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ADO

qu’il s’y est apprivoisé. On le dit aussi des hommes qui s’intriguent & se familiarisent dans quelque maison. Admiscere se.

On dit en termes de Marine, que le vent adonne, quand il change, & devient plus favorable qu’il n’étoit.

On dit aussi s’adonner, en parlant de chemin : Je vous prie de passer chez moi, quand votre chemin s’adonnera de ce côté-là. Cum iter feret. Dans ce sens il est du style très-familier.

ADONNÉ, ÉE. part. Deditus. Ce mot vient de ad & de donare.

ADONQUES. Vieux adv. Ainsi, donc. Itaque.

Adonques Molinet
Aux Vers choisis, le grave Châtelain. Marot.

ADOPTER. v. act. Prendre un étranger pour le faire entrer dans la famille, comme son propre fils, & lui donner droit à sa succession, en cette qualité. Adoptare. La coutume d’adopter étoit fort familière aux Romains, ils l’avoient prise des Grecs, qui l’appeloient ὑίωσις ; mais elle n’est point en usage en France. Elle a encore lieu en quelques endroits de l’Empire. Celui qui étoit adopté passoit dans la famille, & entroit sous la puissance paternelle de celui qui l’adoptoit ; mais il n’étoit point délivré de celle de son père naturel, qui conservoit ses droits.

Du Cange dit que ce mot vient du Latin adoptare, d’où on a fait dans la basse Latinité adobare, qui signifie, faire Chevalier, ceindre l’épée : d’où est venu aussi le mot de miles adobatus, qui signifioit un Chevalier nouvellement fait, parce que celui qui le faisoit Chevalier, en faisoit une espèce d’adoption.

On dit aussi, par la Passion de Jesus-Christ, nous sommes adoptés enfans de Dieu ; nous avons part à l’héritage céleste. Les Religieux ont mis la réforme dans un tel Couvent, & l’ont adopté & uni à leur Congrégation.

Adopter, se dit dans un sens figuré, pour approuver l’opinion d’un autre, dont on fait la sienne propre. J’adopte votre façon de penser. Je n’adopterai jamais une pareille opinion.

ADOPTÉ, ÉE. part. Adoptatus.

ADOPTIF, IVE. adj. Celui qui est adopté. Adoptativus, filius adoptivus. L’Empereur Adrien préféroit les enfans adoptifs aux enfans naturels, parce qu’on choisit les enfans adoptifs, & que le hasard donne les enfans naturels. Les enfans adoptifs, chez les Romains, partageoient avec les enfans naturels. C’est pourquoi ils prenoient le nom & le surnom de celui qui les adoptoit ; seulement pour marquer leur extraction & leur naissance, ils ajoutoient le nom de la maison d’où ils descendoient, ou le surnom de la branche particulière dont ils étoient issus. ☞ Dans le langage de l’Ecriture, J. C. nous fait enfans adoptifs de son père. M. Ménage a fait imprimer un livre d’éloges, ou de vers qu’on lui a adressés, & qu’il appelle un livre adoptif, qu’il a joint à ses œuvres. D. Heinsius & Furstemberg de Munster ont aussi publié des livres adoptifs ; c’étoient des recueils de Poësies faites à leur honneur. Voyez Adoption.

Adoptif, ive, ou Adoptien, enne. Adoptivus, ou Adoptianus. Nom de Secte. Les Adoptiens eurent pour Chefs Elipand de Tolède, & Félix d’Urgel, qui avoit été son précepteur. Le premier écrivit à l’autre pour savoir de lui comment il entendoit que Jesus-Christ fut Fils de Dieu. Celui-ci lui répondit, que selon la nature humaine il n’étoit poins fils naturel, mais seulement fils adoptif. Ils répandirent tous deux cette doctrine sur la fin du viiie siècle ; & c’est ce qui les fit appeler Adoptifs, ou Adoptiens, eux & leurs Sectateurs. Félix fut convaincu & condamné à Narbonne en 788, à Ratisbonne en 792 ; à Francfort sur le Mein en 794, peu de temps après par le Pape Hadrien ; en 799 par Léon III, & encore la même année à Urgel dans un Synode. Félix & Elipand revinrent de leur erreur. Félix a décrit toute cette affaire dans la confession de foi qu’il envoya après son retour aux Clercs de son Diocèse. Nous avons aussi un ouvrage d’Alcuin contre Félix & Elipan. Il soutient que c’est retomber dans le Nestorianisme, de distinguer en Jésus-Christ deux Fils de Dieu, l’un naturel, & l’autre adoptif ; & deux Dieux, l’un vrai, & l’autre nuncupativus, qui ne l’est que de nom. On appelle Féliciens ceux qui suivirent Félix & Elipand, du nom de Félix, qui en étoit Auteur. Feliciani. Et leurs erreurs, l’Hérésie Félicienne. Hæresis Feliciana. Il y a dans les Nouvelles Littéraires de la mer Baltique 1699, au mois d’Août, p. 238, & suivantes, une Dissertation de Jean Trelland sur cette Hérésie. Voyez aussi les Acta Sanct. Benedic. IV. Sæc. p. 1, præf. §. I.

ADOPTION. s. f Action par laquelle on adopte ; acte par lequel un homme en fait entrer un autre dans sa famille, comme son propre fils, & lui donne droit à la succession, en cette qualité. Adoptio. L’Adoption se faisoit par un acte public, & avec certaine formule. C’étoit une imitation de la nature, inventée pour la consolation de ceux qui n’avoient point d’enfans ; cette imitation de la nature étoit si régulière, que les Eunuques ne pouvoient adopter, parce qu’ils étoient dans l’impuissance actuelle d’avoir des enfans. Il n’étoit pas non plus permis au plus jeune d’adopter le plus vieux, parce que cela eût été contre l’ordre naturel ; & il falloit que celui qui adoptoit, eût 18 ans plus que l’enfant adoptif, afin qu’il pût être père : car l’adoption eût été un monstre, si le fils eût été plus âgé que le père. Chez les Romains on distinguoit deux sortes d’adoptions : l’une qui se faisoit devant le Préteur ; & l’autre par l’assemblée du peuple, dans le temps de la République, & depuis par un rescrit des Empereurs. La première regardoit un fils de famille, & alors on s’adressoit au Préteur devant lequel le père naturel déclarait, qu’il émancipoit son fils, & qu’il consentoit qu’il passât dans la famille de celui qui l’adoptoit. La seconde regardoit une personne libre, & cette espèce d’adoption s’appeloit adrogation. Adrogatio ou arrogatio. Celui qui étoit adopté changeoit tous ses noms, & prenoit le prénom, le nom & le surnom de celui qui l’adoptoit. Du temps du Pape Benoît II, l’Empereur Constantin Pogonate envoya à Rome les cheveux de ses deux fils, Justinien & Héraclius, qui furent reçus par le Pape, le Clergé & l’armée. C’étoit une espèce d’adoption usitée en ce temps-là ; & celui qui recevoit les cheveux d’un jeune homme, étoit regardé comme son père. Fleur. Le Pape Jean VIII avoit adopté Boson premier Roi d’Arles, comme il parle dans une de les lettres. A peine trouvera-t-on d’autre exemple de l’adoption dans l’ordre ecclésiastique ; la loi, qui imite la nature nécessairement, n’osant pas donner des enfans à ceux à qui ce seroit un crime de s’en faire. Chorier. Hist. de Dauph. l. x. t. i, p. 693.

Les anciens Gaulois appeloient l’adoption une affiliation. L’adoption ne se pratique point en France : on en trouve seulement quelques vestiges dans la coutume de Saintonge, qui porte que l’affilié ne succède à l’affiliant qu’aux biens meubles, & non aux héritages, pour lesquels l’adoption ne lui peut profiter. Au reste, les enfans par adoption n’étoient point distingués des autres, & ils entroient dans tous les droits que la naissance donne aux enfans à l’égard de leurs pères. C’est pourquoi ils devoient être ou institués héritiers ou nommément exhérédés par le père qui les avoit adoptés ; autrement le Testament étoit nul. Cependant l’enfant adoptif ne succédoit point aux parens du père adoptant, à moins qu’ils n’eussent consenti à l’adoption. Les Chrétiens sont enfans de Dieu par adoption. C’est une espèce d’adoption que la réception d’un Religieux. C’est aussi une espèce d’adoption honoraire que l’institution d’un héritier universel, à la charge de porter le nom & les armes de la famille. Cette adoption testamentaire étoit aussi en usage chez les Romains : mais comme cette espèce d’héritier n’étoit qu’un simple légataire, plutôt qu’un enfant adoptif, il falloit que l’adoption par testament fut confirmée par le Peuple. Ainsi, lorsqu’Auguste se trouva adopté par le testament de César, M. Antoine retarda la confirmation de l’assemblée du Peuple, parce qu’il ne vouloit point