Page:Dickens - Magasin d Antiquités, trad Des Essarts, Hachette, 1876, tome 2.djvu/89

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— Dieu soit loué ! … dit-il d’une voix étouffée. Permettez-moi d’entrer. »

Mistress Jarley et Georges s’écartèrent pour le recevoir chez eux. Quand le gentleman et la mère de Kit furent entrés, la porte se referma immédiatement.

« Vous voyez en moi, braves gens, dit le gentleman en se tournant vers le nouveau couple, un homme qui tient aux deux personnes qu’il cherche plus qu’à sa propre vie. Elles ne me reconnaîtraient pas. Mes traits leur sont étrangers ; mais si elles sont ici, ou si l’une d’elles s’y trouve, prenez avec vous cette brave femme, et qu’elles puissent la voir d’abord, car elles la connaissent toutes deux. Si vous refusez de me les montrer par suite d’une fausse tendresse ou d’une crainte inutile, vous pourrez juger de mes intentions lorsqu’elle reconnaîtra cette femme pour une vieille amie, dévouée à leurs intérêts.

— Je l’avais toujours dit ! s’écria la fiancée. Je savais bien que ce n’était pas une enfant ordinaire ! … Hélas ! monsieur, nous ne possédons aucun moyen de vous assister ; car tout ce que nous pouvions faire nous l’avons vainement essayé déjà. »

En même temps Georges et mistress Jarley racontèrent au gentleman, dans les plus grands détails et sans la moindre réserve, tout ce qui était à leur connaissance au sujet de Nelly et de son grand-père, depuis leur première rencontre jusqu’au jour où ils avaient disparu subitement Ils ajoutèrent, et c’était l’exacte vérité :

« Nous avons fait tous les efforts possibles pour retrouver leurs traces, mais nous n’y avons pas réussi. D’abord, nous fûmes très-alarmés pour leur sûreté, de même que nous redoutions les soupçons auxquels pouvait les exposer leur brusque départ. Nous arrêtâmes notre pensée sur la faiblesse d’esprit du vieillard, sur l’inquiétude que l’enfant avait toujours témoignée quand son grand-père était absent, sur la société qu’on supposait qu’il recherchait, et sur la consomption qui peu à peu s’était emparée d’elle et qui la minait au physique comme au moral. Que dans la nuit elle ait perdu la trace du vieillard et que, sachant ou bien se doutant de quel côté il s’était dirigé, elle ait couru à sa poursuite, ou qu’ils aient quitté la maison ensemble, voilà ce qu’il nous est impossible de savoir au juste. Mais nous croyons pouvoir affirmer qu’il n’y a que peu d’espoir d’entendre jamais parler d’eux, et qu’il ne faut pas compter sur