Page:Diderot - Œuvres complètes, éd. Assézat, VI.djvu/226

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Jacques.

Ce que j’ignore, et ce qui faisait tant rire votre homme et celui de la Suzanne, qui ne riraient plus.

Marguerite.

Oh ! non, non. Je sais bien que tu es un bon garçon, et que tu ne le dirais à personne ; mais je n’oserais.

Jacques.

Et pourquoi ?

Marguerite.

C’est que je n’oserais.

Jacques.

Ah ! dame Marguerite, apprenez-moi, je vous prie, je vous en aurai la plus grande obligation, apprenez-moi… En la suppliant ainsi, je lui serrais les mains et elle me les serrait aussi ; je lui baisais les yeux, et elle me baisait la bouche. Cependant il faisait tout à fait nuit. Je lui dis donc : Je vois bien, dame Marguerite, que vous ne me voulez pas assez de bien pour m’apprendre ; j’en suis tout à fait chagrin. Allons, levons-nous, retournons-nous-en… Dame Marguerite se tut ; elle reprit une de mes mains, je ne sais où elle la conduisit, mais le fait est que je m’écriai : « Il n’y a rien ! il n’y a rien ! »

Le maître.

Scélérat ! double scélérat !

Jacques.

Le fait est qu’elle était fort déshabillée, et que je l’étais beaucoup aussi. Le fait est que j’avais toujours la main où il n’y avait rien chez elle, et qu’elle avait placé sa main où cela n’était pas tout à fait de même chez moi. Le fait est que je me trouvai sous elle et par conséquent elle sur moi. Le fait est que, ne la soulageant d’aucune fatigue, il fallait bien qu’elle la prît tout entière. Le fait est qu’elle se livrait à mon instruction de si bon cœur, qu’il vint un instant où je crus qu’elle en mourrait. Le fait est qu’aussi troublé qu’elle et ne sachant ce que je disais, je m’écriai : « Ah ! dame Suzanne, que vous me faites aise ! »

Le maître.

Tu veux dire dame Marguerite.

Jacques.

Non, non. Le fait est que je pris un nom pour un autre et qu’au lieu de dire dame Marguerite, je dis dame Suzon. Le fait