Page:Dickens - Nicolas Nickleby, trad. Lorain, 1885, tome 1.djvu/233

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vitré sur les toits, une chambre enfin aussi triste et aussi retirée qu’on peut le désirer pour un atelier.

Mme Mantalini appela à haute voix Mlle Knag. À ce nom, une femme de petite taille, vive et pimpante, se présenta aussitôt, pendant que les demoiselles du magasin suspendaient un moment leurs opérations pour se murmurer l’une à l’autre à l’oreille quelques observations critiques sur la robe de Mlle Nickleby, sur son teint, sur ses traits, sur toute sa personne. La meilleure société d’un des grands bals du monde n’aurait vraiment pas fait mieux.

« Tenez, mademoiselle Knag, dit Mme Mantalini, voici la jeune personne dont je vous ai parlé. »

Mlle Knag adressa à Mme Mantalini un sourire respectueux qu’elle transforma avec une grande habileté en un sourire de gracieuse protection pour Catherine, disant que certainement, quoiqu’on fût obligé de se donner bien du mal après de jeunes filles toutes novices dans les affaires, cependant, persuadée que mademoiselle ferait tout son possible pour répondre à ses soins, elle se sentait déjà disposée à l’accueillir avec intérêt.

« Pour le moment, je crois dans tous les cas, dit Mme Mantalini, que vous ferez bien de garder Mlle Nickleby avec vous dans le magasin, pour vous aider à essayer les robes. D’un côté, elle ne serait pas encore en état de nous être utile à autre chose, et de l’autre, son extérieur sera…

— Tout à fait assorti avec le mien, madame Mantalini, interrompit Mlle Knag ; tout à fait assorti ; et j’étais bien sûre que vous ne seriez pas longtemps à en faire la remarque ; vous avez tant de tact pour tout cela, qu’en vérité, comme je le dis tous les jours à ces demoiselles, je ne sais pas où, quand ni comment vous pouvez avoir appris tout ce que vous savez. Mlle Nickleby et moi, nous sommes tout à fait pareilles, madame Mantalini, seulement je suis un peu plus brune que miss Nickleby, et… je crois que j’ai le pied un peu plus petit. Mlle Nickleby, j’espère, ne m’en voudra pas de cette remarque, quand elle saura que notre famille a toujours été renommée pour ses petits pieds, depuis… hem !… qu’il y a des pieds dans notre famille. J’avais autrefois un oncle, madame Mantalini, qui vivait à Chestenham et qui avait un excellent magasin de marchant de tabac. Hem ! il avait de si petits pieds qu’on aurait dit de ces bouts de pieds qu’on met ordinairement au bas des jambes de bois… les pieds les plus symétriques, madame Mantalini, qu’on puisse voir.