’est rien auprès.

— Rien du tout, fit M. Roker.

— Et je suppose, poursuivit Sam, en regardant son maître du coin de l’œil, dans l’espérance de découvrir sur son visage quelque symptôme que sa résolution était ébranlée par tout ce qui s’était passé, je suppose que les autres gentlemen qui dorment ici sont de vrais gentlemen ?

— Rien que de ça. I’y en a un qui pompe ses douze pintes d’ale par jour, et qui n’arrête pas de fumer, même à ses repas.

— Ce doit être un fier homme, fit observer Sam.

— Numéro 1 ! » répliqua M. Roker.

Nullement dompté par cet éloge, M. Pickwick annonça, en souriant, qu’il était déterminé à essayer pour cette nuit le pouvoir du lit narcotique. M. Roker l’informa qu’il pouvait se retirer pour dormir à l’heure qui lui conviendrait, sans autre formalité, et le laissa ensuite avec Sam dans la galerie.

Il commençait à faire sombre ; c’est-à-dire que, dans cet endroit où il ne faisait jamais clair, on venait d’allumer quelques becs de gaz en manière de compliment pour la nuit qui