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couteau, pour couper en morceaux le gros pain qu’ils vendent en détail & à la livre.

Couteau. Instrument de Chirurgie. Il y en a de quatre sortes. Le couteau courbe & le droit pour les amputations ; le couteau lenticulaire pour le trépan ; le couteau à crochet pour l’extraction du fœtus mort dans la matrice. Voyez le Dict. de M. Col de Villars.

Couteau de chasse. Epée courte que portent les Chasseurs pour couper les branches dans les bois.

☞ On dit figurément, mettre le couteau à la gorge à quelqu’un pour lui faire faire une chose, lui faire violence. Vim inferre. Cette nouvelle lui a mis le couteau dans le cœur, a été un coup de couteau pour lui, l’a sensiblement affligé. Plagam inferre. On dit aussi, que des gens aiguisent leurs couteaux ; pour dire, qu’ils se préparent à se battre, à se quereller, à se disputer. Gladios acuere. Et qu’ils vont jouer des couteaux ; pour dire, qu’ils sont prêts à en venir aux mains. Ad manus, ad arma venire. Je me contente de savoir danser & jouer de la flûte, & quelquefois des couteaux. Ab. J’en suis, & j’y jouerai comme il faut des couteaux. Scar.

On dit aussi au jeu de cartes, quand un homme a voulu couper une carte, & qu’un suivant a coupé au dessus de lui, que son couteau n’étoit pas assez fort.

On dit qu’un homme est le couteau pendant d’un autre ; pour dire, qu’il est toujours à ces côtés, qu’il le suit, l’accompagne par-tout, par allusion aux gens qui portoient autrefois leur couteau pendu à la ceinture, comme le font encore des Cuisiniers, des Charcutiers, des Bouchers, &c.

On dit aussi, que des hommes sont aux épées & aux couteaux, tirés ; pour dire, qu’ils sont ennemis jurés, qu’ils sont prêts à le battre, à se nuire l’un à l’autre. On dit mettre un couteau sur table, pour dire, se préparer à faire grande chère. Epulum apparare. On dit encore d’une pièce de drap dans laquelle on a taillé un habit, & qu’on a entamée, qu’on a mis le couteau dedans.

On dit proverbialement aux enfans qui demandent quelque chose qui n’est pas de leur compétence : on vous en donnera des petits couteaux à perdre. Toutes ces expressions sont familières ou populaires.

Couteau. s. m. terme de Fauconnerie. C’est la première penne des aîles aux oiseaux de poing. Ces plumes n’ont des barbes longues que d’un côté, & des courtes de l’autre ; elles se terminent en pointe, & ainsi ressemblent en quelque sorte à un couteau. Prior alæ penna. Les grandes pennes & les couteaux de la fresaie sont noirs. Les plumes de l’orfraie qui couvrent les grandes pennes & les couteaux ont des taches blanches à leurs extrémités.

COUTEAUX. On appelle à Constantinople, premiers couteaux, les peaux de bœuf ou de vache, qu’on lève de dessus ces animaux, depuis le mois de Juin jusqu’au mois de Novembre. Ce sont les meilleures de toutes.

COUTELAS. s. m. épée de fin acier fort tranchante, d’un côté seulement, large, & qui va un peu en se courbant. Acinaces. On tranche la tête en France avec un coutelas. On prétend que le coutelas d’aujourd’hui est une espèce de cimeterre assez semblable à celui dont se servoient les Mèdes, les Parthes, les Perses.

Coutelas, en termes de Marine, se dit des petites voiles qu’on attache de beau temps à côté des grandes, qu’on appelle autrement bonnettes en étui. Vela minora.

COUTELAS. s. m. Poisson. Voyez Espadon : c’est la même chose.

COUTELIER. s. m. Celui qui fait ou qui vend des couteaux. Cultorum faber. Sa femme est appelée Coutelière. Fabri cultorum conjux. Par un édit de 1666, il est défendu aux Couteliers de fabriquer & débiter des bayonnettes, poignards, couteaux en forme de poignards, dagues, épées en bâtons, &c. & de se retirer dans les Collèges & autres semblables Communautés.

Quelques-uns écrivent Cousteliers, c’étoit l’ancien usage ; aujourd’hui on écrit couteau & Coutelier.

COUTELIER, terme de Conchyliologie. C’est le nom d’un coquillage qui s’appelle ainsi, parce qu’il est dans sa coquille comme un couteau dans sa gaîne. Cette coquille est ronde & composée de deux parties semblables à deux moitiés d’un cylindre creux, jointes de chaque côté par une membrane qui leur permet de s’écarter un peu ou de se rapprocher. Le Coutelier se tient toujours debout & perpendiculairement dans cette gaîne, & n’a point d’autre mouvement que celui d’enfoncer un peu dans le sable, ou de s’en retirer ; ce qu’il fait par le moyen d’une espèce de jambe qu’il fait sortir à son gré par le bas de la gaîne. Ce coquillage appréhende fort le sel, & il est surprenant qu’un animal qui vit dans l’eau salée ait tant d’aversion pour le sel. Hist. de l’Acad. des Sc. 1718. p. 13, d’après M. de Reaumur. Voyez Manche de Couteau.

COUTELIÈRE. s. f. étui où on met plusieurs couteaux. Cultorum theca. Si j’achète les couteaux, je veux qu’on me donne aussi la coutelière. Ce mot est vieux & se dit peu.

COUTELINE. s. f. Grosse toile blanche ou bleue faite de fil de coton, qui vient des Indes Orientales, particulièrement de Surate.

COUTELLERIE. s. m. Ce terme se prend pour le métier de Coutelier, l’art de faire des couteaux, ciseaux & autres ouvrages, & généralement pour les ouvrages que font & débitent les Couteliers. Cultorum officina. Les artisans de Moulins sont fort experts en coutellerie. Il se fait un grand débit de coutellerie à Châtelleraud.

☞ COUTER, v. n. terme relatif au prix qu’une chose est vendue. Etre acheté un certain prix. Constare. On dit qu’une chose coute peu, beaucoup. Parvi, magni constare. Qu’elle ne coute guères, qu’elle coute trop, plus qu’elle ne vaut. Combien vous coute cela ? Quanti constat, quanti emisti ? La victoire nous coute bien du monde. Constat Victoria plurimorum morte. Le blé est ramendé, il ne coute plus que tant. Il en faut avoir quoi qu’il coute. Est-il nécessaire d’acheter des perruques, lorsqu’on peut porter des cheveux de son crû & qui ne coutent rien ? Mol.

Couter signifie aussi obliger à de grandes dépenses. Constare. Les procès l’ont ruiné, lui ont couté tout son bien. L’exercice de la paume coute beaucoup. Un équipage coute beaucoup à entretenir dans Paris.

Couter se dit aussi figurément en choses morales & spirituelles, de ce qui cause de la peine ou de la douleur. Stare. Cette perte lui a bien couté des larmes & des soupirs. Cet homme n’a pas le génie facile, ses vers lui coutent beaucoup. Pour punition de sa faute, il lui en coute un mois de prison. Ne tenons pas nos sermens, je vous prie, il coute trop de les observer. Les vieillards aiment à conter les histoires de leur temps, parce que quand l’esprit a perdu sa force, il aime à dire ce qui ne coute rien à penser. S. Evr. C’est acheter trop cher le ménagement de nos intérêts, lorsqu’il en coute des bassesses. Id. Son amitié coute cher, en parlant d’une personne dont il faut essuyer les caprices & les méchantes humeurs. On achète les choses bien cher, quand il en coute un repentir. Idem.

Il me coute assez cher, l’ingrat, pour être à moi,
Et tel mot, pour avoir réjoui le Lecteur,
A couté bien souvent des larmes à l’Auteur.

C’est à ceux-là à combattre qui peuvent mourir sans qu’il en coute rien qu’à eux ; mais vous donc la vie renferme la destinée de tant de monde, vous ne devez point courir au danger. Bouh. La tranquillité publique entretenue vaut mieux que ces vic-