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dessus, mais sans aller cette fois-ci jusqu’au bout de la ligne, parce que les barres qui sont actuellement aux extrémités, & qui étoient auparavant dans le milieu, ont déjà plus de vertu qu’elles n’en pourroient recevoir aux extrémités de la ligne où elles sont à présent, & même elles en perdroient une partie si on les repassoit encore ; & c’est justement parce que les barres qui sont aux extrémités ne reçoivent pas autant de vertu que celles qui sont au milieu, que l’on conseille de les remettre au milieu pour les repasser.

Après qu’on aura exécuté toutes ces opérations, il sera bon de retourner toutes les barres sens dessus-dessous, & de les retoucher de l’autre côté, excepté celles des extrémités qu’on ne retouchera point, par les raisons qu’on vient de dire, mais qu’on ramenera dans le milieu pour les retoucher après les autres. Ayant ainsi communiqué un peu de magnétisme aux six barres d’acier, on disposera les six autres sur une table, de la même maniere que les précédentes. On peut voir dans la figure 72 la disposition de trois de ces barres A B, & les marques du poinçon & du ciseau qui sont sur leurs extrémités qui sont à main droite, & où doit être leur pole austral. C D & E F représentent les six autres barres déjà aimantées, comme nous venons de le dire, dont il y en a trois dans l’assemblage C D, & trois en E F ; elles se touchent toutes par le haut : mais elles sont éloignées par le bas de la dixieme partie d’un pouce ou un peu plus, quoique d’abord, quand elles n’ont qu’une foible vertu, on puisse les approcher un peu plus près pourvû qu’elles ne se touchent point, ce qu’elles ne doivent jamais faire.

Pour les empêcher de se toucher, on pourra mettre entre-deux un petit morceau de bois ou de toute autre matiere, pourvû que ce ne soit pas du fer.

Les trois aimans C D (car on peut déjà les nommer ainsi, quoique leur vertu soit encore très-foible) ont tous trois leur pole austral en-bas & du côté des extrémités des barres qui ne sont pas marquées, c’est-à-dire celles qui doivent devenir pole boréal ; & les trois aimans E F ont leur pole boréal en-bas tourné vers les extrémités des barres qui sont marquées. Quand on les aura ainsi disposés tous six, on les coulera trois ou quatre fois d’un bout à l’autre de la ligne en allant & revenant ; ensuite on ramenera les barres des extrémités dans le milieu pour les repasser comme nous avons dit ci-dessus, & on les retournera toutes pour faire la même chose sur l’autre plat.

Si les six premieres barres C D, E F, ont été aimantées par un aimant assez vigoureux, ces six dernieres seront déjà aimantées plus fortement que les premieres ; c’est pourquoi on remettra les six premieres dans une ligne droite sur une table comme auparavant, & on les repassera de même avec les dernieres, jusqu’à ce qu’elles soient devenues encore plus fortes ; alors on s’en servira pour aimanter de la même maniere la seconde demi-douzaine, & on répétera cette opération jusqu’à ce que ces barres ne paroissent plus acquérir de vertu par ces touches réitérées.

Chacune de ces six barres, lorsqu’elle a été bien trempée & aimantée de la maniere que nous venons d’exposer, pourra lever par un de ses poles un morceau de fer d’une livre ou plus (pourvû qu’il soit d’une forme convenable) ; & six de ces barres une fois bien aimantées & employées de la maniere que nous venons d’enseigner, aimantent tout-à-fait six barres nouvelles en les passant seulement trois ou quatre fois d’un bout à l’autre, excepté celles des extrémités qu’il faut toûjours repasser après les avoir ramenées dans le milieu.

Dans toutes ces opérations on est souvent obligé

de désunir ou de rassembler les barreaux de fer qui composent les deux paquets C D, E F, aussi-bien que les six qui forment la ligne A B. Or comme deux aimans qui ont les poles de même nom du même côté, s’affoiblissent toûjours réciproquement lorsqu’ils se touchent, il est absolument nécessaire (& on doit y prendre garde bien soigneusement dans toutes les occasions) de n’en jamais placer deux à la fois du même côté C D ou E F : mais on les mettra un à un de chaque côté, en les faisant toucher dans toute leur longueur, ou bien en mettant leurs extrémités inférieures sur la ligne des barres qu’on veut aimanter, tandis qu’ils se touchent par les extrémités supérieures ; & on observera la même chose en les retirant, c’est-à-dire un à un de chaque côté. Il sera plus court de les assembler tous six en un faisceau en les prenant un à un à la fois de chaque côté, & les transportant sur la ligne des barres ; on les partagera en deux faisceaux, comme nous avons enseigné : mais on prendra bien garde de les séparer par le bas avant qu’ils soient sur la barre ; car dès le moment ils s’affoibliroient. Au reste, s’ils venoient à s’affoiblir par cet accident, on pourroit les aimanter en les repassant avec les six autres, de la maniere que nous avons enseigné.

Il faut user des mêmes précautions pour conserver ces barreaux aimantés. C’est pourquoi on aura une boîte convenable dans laquelle on fera ajuster deux pieces de fer d’environ un pouce de longueur (qui est à peu près l’épaisseur de six barres d’acier) perpendiculairement l’une vis-à-vis de l’autre, & à la distance de six pouces de dehors en dehors ; ces pieces de fer seront d’environ un quart de pouce quarré & bien polies sur les côtés ; on placera à côté d’elles, & tout joignant, les douze barres d’acier, six d’un côté & six de l’autre ; les six d’un côté avec leur pole du nord vers un bout de la boîte, & les six de l’autre avec leur pole du sud vers ce même bout. Il faut bien prendre garde de ne les jamais mettre ni retirer toutes à la fois d’un côté ou de l’autre, car on les désaimanteroit : mais on en mettra à la fois une de chaque côté, de maniere que leur effort se contre-balance continuellement ; c’est une observation qu’on doit toûjours faire, de n’en laisser jamais deux ou plusieurs ensemble avec leur pole de même nom du même côté, sans quoi elles ne manqueroient pas de perdre leur vertu.

La vertu magnétique que l’on communique à un morceau de fer ou d’acier, y réside tant que ces corps ne sont pas exposés à aucune action violente qui puisse la dissiper : il y a néanmoins des circonstances assez légeres qui peuvent détruire en très-peu de tems le magnétisme du fer le mieux aimanté. Nous allons rapporter ici les principales.

Premierement, lorsqu’on a aimanté un morceau de fer sur un aimant vigoureux, si on vient à le passer sur le pole semblable d’un aimant plus foible, il perd beaucoup de sa vertu, & n’en conserve qu’autant que lui en auroit pû donner l’aimant foible sur lequel on l’a passé en dernier lieu. 2° Lorsqu’on passe une lame de fer ou d’acier sur le même pole de l’aimant sur lequel on l’a déjà aimantée, mais dans une direction contraire à la premiere, la vertu magnétique de la lame se dissipe aussi tôt, & ne se rétablira qu’en continuant de passer la lame sur le même pole dans le dernier sens : mais les poles seront changés à chaque extrémité, & on aura bien de la peine à lui communiquer autant de vertu magnétique qu’elle en avoit d’abord.

3°. Il est essentiel de bien toucher les poles de l’aimant avec le morceau de fer qu’on veut aimanter, & de ne pas se contenter de l’en approcher à une petite distance, non-seulement parce que c’est le meilleur moyen de lui communiquer beaucoup de ver-