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préface

d’adventuriers a varié dune époque à l’autre. Nous voyons, en tout cas, que le mot s’est employé pour désigner des combattants souvent très braves et dignes d’éloges : Et qui d’entre eulx l’honnesteté demande, Voyse orendroit veoir de Mouy la bande D’adventuriers issus de nobles gens : Nobles sont ilz, pompeux et diligens. Marot, Epistres, 3. — Le mot, dans cette acception, avait vieilli avant la fin du siècle. Une organisation différente de l’armée en avait hâté la disparition. Dans sa signification actuelle, on peut à peine dire que nous ayons encore affaire au même mot qu’au xvie siècle, tant, l’aventurier d’aujourd’hui, qui vit d’intrigues, diffère de celui d’autrefois, qui cherchait les aventures militaires pour le profit qu’il pouvait en tirer, mais aussi par amour de la bataille et du danger.

Le soudard était simplement un soldat, un combattant recevant une solde, en ancien français une soude. Le mot n’avait rien de péjoratif : Ainsi tousjours la Victoire, Mon Roy, sur tes estendars Se puisse asseoir, et la gloire Sur le front de tes soudars. Belleau, Petites Inventions, Chant de triomphe. — Mais l’Italie nous donne solde et soldat. Devant ces mots à la mode, soude disparaît, et le soudard n’est plus qu’un soldat brutal et grossier.

Coquin désignait un mendiant : Qui fait les coquins mandier ? C’est qu’ils n’ont en leurs maisons dequoy leur sac emplir. Rabelais, III, 14. — Un coquin pouvait, être un très honnête homme. Mais la pitié est voisine du dédain, du mépris, et, de l’idée d’extrême pauvreté, de mendicité, on passe facilement à une idée plus défavorable. C’est ce qui s’est produit aussi pour le mot gredin, qui autrefois a servi également à désigner un mendiant.

Faquin, venu d’Italie, avait apporté son sens italien de portefaix : Vous y voyez plus de mille facquins, portans sur leurs dos pour un liard la charge d’un grand mulet. Trad. de Folengo, Merlin Coccaie, L. XII (I, 322). — Puis le mot, devenant le nom typique d’un homme brutal, grossier, est un terme injurieux.

Pedant, lui aussi, venait d’Italie et désignait étymologiquement un homme qui instruit les enfants : Des Roys de Macedoine… il s’en fait des menuysiers et greffiers à Rome des tyrans de Sicile, des pelants à Corinthe. Montaigne, I, 18. — A l’idée que contenait ce mot s’ajoutait souvent celle de certains défauts remarqués chez des pédants sots et maladroits. Régnier nous montre que le mot n’était pas encore forcément péjoratif, puisque, dans son portrait du pédant ridicule, il appelle Aristote le pédant d’Alexandre : Un Pedant, animal domestique, De qui la mine rogue et le parler confus, Les cheveux gras et longs, et les sourcils touffus Faisoient par leur sçavoir, comme il faisoit entendre, La figue sur le nez au Pedant d’Alexandre. Sat. 10.

Garse avait simplement le sens de fille : Luy, venant icy, et sa femme, amenerent une petite gare qu’ils avoient prise pour leur fille. Jean de la Taille, le Negromant, I, 2. — C’est par euphémisme sans doute qu’on l’a employé au lieu d’un mot plus significatif, dont il est vite devenu l’équivalent exact.

Antiquaille, emprunté à l’italien, désignait une chose antique, sans aucune idée dédaigneuse : Je me souviens des belles antiquailles, Des beaux tableaux, et des belles medailtes. Magny, Odes, I, 146. — Ici, le suffixe a pu contribuer au changement de sens.

Repaire conservait, encore un sens correspondant à celui du verbe repairer, retourner chez soi. Le repaire était la demeure : Toute la terre est à nous ; Le ciel tant doux Est nostre eternel repaire. Marg. de Nav., les Marguerites, Chanson spirituelles.

Parcimonie était le nom d’une qualité. La parcimonie n’était ni l’avarice ni la mes-