Page:Dickens - Nicolas Nickleby, trad. Lorain, 1885, tome 2.djvu/121

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du temps de reste, il était allé se réconforter avec quelques gouttes d’un liquide plus généreux que celui de la pompe ? qu’on l’explique comme on voudra, le fait est qu’il s’était trompé. Nicolas s’en retourna chez lui pour rêver à cette aventure, et surtout pour réfléchir à son aise sur les charmes de sa jeune et belle inconnue, plus inconnue que jamais.


CHAPITRE IX.

Contenant quelques épisodes romanesques des amours de Mme Nickleby avec le gentleman en culotte courte, son voisin porte à porte.

À partir de cette dernière conversation intéressante que Mme Nickleby avait eue avec son fils, elle s’était mise à déployer une attention inaccoutumée dans le soin de sa parure, ajoutant, jour par jour, à ces vêtements sérieux et conformes à la gravité de son âge qui jusqu’alors avaient composé son costume, une grande variété d’enjolivements et d’atours qui en eux-mêmes n’étaient pas considérables, mais qui, dans leur ensemble, et surtout dans leur but, avaient une certaine importance. Il n’y avait pas jusqu’à sa robe noire qui n’empruntât quelque agrément à l’élégante gentillesse avec laquelle elle était portée, et ses habits de deuil prenaient un tout autre caractère, sous la main habile qui relevait leurs attraits languissants par une disposition savante d’ornements supplémentaires, placés à propos. Ce n’est pas qu’ils fussent toujours bien frais ni bien coûteux ; c’étaient des restes de splendeur passée, échappés au naufrage domestique de la bonne dame, et qui dormaient en paix dans le coin obscur de quelque tiroir ou de quelque cassette ; mais, en troublant leur repos pour donner à son deuil un air plus jeune et plus coquet, Mme Nickleby transformait ces gages de respect et de tendre affection pour les morts en emblèmes redoutables des intentions les plus meurtrières et les plus assassines contre les vivants.

Cette révolution dans les habitudes de Mme Nickleby pouvait tenir à un sentiment élevé du devoir, et à des inspirations de la nature la plus honorable. Peut-être aussi cette dame avait-elle fini par se reprocher la faiblesse avec laquelle elle s’abandonnait à un chagrin stérile, ou par sentir la nécessité de donner