Page:Diderot - Œuvres complètes, éd. Assézat, VIII.djvu/200

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Mademoiselle Beaulieu.

Ou parce qu’elle a changé d’avis : c’est un bon cœur, mais une tête de girouette ; ou, ce qui me semble plus vraisemblable, parce qu’elle compte sur le secours d’un autre. Achèverai-je ma commission ?

Monsieur Hardouin.

Il n’y faut pas manquer.

Mademoiselle Beaulieu.

J’ai ordre d’ajouter qu’elle n’aura pas de peine à trouver un aussi mauvais poëte, et qu’elle en aura moins encore à trouver un homme plus officieux.

Monsieur Hardouin.

Mademoiselle, vous aurez la bonté de lui répondre de ma part que j’aurais le plus grand plaisir à me conformer à ses derniers ordres, mais qu’ils arrivent un peu tard ; qu’au reste, il est plus aisé de brûler une pièce que de la faire… (Mademoiselle Beaulieu sourit.) Vous souriez… Auriez-vous quelque chose de plus à me dire ?

Mademoiselle Beaulieu.

Oui.

Monsieur Hardouin.

Qu’est-ce ?

Mademoiselle Beaulieu.

C’est que si je fais des boucles, je fais aussi quelquefois des plaisanteries. Vrai, la pièce est faite ?

Monsieur Hardouin.

Non, elle se fait. Qu’est-ce que cet énorme bouquet ? Il est beau, très-beau, mais toutes ces roses ne vaudront jamais la touffe de lis ou le seul bouton qu’elles nous cachent.

Mademoiselle Beaulieu.

S’il nous faut des couplets, il nous faut aussi des bouquets et nous sommes allés mettre au pillage les parterres de M. Poultier. Comme il n’est jamais sûr de son temps, et que ses affaires pourraient l’arrêter à Versailles, le jour de la fête de madame de Malves, il est venu présenter un hommage d’avance.

Monsieur Hardouin.

Il est ici ?

Mademoiselle Beaulieu.

Je crois que je l’entends descendre.