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d’un beau site champêtre, il disait : Ô le beau site à décrire ! au lieu qu’il fallait se taire, sentir, se laisser pénétrer profondément, et prendre ensuite sa lyre[1].

On dit que ce premier chant est le plus faible des quatre ; je m’en réjouis. Ils sont tous les quatre suivis de notes où l’on remarque de la raison, du sens, de la philosophie, de la connaissance du beau dans les arts ; mais le ton en est triste et fatigant.


CHANT II.


L’ÉTÉ.


Ce chant commence par une apostrophe au soleil. Gens difficiles, vous en direz tout ce qu’il vous plaira ; mais cette apostrophe au grand astre dont la chaleur féconde anime l’univers, est une belle chose ; et celui qui méprise ces vingt premiers vers n’est pas digne d’en lire de plus beaux. Il ne s’agit pas de savoir s’il y en a de plus beaux en latin ; mais je demande qu’on m’en cite de plus beaux en français sur le même sujet.

Dans une cinquantaine d’années, lorsque quelque homme de goût tirera ce poëme de l’oubli dont il est menacé, et vers lequel il s’avance même assez rapidement, il citera aussi le morceau qui commence par ces vers[2] :


Loin des riants jardins et des plants cultivés,
J’irai sur l’Apennin. . . . . . . . . . . . . . . . . . . .


Et l’on sera tout étonné de ne l’avoir point aperçu[3].

Le poëte chante d’abord la terre, l’air et les eaux peuplés par la chaleur d’une multitude infinie d’êtres organisés et vivants. Il s’arrête sur le caractère d’opulence et de grandeur que l’été donne à la nature ; il tente l’éloge de l’agriculture : ces deux

  1. Ce passage, depuis : « Pourquoi… » n’est pas dans Grimm.
  2. Dans Grimm, à la place de cet alinéa, il n’y a que : « On peut encore lire le morceau qui commence… »
  3. Dans Grimm, il y a : « Avec tous les défauts de ce poëme, j’ose assurer qu’il restera, et qu’on le comptera parmi les ouvrages de la nation. » Ce à quoi Grimm répond : « Il est bien difficile qu’il fasse jamais cette fortune, et même qu’il se sauve de l’oubli dont il est menacé ; il manque de génie et de verve, il est monotone et triste, l’âme du poëte n’y est pas, et vous voulez que cela vive ! etc. »