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CIC

Aldrovand dit que c’est proche du Tésin qu’elles font leurs assemblées ; & qu’après avoir tenu conseil entr’elles, elles partent la nuit.

Il y a dans le Cabinet de la Société Royale de Londres une tête d’une cicogne des Indes, que personne n’avoit décrite avant Grew, qui l’a fait dans le Musœum Regalis Societatis.

On dit que c’est la cicogne qui a appris aux hommes l’invention des clystères. La cicogne tient l’aîle baissée en volant. On croit que le bruit qu’elle fait vient de son bec dont les deux parties frappent l’une contre l’autre avec beaucoup de violence. La cicogne est le symbole de la reconnoissance. Le Roi de la Chine, pour marque de sa Royauté, porte deux cicognes en broderie sur la poitrine, avec une perle au haut du bonnet ; ce qui n’est permis qu’à lui seul. Elle est appelée ciconia, quod sit cicuris & benignæ naturæ, dit Martinius ; parce qu’elles est d’un naturel doux & tout-à-fait apprivoisé, demeurant volontiers parmi les hommes. Junius rapporte dans son Histoire de Hollande, qu’on a vu une cicogne revenant à son nid qui alloit être consumé par les flammes d’un incendie, qui en étoit tout près, faire de grands efforts pour retirer ses petits du danger où ils étoient, & ne l’ayant pû faire à cause qu’ils n’avoient point de plumes, s’étendre dans son nid, & le laisser brûler en les couvrant de ses aîles. On trouve dans le troisième Livre de Vossius, de Idol. c. 82, 84, 85, 93, 96, 97, à peu près tout ce que l’antiquité a dit des cicognes.

Une cicogne qui nourrit son pere & sa mere vieux, avec ce mot, dulci pro munere vitæ, est une devise de Lucarini, pour exprimer la reconnoissance. Et avec ce mot, Par pari ferunt, elle est de Scipion Bargagli. On donna pour devise à Ranution I, Duc de Parme, une cicogne qui tue des serpens, avec ce mot Servat & prostigat ; & à Philippe III, Roi d’Espagne, Donec conficiam ; pour marquer sa piété & son zèle à exterminer les Mores d’Espagne. Celle-ci est d’Emmanuel Thesauro.

Sur les médailles, la cicogne qui nourrit le pere & la mere durant leur vieillesse est le symbole de la Piété ; elle se met ordinairement à côté de cette Déesse, ou des enfans qui ont singulièrement honoré leurs parens. J. Jobert.

On appelle proverbialement des contes à la cicogne, des contes faits à plaisir, des contes de vieilles, dont on amuse les petits enfans. Fabulæ.

Cicogne est aussi une certaine machine à tirer de l’eau. Tolleno. Tachard.

CICONNEAU. s. m. Prononcez & écrivez. Cigonneau. Petit de la cigogne. Ciconniæ pullus.

Les ciconneaux nourrissent leurs parens, lorsqu’ils sont trop vieux pour chercher leur vie. Faultrier.

CICUTAIRE. s. f. Cicutaria. Plante ombellifère dont les feuilles approchent en quelque manière de celles de la ciguë ; c’est apparemment à cette ressemblance qu’elle doit son nom. Sa racine est vivace, assez grosse, branchue ; du collet de cette racine sortent quelques feuilles fort amples, d’un vert-foncé, découpées en plusieurs segmens, qui sont recoupées en d’autres plus menus, taillées en manière de pinnules de Fougère. Les queues qui les portent sont branchues, épaisses à leur naissance, d’où sort une tige plus grosse que le doigt, noueuse, creuse, haute de trois à quatre piés, & garnie de quelques feuilles qui prennent origine des nœuds, & qui ressemblent aux premieres. Elle est divisée en quelques branches à son extrémité, qui soûtiennent chacune une ombelle de fleurs pâles, auxquelles succèdent des fruits composés de deux grosses semences longuettes, voûtées & cannelées sur leur dos, d’une couleur tirant sur le blond. L’odeur de ses feuilles est un peu désagréable.

CID.

CID. s. m. C’est le nom que donnèrent à Dom Rodrique Dias de Bivar cinq Rois Maures qu’il vainquit. Ce Dom Rodrigue est ce guerrier fameux du onzième siécle, plus connu en France sous le nom de Cid, depuis la Tragédie de Corneille, dont il est le sujet, que par ses victoire, & la part qu’il eut à celles d’Alphonse III.

Cid est un nom arabe, qui signifie Chef, Commandant, Général, Gouverneur, petit Roi. Il vient de קאד, qui signifie gouverner, administrer, commander. De là se dit קאיד, Ceid, d’où s’est formé Cid.

Cid. s. m. Tragédie de Pierre Corneille. Jamais pièce de théâtre n’eut un si grand succès. M. Pelisson, dans son Histoire de l’Académie, dit qu’en plusieurs Provinces de France il étoit passé en proverbe de dire, cela est beau comme le Cid. Si ce Proverbe a péri, il faut s’en prendre aux Auteurs qui ne le goûtoient point, & à la Cour, ou ç’eut été très-mal parler que de s’en servir sous le ministère du Cardinal de Richelieu. Vie de M. Corneille l’aîné, par M. de Fontenelle son neveu. Au sentiment de M. de Voltaire, qui se connoît si bien en pièces de Théatre, & qui en a fait lui-même de si applaudies, ce n’est ni aux Auteurs, ni au Cardinal de Richelieu qu’il faut s’en prendre, mais à Cinna & à d’autres Tragédies de Corneille, plus belles que le Cid.

☞ CIDAMBARAM. Ville des Indes, au Royaume de Gingi, sur la côte de Coromandel.

CIDARIS. s. m. C’étoit une espèce de Diadême que portoient les Rois d’Arménie, assez semblable à la Thiare des Perses. Cette Thiare étoit de deux sortes : la droite, & celle qui étoit renversée. Celle-ci pouvoit être portée par tous les sujets du Prince ; au lieu que l’autre étoit réservée aux Rois seuls, & à ceux qu’il désignoient pour leurs successeurs. Plutarque, in Artaxerxes.

☞ CIDAYE. Ville maritime d’Asie, dans l’Île de Java, au Royaume de Jurubeya. Le Roi y fait sa résidence.

CIDRE. s. m. Boisson faite de pommes pillées & pressurées. Le cidre de pommes s’appelle du Pommé, vinum pomaceum ; celui de poires du Poiré, vinum pyraceum. Le meilleur cidre se fait en Normandie. Le fruit à couteau ne vaut rien pour faire le cidre. On emploie des pommes rustiques, dont il faut bien connoître les différens sucs, afin de les combiner convenablement, & de corriger les uns par les autres.

☞ Pour avoir du cidre fort, on le laisse reposer sur sa lie & couvert de son chapeau. Si l’on veut un cidre doux & agréable, il faut le tirer au clair lorsqu’il commence à gratter doucement au palais ; c’est ce qu’on appelle cidre paré.

☞ On prétend que le cidre est pectoral, humectant & rafraichissant. En général il ne convient qu’à ceux qui en ont fait usage dès leur jeunesse.

M. Huet, ancien Evêque d’Avranches, dans ses origines de Caën, p. 144, prouve que l’usage du cidre étoit établi à Caën dès le treizième siècle, puisqu’il en est fait mention dans les Lettres Patentes de Philippe le Bel, & que Guillaume le Breton, qui vivoit au commencement du XIIIe siècle, appelle le pays d’Auge, Siceræque tumentis, Algia potatrix. M. Huet ajoute, l’usage du cidre, pour le dire en passant, est plus ancien en France qu’on ne s’imagine : sous les enfans de Constantin on accusoit les Gaulois d’aimer le vin, & diverses autres liqueurs qui ressembloient au vin, comme nous l’apprend Ammien Marcellin. Les Capitulaires de Charlemagne mettent au nombre des métiers ordinaires celui de Siceratores ; ce que l’on explique, ceux qui savent faire de la bière, du pommé, du poiré, ou toute autre liqueur bonne à boire. D’où il paroît que le mot de cidre, qui est le même que sicera, ne se restreignoit pas comme aujourd’hui au