Page:Dickens - Nicolas Nickleby, trad. Lorain, 1885, tome 2.djvu/194

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vous le rendriez ce soir. Vous avez pour cela trop d’orgueil, d’entêtement ; vous tenez trop à vous faire une réputation de beaux sentiments. Tout cela, monsieur, on l’abattra, on l’écrasera, on le foulera aux pieds, et avant peu. Vous allez apprendre à connaître à vos dépens ce que c’est que les poursuites fatigantes et ruineuses de la justice dans ses formalités les plus oppressives ; vous allez connaître ses tortures de toutes les heures, ses jours sans repos, ses nuits sans sommeil. Voilà les épreuves que je vous prépare pour briser ce cœur hautain, si confiant dans sa force. Et, quand vous aurez fait de cette maison un enfer, quand vous aurez appelé sur ce malheureux-là et sur tous ceux qui se plaisent à voir en vous un héros en herbe les cruelles conséquences de votre obstination, alors nous règlerons le vieux compte que nous avons ensemble : nous verrons qui est-ce qui aura le dernier, et qui s’en tirera le plus avantageusement, même aux yeux du monde. »

Ralph Nickleby se retira ; mais M. Squeers, qui avait entendu une partie de ces adieux du bon oncle, et qui se sentait alors dans un paroxysme de méchanceté impuissante, ne put s’empêcher de retourner à la porte de la salle à manger pour y battre une douzaine d’entrechats avec accompagnement de contorsions sauvages et de grimaces hideuses, emblèmes figuratifs de sa confiance triomphante dans la chute prochaine et la défaite assurée de Nicolas.

Après avoir exécuté cette danse guerrière, où son pantalon court et ses grandes bottes jouèrent un rôle important, M. Squeers suivit ses amis, pendant que la famille se livrait à ses réflexions sur ce qui venait de se passer.


CHAPITRE XIV.

Jette quelque jour sur les amours de Nicolas. Mais, est-ce un bien, est-ce un mal ? Nous en laisserons juger le lecteur.

Après avoir mûrement réfléchi à la position pénible et embarrassante dans laquelle il se trouvait placé, Nicolas se décida à s’en ouvrir franchement aux bons frères sans perdre de temps. Il profita donc de la première occasion qu’il rencontra de se trouver seul avec M. Charles Cheeryble, le lendemain soir, pour