Page:Diderot - Œuvres complètes, éd. Assézat, XIII.djvu/140

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On ne peut disconvenir que, depuis le renouvellement des lettres parmi nous, on ne doive en partie aux dictionnaires les lumières générales qui se sont répandues dans la société, et ce germe de science qui dispose insensiblement les esprits à des connaissances plus profondes. Combien donc n’importait-il pas d’avoir en ce genre un livre qu’on pût consulter sur toutes les matières, et qui servît autant à guider ceux qui se sentiraient le courage de travailler à l’instruction des autres, qu’à éclairer ceux qui ne s’instruisent que pour eux-mêmes !

C’est un avantage que nous nous sommes proposé ; mais ce n’est pas le seul. En réduisant sous la forme de dictionnaire tout ce qui concerne les sciences et les arts, il s’agissait encore de faire sentir les secours mutuels qu’ils se prêtent ; d’user de ces secours, pour en rendre les principes plus sûrs, et leurs conséquences plus claires ; d’indiquer les liaisons éloignées ou prochaines des êtres qui composent la Nature, et qui ont occupé les hommes ; de montrer, par l’entrelacement des racines et par celui des branches, l’impossibilité de bien connaître quelques parties de ce tout, sans remonter ou descendre à beaucoup d’autres ; de former un tableau général des efforts de l’esprit humain dans tous les genres et dans tous les siècles ; de présenter ces objets avec clarté ; de donner à chacun d’eux l’étendue convenable, et de vérifier, s’il était possible, notre épigraphe par notre succès :

Tantum series juncturaque pollet,
Tantum de medio sumptis accedit honoris !
Horat. de Arte. poet., v. 249.

Jusqu’ici personne n’avait conçu un ouvrage aussi grand, ou du moins personne ne l’avait exécuté. Leibnitz, de tous les savants le plus capable d’en sentir les difficultés, désirait qu’on les surmontât. Cependant on avait des Encyclopédies ; et Leibnitz ne l’ignorait pas lorsqu’il en demandait une.

La plupart de ces ouvrages parurent avant le siècle dernier, et ne furent pas tout à fait méprisés. On trouva que s’ils n’annonçaient pas beaucoup de génie, ils marquaient au moins du travail et des connaissances. Mais que serait-ce pour nous que ces Encyclopédies ? Quel progrès n’a-t-on pas fait depuis dans les sciences et dans les arts ? Combien de vérités décou-