Page:Dickens - Nicolas Nickleby, trad. Lorain, 1885, tome 2.djvu/190

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l’avait petit à petit abandonné. Elle finissait par vous demander pardon de tous ses torts ? »

Snawley répondait par un petit signe de tête et par de grands soupirs en s’essuyant les yeux.

« Cette pension, continua Ralph, c’était celle de M. Squeers : l’enfant lui avait été confié sous le nom de Smike. Toutes les explications ont été satisfaisantes ; les dates correspondent exactement avec les livres de M. Squeers, qui est en ce moment domicilié chez vous. Vous avez deux autres enfants dans sa pension ; vous lui avez communiqué les dernières déclarations de votre femme mourante : il vous a amené vers moi comme vers l’homme dont la recommandation lui avait fait recevoir chez lui le futur ravisseur de votre fils, et moi je vous amène ici à mon tour. N’est-ce pas cela ?

— Vous parlez, monsieur, répliqua Snawley, comme un livre ; mais comme un bon livre qui ne dit rien que de vrai.

— Voici votre portefeuille, dit Ralph qui en tira un de la poche de son habit ; il contient, n’est-il pas vrai, les certificats de votre premier mariage et de la naissance de l’enfant ; deux lettres de votre femme et plusieurs autres papiers qui peuvent servir directement ou indirectement à confirmer ces faits ?

— Tout y est, monsieur.

— Et vous ne vous opposez pas à ce qu’on en prenne ici connaissance de manière à bien établir, aux yeux de ces gens-là, vos titres en droit et en raison à réclamer votre fils, pour exercer sur lui, sans délai, votre autorité ? C’est du moins ce que j’ai cru comprendre.

— C’est bien en effet mon intention ; je ne l’aurais pas expliqué mieux que vous ne faites, monsieur.

— Eh bien ! donc, dit Ralph en plaçant le portefeuille sur la table, ils n’ont qu’à les examiner si cela leur fait plaisir. Seulement, comme ce sont les pièces originales, je vous recommanderai de ne pas vous éloigner pendant qu’on les examine, pour être sûr de ne pas les perdre. »

À ces mots, Ralph prit un siège sans qu’on lui en eût fait la politesse, et, serrant les lèvres jusque-là légèrement séparées par un sourire diabolique, se croisa les bras et regarda son neveu pour la première fois.

Sensible à l’insulte grossière que contenaient ses dernières paroles, Nicolas jeta sur lui un regard indigné ; cependant il prit sur lui de son mieux d’examiner de près les documents en question, avec l’aide de John Browdie. Ils étaient irréprochables ; les certificats étaient des extraits réguliers des regis-