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AVA — AUB

un second fret qu’on est obligé de faire des vaisseaux ou alléges quand le navire a touché. Elles sont réglées au sou la livre, tant sur les propriétaires du vaisseau, que des marchandises. Elles sont réglées dans le titre IV, du livre III de l’Ordonnance de la Marine de 1681. Toutes ces distinctions y sont marquées précisément. On appelle aussi avarie commune, ou grosse avarie, celle qui avient par jet des marchandises, pour cables, voiles ou mats coupés pour le salut commun.

Il y a deux sortes d’avaries, dit un Auteur qui a fait un traité ou une dissertation sur les avaries ; l’une commune, & l’autre qu’on nomme grosse. La première est celle à laquelle les marchandises seules contribuent ; la seconde, où le vaisseau & les marchandises contribuent. Pour que la grosse ait lieu, il faut, dit le même Auteur, 1o. Que quelque chose ait été jetée en mer. 2o. Qu’au temps qu’on l’a jeté, il y eût une nécessité grande & inévitable de le faire. 3o. Que le Gouverneur ne l’ait fait qu’après avoir consulté les Marchands. 4o. Que cela ait été fait pour le salut commun de tout le navire. 5o. Qu’en conséquence le navire se soit sauvé & soit arrivé à bon port. Dans ces cas, tous ceux pour l’intérêt desquels la chose a été jetée en mer, doivent contribuer au dédommagement de celui à qui elle appartenoit ; tout doit entrer en contribution, même les pierres précieuses & les bijoux, qui ne chargent point le vaisseau, les esclaves & le navire même ; mais non pas les têtes libres, ni les vivres, nec Nautarum locaria. L’estimation se doit faire par des Experts. Il faut y distinguer les choses qui ont été jetées en mer, & celles qui ont été conservées. Le prix des premières doit être réglé sur ce qu’elles ont été achetées, & celui des secondes, sur ce qu’elles peuvent être vendues. Pour l’argent, il en faut considérer la valeur intrinsèque & l’extrinsèque. Rainoldus Christian. à Derschau in Nov. Mart. Balt. 1700, jul. p. 200.

Avarie, signifie aussi un droit qui se paye pour l’entretien d’un port, par chaque vaisseau qui y mouille. Mornac, sur la Loi 4. Dig. ad Legem Rhodiam de jactu, dit que ce mot est corrompu du grec βᾶρις, qui signifie Navire chez les Ioniens. Les Italiens & les Espagnols se servent du même terme.

Cela s’appelle en allemand haveren, d’où l’on a fait havaria, pour exprimer la même chose en latin. Ce mot, dit un Auteur Allemand, vient de hafen, qui signifie port. Les Espagnols appellent ce droit, El Gasto de haberia ; & D. Juan Solerzano, dans son ouvrage De Indiar. Gubernat. L. IV, c. 1, prétend que ce nom vient de l’Espagnol haber, bien, ou haberes, biens, qui vient du latin habere. Voyez ce qu’il en dit au même endroit. Les Espagnols disent en latin haberia, & non pas haveria, comme dans le Nord.

AVARIS. s. m. Terme de Relation. Droit ou taxe qui se lève dans les Etats du Grand Seigneur, lorsqu’il a besoin d’hommes dans ses armées de terre ou de mer. En ce cas les Moula-Cadis & les Cadis ont charge d’envoyer à Constantinople un certain nombre d’hommes, auquel l’étendue de leur juridiction est taxée, ou la somme de 25 écus par tête, selon la volonté du Prince. A. D. S. M. C’est ce tribut qui s’appelle avaris.

AVASAXA. Montagne de Laponie, un peu au Sud du Cercle polaire, près du Confluent du Tenglio & du Torno. Voyez le discours de M. de Maupertuis sur la figure de la terre. Cette montagne est à 15 lieues de Torno, sur le bord du fleuve ; l’accès n’en est pas facile. On y monte par la forêt, qui conduit jusqu’à environ la moitié de la hauteur : la forêt est là interrompue par un grand amas de pierres escarpées & glissantes, après lesquelles on la retrouve, & elle s’étend jusque sur le sommet. Le côté du nord est un précipice affreux de rochers, dans lesquels quelques faucons avoient fait leur nid : c’est au pied de ce précipice que coule le Tenglio. De cette montagne la vue est très-belle : nul objet ne l’arrête vers le midi, & l’on découvre une vaste étendue du fleuve Torno, du côté de l’est : elle poursuit le Tenglio jusque dans plusieurs lacs qu’il traverse. Du côté du nord la vue s’étend à 12 ou 15 lieues, où elle est arrêtée par une multitude de montagnes entassées les unes sur les autres, comme on représente le cahos. Entre cette montagne & Cuitaperi, le fleuve Torno est d’une grande largeur, & forme une espèce de lac. Maupertuis.

AVASTE. Terme de mer, pour dire, c’est assez, arrêtez-vous. Satis est, resiste, subsiste.

AVAUGOUR. s. f. & nom propre de femme. C’est ainsi qu’on nomme en divers endroits de Poitou sainte Valburge. Valburgis. Chast. 25 Fév. Voyez Valburge.

AVEAU-L’EAU. Sorte de phrase adverbiale dont se servent les Bateliers, pour dire, suivant le courant de l’eau. Secundùm flumen. Voyez Aval.

AUB.

AUBADE. s. f. Concert qu’on donne dès le matin vers l’aube du jour, à la porte ou sous les fenêtres de quelqu’un. Antelucanus ad fores alicujus gratulantium concentus. Les tambours, les haut-bois, vont donner des aubades à leurs Capitaines le jour de l’an, le jour de leur fête.

M. le Fevre dit qu’on appelle ces concerts Aubades, quòd sub albam, id est, auroram, edi soleant ; & l’étymologie est vraie.

Aubade, se dit figurément, à contre-sens, d’une insulte, ou affront qu’on fait à quelqu’un. Injuria, contumelia. Quand des Sergens viennent exécuter dans une maison, c’est une étrange aubade pour le maître. Il n’est reçu que dans le discours familier.

La pauvre Noblesse d’Anjou
Fut une nuit troussée en male
Par une troupe Impériale.
L’Allemagne a fort étalé
Le mérite de cette aubade :
Par-tout elle en a fait parade
Comme d’un succès signalé. Ab. Reg.

Souventes fois par-devant la maison
De Monseigneur viennent à grande foison
Donner aubade à coup de hacquebutes,
D’un autre accord qu’épinettes ou flûtes.Marot.

AUBAGNE. Aubanea & Albinia. Petite ville de France, en Provence, vers la côte de la mer, à trois lieues au levant de Marseille, à cinq d’Aix.

AUBAIN. s. m. Terme de Chancellerie & de Palais. Etranger qui habite dans un pays où il ne s’est point fait naturaliser. Hospes loci, peregrinus, advena. Le Roi prétend succéder à tous les Aubains, à l’exclusion de tous les autres Seigneurs. Un Aubain peut disposer de ses biens par donation entre-vifs, & non par testament. Les enfans d’un Aubain, nés en France, lui succèdent : leur naissance leur tient lieu de lettres de naturalité.

Nicod dérive ce mot de alibi natus. Cujas le dérive de advena ; car les Aubains sont ainsi appelés dans les Capitulaires de Charlemagne. Caseneuve, après M. du Cange, le tire du mot Albanus, nom qu’on a donné aux Ecossois, ou Hibernois, qui autrefois avoient coutume de voyager dans les pays étrangers, & de s’y habituer. Ils ont été appelés Aubains en France, ce qui s’est étendu à tous les autres étrangers. M. de Laurière, dans ses notes sur Ragueau, appuie son sentiment de différens passages d’Auteurs, qui montrent que les Anglois, les Ecossois, & les Irlandois, étoient autrefois les plus grands voyageurs du monde : il ajoute que l’étymologie d’Aubain, que quelques-uns font venir du mot albinus, formé d’alibi natus, est un jeu de mots ridicule.

Les Aubains ne peuvent posséder ni charges, ni bénéfices dans le Royaume, à moins qu’ils n’aient obtenu des lettres de naturalité. Les enfans d’un François habitué, & marié en pays étranger, ne sont point réputés Aubains, lorsqu’ils reviennent demeurer en France. De Lange. Les biens des Aubains morts sans enfans & sans héritiers, appartiennent au Roi par l’Ordonnance de S. Louis. Se aucun Aubain ou bastard muert sans