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SUR


LA STATUE DE LOUIS XV


DE L’ÉCOLE MILITAIRE


PAR LE MOYNE


(INÉDIT)


1769




Le jour que le roi alla à l’École militaire poser la première pierre de la chapelle, Le Moyne fit élever au milieu de la cour le modèle en plâtre d’une statue du monarque qu’il doit exécuter en marbre pour le même endroit. Elle est debout sur un piédestal carré, de grandeur au-dessus de nature. Le monarque montre de la main droite aux élèves des bâtons de maréchaux, des croix et autres récompenses de la vertu militaire, posés sur un bout de colonne. Il est cuirassé jusqu’aux genoux ; il a l’épée au côté, la jambe gauche fléchie et par conséquent le poids du corps jeté sur la jambe droite, et la main gauche appuyée sur la hanche de ce côté.

On voit la douceur et la bonté paternelle sur son visage. La ressemblance y est, à l’exception de la noblesse qui n’y est pas. Je l’ai trouvé un peu lourd et voûté ; mais le défaut principal, c’est un contre-sens impardonnable dans la position. Où le sculpteur a-t-il pris qu’un homme dont le corps porte sur la jambe droite, place la main sur la hanche gauche ? Cela est contre la sympathie des mouvements naturels. La main va se placer sur la hanche même du côté de la jambe non fléchie ; elle y est d’appui. C’est une contre-force sans laquelle le moindre choc renverserait l’homme qui a pris cette attitude[1] .

On lit sur une des faces du piédestal une inscription simple et belle ; elle est tirée de la seconde ode d’Horace sur la fin, où

  1. Voyez cette même observation dans les Pensées détachées sur la peinture, t. XI, p. 95.