Page:Diderot - Œuvres complètes, éd. Assézat, VI.djvu/159

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Sa mère et Mme de La Pommeraye, à qui elle rendait fidèlement les propos du directeur, lui suggéraient des confidences qui toutes tendaient à l’encourager.

Jacques.

Votre Mme de La Pommeraye est une méchante femme.

Le maître.

Jacques, c’est bientôt dit. Sa méchanceté, d’où lui vient-elle ? Du marquis des Arcis. Rends celui-ci tel qu’il avait juré et qu’il devait être, et trouve-moi quelque défaut dans Mme de La Pommeraye. Quand nous serons en route, tu l’accuseras, et je me chargerai de la défendre. Pour ce prêtre, vil et séducteur, je te l’abandonne.

Jacques.

C’est un si méchant homme, que je crois que de cette affaire-ci je n’irai plus à confesse. Et vous, notre hôtesse ?

L’hôtesse.

Pour moi je continuerai mes visites à mon vieux curé, qui n’est pas curieux, et qui n’entend que ce qu’on lui dit.

Jacques.

Si nous buvions à la santé de votre curé[1] ?

L’hôtesse.

Pour cette fois-ci je vous ferai raison ; car c’est un bon homme qui, les dimanches et jours de fêtes, laisse danser les filles et les garçons, et qui permet aux hommes et aux femmes de venir chez moi, pourvu qu’ils n’en sortent pas ivres. À mon curé !

Jacques.

À votre curé !

L’hôtesse.

Nos femmes ne doutaient pas qu’incessamment l’homme de Dieu ne hasardât de remettre une lettre à sa pénitente : ce qui fut fait ; mais avec quel ménagement ! Il ne savait de qui elle était ; il ne doutait point que ce ne fût de quelque âme bienfaisante et charitable qui avait découvert leur misère, et qui leur proposait des secours ; il en remettait assez souvent de pareilles. Au demeurant vous êtes sage, madame votre mère est prudente,

  1. Variante : « De votre vieux curé. »