Page:Dickens - Vie et aventures de Martin Chuzzlewit, 1866, tome1.djvu/248

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« Maintenant, voulez-vous avoir la bonté de m’apprendre ce que cela signifie ?

— Quoi ? demanda Tom.

— La conduite de ce drôle. Je parle de M. Pecksniff. Vous avez vu ce qui s’est passé.

— Non, vraiment non, s’écria Tom. J’étais occupé des malles.

— N’importe, dit Martin. Allons ! Dépêchons-nous de nous en retourner. »

Et, sans ajouter un mot de plus, il se mit à marcher d’un pas si rapide que Tom avait la plus grande peine à le suivre.

Martin ne songeait guère à regarder ses pieds ; il cheminait avec une complète indifférence à travers les tas de boue et les flaques d’eau, les yeux tout droit devant lui ; seulement il faisait parfois entendre un rire étrange. Tom sentit que tout ce qu’il pourrait dire ne servirait qu’à accroître la mauvaise humeur de son compagnon ; en conséquence, il se reposa sur le bon accueil que Martin allait recevoir de M. Pecksniff lorsqu’ils seraient arrivés à la maison, pour effacer la méprise fâcheuse, selon lui, qui avait dû désobliger un favori tel que le nouvel élève. Mais il ne fut pas médiocrement stupéfait lui-même, lorsqu’ils furent arrivés dans le parloir où M. Pecksniff était assis seul devant le feu, à boire du thé chaud, de trouver qu’au lieu de recevoir cordialement son parent et de le tenir, lui, Pinch, à l’écart, ce fut tout le contraire : car M. Pecksniff fut si prodigue d’attentions pour lui, qu’il en resta littéralement confondu.

« Prenez donc du thé, monsieur Pinch, prenez du thé, dit Pecksniff, ranimant le feu. Vous devez être mouillé, et je suis sûr que vous avez froid. Je vous en prie, prenez du thé, et venez vous chauffer près du feu. »

Tom s’aperçut que Martin regardait M. Pecksniff comme s’il roulait dans sa pensée une velléité de le réchauffer encore plus près du feu, autrement dit, de le jeter dans la cheminée. Cependant il restait silencieux et, debout en face de ce gentleman, de l’autre côté de la table, il ne le quittait pas de l’œil.

« Prenez une chaise, monsieur Pinch, dit Pecksniff ; prenez une chaise, s’il vous plaît. Comment les choses se sont-elles passées en notre absence, monsieur Pinch ?

— Vous… vous serez charmé du plan du collège, monsieur, dit Tom ; il est presque achevé.

— Si vous le voulez bien, monsieur Pinch, dit Pecksniff