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BOU

Boulangers forains sont ceux qui demeurent hors de la ville & des fauxbourgs.

Il y a des Boulangers de petit pain, & des Boulangers de gros pain. De crainte que sous le titre de Marchands, les Boulangers ne se rendissent les maîtres de tous les grains, les loix Romaines leur défendoient d’être Pilotes, ou Mariniers des vaisseaux qui amenoient des blés à Rome, ou Mesureurs de grains. Voyez L. I. Navicularios Cod. Theod. de Naviculariis. L. IX. Ex Libertinis Cod. Theod. de Pistoribus. L. X. Libertini Cod. Theod. codem titulo : & Godefroy sur ces loix. En France, ils ne peuvent être ni Mesureurs de grains, Arrêt du Parlem. 4 Mai 1476, Ordonnance de Charles VI, Févr. 1415, Edit de Dec. 1672 : ni Meuniers, Ordonnance de 1415, Arrêt du 13 Juillet 1420. Il y a dans Paris deux cent cinquante Boulangers de petit pain. Il y a dans les fauxbourgs environ neuf cens Boulangers de gros pain. Suivant le compte qui fut fait environ l’an 1686, ils emploient tous ensemble environ six mille muids de blé par semaine. De la Mare. Voyez le Traité de la Police de cet Auteur. Tout le titre XII du Ve livre, traite de la Police, tant ancienne que moderne, par rapport aux Boulangers.

Ce mot est pur françois, & n’est pas bien vieux. On ne le trouve point avant le XIIe siècle. Comme on se servoit du latin dans les Actes publics, on y trouve Bolendegarius, ou Bolengarius. Ménage le dérive de polentarius. Du Cange croit qu’il vient de ce qu’en pétrissant la farine, on la tourne en globe, ou en boule, & on l’arrondit en pain. Caseneuve le tire de buccellarius ; mais il avoue que ce n’est là qu’une simple conjecture qu’il n’avance qu’au hasard. Il se fonde sur ce que Constantin Porphyrog. De Themat. Tom. VI, dit que celui qui a la garde du pain dans les armées s’appelle Βουκελλάριος, Buccellaire ; il ajoute que buccellarius est formé de buccellus, viande de figure ronde : & Cellarius, qui garde le pain. D’où il conclut que de même les Anciens avoient fait de buccellus, ou buccella, le mot buccellatum, pour signifier ce que nous appelons du pain de munition : on aura bien pû du même mot faire Buccelliger, porteur de pain, & de là Boulenger, & que Boulenger de Buccelliger, n’est pas moins vraisemblable, que verger de viridarium. Pithou le tire comme Ménage de pollix, pollenta, pollentarius, bollentarius, bollengarius, Boulanger. Cette étymologie paroît la meilleure. Celle de M. Du Cange ne laisse pas d’être probable, parce que, comme il l’a remarqué, il y a d’anciens titres où ils sont appelés Boulens. Mais celle de Guichard, qui prétend qu’il vient du Chaldéen גבל, gibbel, pinsere, & גבל, gebal, pistor, & en transposant les radicales בלג, belag, d’où Boulanger a été formé : celle-là, dis-je, est tirée de trop loin.

Boulanger de Camp. On nomme ainsi des serges drapées, de demi-aune de large, qui se fabriquent dans quelques endroits du Poitou, & particulièrement à Breuil & à Barez. On les nomme Boulanger, du nom de l’Ouvrier qui en a le premier établi la fabrique ; & de Camp, parce qu’elles sont toutes de laines Espagnoles de Campo.

BOULANGER. v. a. Pétrir la farine, & en faire du pain. Farinam subigere. Un garçon qui boulange bien. Ce mot n’est guère usité que chez les Boulangers.

BOULANGÉ, ÉE. part. Du pain bien boulangé.

BOULANGÈRE. s. f. Nom que l’on donne à une Sœur Converse, qui fait le pain d’un Couvent de Religieuses. Pistrix. On appelle aussi Boulangères les femmes des Boulangers, & celles qui font profession de faire & de vendre du pain.

BOULANGERIE. s. f. L’art de faire le pain. Ars pistoria. Ce garçon entend bien la boulangerie.

Boulangerie, se dit aussi dans les Couvens & ailleurs, du lieu où l’on fait le pain, & où l’on garde la farine. Pistrina, ou pistrinum. Et encore dans les Arsenaux de marine, du lieu où l’on fait le biscuit. Autrefois à Rome, c’étoit une boutique des Boulangers, l’endroit où ils faisoient le pain. Voyez Boulanger.

☞ BOULAY. Ville de France, en Lorraine, environ à douze lieues de Nancy.

BOULDURE. s. f. C’est la fosse qui est sous la roue, & les bâtimens des moulins à eau. Ragueau. Fossa moletrinæ, ou pistrino subjecta.

☞ BOULE. s. f. C’est en général un corps sphérique de quelque matière que ce soit. Ce mot est synonyme à globe ; mais globe a d’autres acceptions qui ne conviennent point au mot boule. Globus.

☞ La boule sert à différens usages, soit pour le jeu, soit pour l’ornement.

☞ Le jeu de boule est une espèce de jeu où plusieurs personnes font rouler des boules d’un endroit à un autre, & jouent à qui fera aller sa boule plus près du but. Le fort de la boule, quand elle est toute ronde, est l’endroit où le bois est plus serré, & par conséquent le plus pesant. Cela vient de ce que les arbres étant de bout, ont leur bois plus serré du côté du nord que du midi. Le fort de la boule, qui n’est pas absolument ronde, est le côté que le Tourneur a fait un peu moins élevé que l’autre. Il est des boules où le fort est presque imperceptible aux yeux : & on est obligé de le rouler, pour voir de quel côté est le fort. Aller à l’appui de la boule, c’est jouer une boule qui en aille soutenir une autre sans la débutter. Jouer à la longue, ou à la courte boule. Charles V défendit le jeu de boule. Le Gendre. On dit, Avoir la boule ; pour dire, avoir l’avantage de jouer le premier. Il faut voir à qui aura la boule. Acad. Fr. ☞ Il y a aussi des boules de mail, plus petites que les autres, d’un bois très-dur & bien tourné, que l’on chasse avec la masse ou mail. Elles sont d’un poids proportionné à celui du mail, c’est-à-dire, environ de moitié. Il y a aussi des boules, c’est-à-dire, des morceaux de bois ronds pour jouer aux quilles. Les Poëtes dépeignent la fortune avec un pied sur une boule, pour marquer son inconstance.

Ménage dérive ce mot de bulla, à cause de la rondeur des bulles, ou petites bouteilles qui se font sur l’eau ; ou plutôt de pola, dont on a fait pila, qui signifie la même chose.

Boule. Terme de Tourneur. Il signifie un morceau de bois tourné en forme ronde, qui sert à soutenir quelque ouvrage de Menuiserie, ou de Tourneur. Ainsi on dit boule d’armoire, boule de table, boule de guéridon, &c.

On appelle aussi boule en termes d’Architecture, tout corps sphérique qui termine une décoration, & qui se met à la pointe d’un clocher, ou sur la lanterne d’un dôme, auquel cette boule est proportionnée. On en met aussi au bas des rampes, & sur les piédestaux dans les jardins. Quand cette boule termine quelque ouvrage, on l’appelle boule d’amortissement.

Boule, en termes de jardinage, se dit aussi de certains arbrisseaux taillés en forme de boule. Une boule de myrthe, une boule de chevre-feuille.

Boule. Terme de Carrier. C’est ce qu’on appelle dans d’autres professions un rouleau, sur lequel on conduit les marbres, les pierres, les poutres, & autres matériaux pesans.

Boule, ou Sphère. Instrument de Miroitier-Lunetier, avec lequel ils font les verres concaves qui servent aux lunettes à longue vue, aux lorgnettes, aux microscopes, & autres instrumens.

Boule, chez les fourbisseurs. C’est aussi un instrument de Fourbisseur, qu’on nomme autrement Chasse-pommeau, parce qu’il sert à placer le pommeau d’une épée sur la soie de la lame.

Boule, qu’on appelle aussi enclume-ronde. C’est, en termes de Chaudronnier, l’instrument sur lequel on fait la carre des chaudrons, & autres ouvrages de chaudronnerie, qui ont des enfonçures.

On dit proverbialement, faire une chose à boule vue ; pour dire, inconsidérément, à l’étourdie, à tout hasard, & d’une manière incertaine. Pasquier prétend que ce mot a été dit par corruption au lieu de bonne vue ; de sorte que de son temps, à boule vue, signifioit, certainement, assurément. Sur quoi on peut voir les Observations de Ménage sur la langue françoise. Jouer à boule vue.