Page:Diderot - Œuvres complètes, éd. Assézat, IX.djvu/26

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16 POÉSIES DIVERSES.

Et ses mains ourdiraient les entrailles du prêtre,
Au défaut d’un cordon pour étrangler les rois.

ÉPODE.

Tu pâlis, vil esclave ! Être pétri de boue,
Quel aveuglement te dévoue
Aux communs intérêts de deux tigres ligués ?
Sommes-nous faits pour être abrutis, subjugués ?
Quel moment ! qu’il est doux pour une muse altière !
L’homme libre, votre ennemi,
Vous a montré son âme fière ;
cruels artisans de la longue misère
Dont tous les siècles ont gémi,
Il vous voit, il se rit d’une vaine colère :
Il est content, si vous avez frémi.


STROPHE.

Assez et trop longtemps une race insensée
De ses forfaits sans nombre a noirci ma pensée.
Objets de haine et de mépris,
Tyrans, éloignez-vous. Approchez, jeux et ris ;
Que le vin couronne mon verre ;
Que la feuille du pampre ou celle du lierre
S’entrelace à mes cheveux gris.
Du plus agréable délire
Je sens échauffer mes esprits.
Vite, qu’on m’apporte une lyre.
Muse d’Anacréon, assis sur son trépied,
Le sceptre des rois sous le pied,
Je veux chanter un autre empire :

ANTISTROPHE.

C’est l’empire de la Beauté.
Tout sent, tout reconnaît sa souveraineté.
C’est elle qui commande à tout ce qui respire.
Dépouillant sa férocité,
Pour elle, au fond des bois, le Hottentot soupire.
Si le sort quelquefois me place à son côté,