Page:Diderot - Œuvres complètes, éd. Assézat, XVIII.djvu/250

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les pincer quand ils ont pincé leur camarade ; c’est la meilleure façon de leur apprendre que cela fait mal ; n’est-il pas vrai, mademoiselle Collot ?

Si cette petite dispute n’est pas encore sous presse, vous me feriez une chose agréable, et peut-être utile à tous les deux, en m’en envoyant une copie, que je relirais avec plus de scrupule encore et d’attention pour votre compte que pour le mien. Je l’exigerais même de votre amitié, à condition pourtant que cela ne lui coûtât guère. Du reste, l’honneur de l’édition vous serait toujours réservé, et la première ne s’en ferait pas moins à Pétersbourg. Voyez si vous êtes d’humeur à me donner cette petite satisfaction. Ramassez tout ce qui viendra à votre connaissance de l’administration de Sa Majesté Impériale. C’est à elle à faire de grandes choses, c’est à nous à les célébrer. Heureux si nous savons faire notre devoir de panégyriste comme elle le sien de souveraine ! Mais comme on n’élève les statues des grands hommes que sur les grands places, je répugnerais à placer notre Catherine dans une niche. Si jamais je parle d’elle, je veux que ce soit à la tête d’un ouvrage digne d’elle. Et puis, dans ce moment, ne craindriez-vous pas un peu qu’on n’entendît dans ma bouche que la voix de la reconnaissance, et que cette espèce de prévention, surfaite encore par la malignité, n’ôtât quelque valeur à la vérité de l’éloge ? Laissons d’abord dire l’univers, et puis nous dirons après lui. Quoi qu’il en soit, recueillez toujours, et soyez sûr que vos mémoires serviront.

Encore une fois, mon ami, si, je vous reverrai ! Si, j’irai me prosterner aux pieds de ma grande bienfaitrice ! Si, elle verra couler de mes yeux les larmes du sentiment et de la reconnaissance ! J’en fais entre vos mains le serment solennel. Vous voudriez que ce fût au commencement du printemps de soixante-huit, à son retour de Moscou. Je le voudrais bien aussi ; mais je vous ferai vous-même juge du possible, en vous exposant ma position actuelle avec toute la franchise que vous me connaissez. Vous croyez que je vais entamer ici cet article, et vous redoublez d’attention. Patience, mon ami, patience… Comment dirai-je tout cela ? Il faut pourtant que je le dise.

Je ne suis point étonné du récit de la liberté de vos séances au Palais. On disait à Henri IV tout ce qu’on voulait. La