Ne pensez-vous pas qu’on peut être si heureusement né, qu’on trouve un grand plaisir à faire le bien ?
Je le pense.
Qu’on peut avoir reçu une excellente éducation, qui fortifie le penchant naturel à la bienfaisance ?
Assurément.
Et que, dans un âge plus avancé, l’expérience nous ait convaincus, qu’à tout prendre, il vaut mieux, pour son bonheur dans ce monde, être un honnête homme qu’un coquin ?
Oui-da ; mais comment est-on honnête homme, lorsque de mauvais principes se joignent aux passions pour entraîner au mal ?
On est inconséquent : et y a-t-il rien de plus commun que d’être inconséquent !
Hélas ! malheureusement, non : on croit, et tous les jours on se conduit comme si on ne croyait pas.
Et sans croire, on se conduit à peu près comme si l’on croyait.
À la bonne heure ; mais quel inconvénient y aurait-il à avoir une raison de plus, la religion, pour faire le bien, et une raison de moins, l’incrédulité, pour mal faire ?
Aucun, si la religion était un motif de faire le bien, et l’incrédulité un motif de faire le mal.
Est-ce qu’il y a quelque doute là-dessus ? Est-ce que l’esprit de religion n’est pas de contrarier cette vilaine nature corrompue ; et celui de l’incrédulité, de l’abandonner à sa malice, en l’affranchissant de la crainte ?