Page:Dickens - Nicolas Nickleby, trad. Lorain, 1885, tome 1.djvu/89

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

CHAPITRE VII.

M. et Mme Squeers dans leur intérieur.

M. Squeers, arrivé à bon port, laissa sur la route Nicolas, ses élèves (et leur bagage) s’amuser à regarder changer de chevaux, pendant qu’il courait à la taverne s’étirer les jambes au comptoir. Quelques minutes après, il revint, après s’être suffisamment étiré les jambes, autant qu’on pouvait en juger par le coloris de son nez et un léger hoquet. Au même instant sortit de la cour un tilbury crasseux et une charrette, conduite par deux journaliers.

« Mettez les enfants et les masses dans la charrette, dit Squeers en se frottant les mains ; ce jeune homme et moi nous allons monter dans le tilbury. Montez, Nicolas. »

Nicolas obéit. M. Squeers eut quelque difficulté à persuader à son roussin de se montrer aussi docile ; enfin ils démarrèrent, laissant la charretée d’enfants venir comme elle pourrait.

« Avez-vous froid, Nickleby ? demanda Squeers après qu’ils eurent fait un bout de chemin sans rien dire.

— Un peu, monsieur, je l’avoue.

— Bon ! je n’y trouve pas à redire, dit Squeers ; c’est un voyage un peu long par ce temps-ci.

— Y a-t-il encore loin d’ici à Dotheboys-Hall, monsieur ? demanda Nicolas.

— À peu près trois milles encore, répondit Squeers ; mais vous n’avez pas besoin de l’appeler ici du nom de Hall[1]. »

Nicolas toussa, comme pour en demander la raison.

« Le fait est que ce n’est pas un Hall, continua Squeers d’un ton sec.

— Ah ! vraiment, dit Nicolas tout étonné de ce bout de confidences.

— Non ! répliqua Squeers. Nous l’appelons Hall à Londres, parce que cela sonne mieux à l’oreille, mais de ce côté-ci on ne le connaît pas sous ce nom-là. Chacun a le droit d’appeler sa


  1. Hall est ordinairement le titre aristocratique de quelque vieux château