Page:Dickens - Nicolas Nickleby, trad. Lorain, 1885, tome 1.djvu/338

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qu’elle ne put s’empêcher de rougir de bonheur et d’exprimer sa reconnaissance dans des termes sur lesquels M. et Mme Crummles enchérirent encore. Tout fut arrangé à l’instant : Nicolas irait chez elle demain matin à onze heures. En attendant ils se séparèrent tous, lui pour retourner au logis reprendre son métier d’auteur, Mlle Snevellicci dans la coulisse, pour se costumer pour la seconde pièce, le directeur et sa femme pour calculer, dans leur âme désintéressée, le gain probable qu’ils feraient sur le bénéfice de Mlle Snevellicci, car une clause en bonne forme de leur traité leur adjugeait les deux tiers du profit à faire.

Le lendemain matin, à l’heure stipulée, Nicolas se rendit à la demeure de Mlle Snevellicci, chez un tailleur, sur la place appelée rue des Lombards. Le petit corridor exhalait une forte odeur de fer à repasser, et la fille du tailleur, qui était venue ouvrir la porte, était dans cet état d’animation qu’éprouve chaque ménagère à l’époque périodique d’une lessive domestique.

« N’est-ce pas ici que demeure Mlle Snevellicci ? demanda Nicolas.

— Oui, monsieur, répondit la fille du tailleur.

— Auriez-vous la bonté de la prévenir que M. Johnson est ici ?

— Oh ! vous n’avez qu’à monter, s’il vous plaît, » répondit-elle avec un sourire.

Nicolas suivit la demoiselle, et fut introduit dans une petite pièce du premier, communiquant avec une chambre sur le derrière, où sans doute Mlle Snevellicci était à déjeuner dans son lit, autant qu’il put croire, en entendant un petit cliquetis mal dissimulé de tasses et de soucoupes.

La demoiselle passa dans l’autre chambre ; le cliquetis cessa pour faire place à un chuchotement ; puis elle revint presque tout de suite, en priant Nicolas de vouloir bien attendre un moment : Mlle Snevellicci allait se dépêcher.

En même temps elle releva le store de la fenêtre, sans doute dans l’espérance d’occuper les yeux de M. Johnson par la vue des passants, pour le distraire des petits soins qu’elle avait à prendre dans la chambre, prit devant le feu quelques objets qu’on y avait mis à sécher et qui avaient tout l’air d’être une paire de bas, et disparut.

Comme le spectacle de la rue n’avait rien de bien intéressant, Nicolas se mit à examiner la chambre avec plus de curiosité qu’il n’en aurait peut-être montré sans cela. Sur le sofa reposaient une vieille guitare, plusieurs morceaux de musique où était imprimé le pouce de l’artiste, et toute une litière de papillotes,