Page:Dickens - Magasin d Antiquités, trad Des Essarts, Hachette, 1876, tome 1.djvu/316

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— Alors, il ne fallait pas le mettre sur le tapis, répliqua M. Codlin, je demande pardon pour vous au gentleman ; vous n’êtes qu’un étourneau qui aime à écouter son propre ramage, sans savoir seulement ce qu’il dit. »

Au début de cette dispute, leur interlocuteur s’était tranquillement assis, les regardant tour à tour, comme s’il attendait le moment convenable pour leur adresser de nouvelles questions, ou pour revenir à celle d’où l’on s’était écarté. Mais à partir du moment où M. Codlin eut à se défendre d’être trop sujet à s’endormir, le gentleman prit un intérêt de plus en plus vif à la discussion, qui en était arrivée à une extrême vivacité.

« Vous êtes, s’écria-t-il, les deux hommes dont j’ai besoin, les deux hommes que j’ai cherchés, que j’ai cherchés partout. Où sont-ils ce vieillard et cette enfant dont vous parlez ?

— Monsieur !… dit Short avec hésitation et en tournant les yeux vers son ami.

— Le vieillard et sa petite-fille qui ont voyagé avec vous ; où sont-ils ? Parlez, vous ne vous en repentirez pas, cela vous rapportera peut-être plus que vous ne croyez. Ils vous ont quittés, dites-vous, à ces courses, si j’ai bien compris. On a retrouvé leur trace jusque-là, mais c’est là qu’on l’a perdue. N’avez-vous pas quelque renseignement à me donner, quelque idée de ce qu’ils peuvent être devenus, pour m’aider à les retrouver ?

— Je vous l’avais toujours dit, Thomas, s’écria Short se tournant vers son ami avec un regard d’abattement, qu’on ne manquerait pas de chercher après ces deux voyageurs !

— Vous l’aviez dit ! … répliqua M. Codlin. Et moi, n’ai-je pas toujours dit que cette innocente enfant était la plus intéressante créature que j’aie jamais vue ? Ne disais-je pas toujours que je l’aimais, que j’en raffolais ? La jolie créature ! il me semble l’entendre encore : « C’est Codlin qui est mon ami, disait-elle, ce n’est pas Short. Short est un brave homme, disait-elle, je n’ai pas à me plaindre de Short ; il cherche à me faire plaisir, je l’avoue ; mais Codlin, disait-elle, m’aime comme la prunelle de ses yeux, sans que ça paraisse. »

En répétant ces paroles avec une grande émotion, M. Codlin se frottait le bout du nez avec le bout de sa manche, et, secouant tristement la tête de côté et d’autre, il donna à entendre