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pareil & un bandage convenable. Il prévint les accidens par les saignées & le régime, & la conduite qu’il tint eut tout le succès possible.

Cette pratique ne seroit point à imiter si la dure-mere étoit contuse : il faudroit dans ce cas achever d’ôter la piece, & panser ce trépan accidentel, comme celui qu’on fait dans un lieu de nécessité ou d’élection pour les accidens qui requierent cette opération, afin de faire suppurer la contusion de cette membrane. Voyez Trépan. (Y)

APOSIOPESE, s. f. (Belles-Lett.) figure de Rhétorique, autrement appellée réticence ou suppression : elle se fait lorsque venant tout d’un coup à changer de passion, ou à la quitter entierement, on rompt brusquement le fil du discours qu’on devroit poursuivre, pour en entamer un différent. Elle a lieu dans les mouvemens de colere, d’indignation, dans les menaces, comme dans celle-ci, que Neptune fait aux vents déchaînés contre les vaisseaux d’Enée.

Quos ego . . . sed motos prœstat componere fluctus.

Ce mot vient du Grec ἀποσιωπαω, je me tais. V. RÉticence. (G)

APOSTASIE, ἀποστασία, révolte, abandon du parti qu’on suivoit pour en prendre un autre.

Ce mot est formé du Grec ἀπὸ, ab, contra, & de ἵστημι, être debout, se tenir ferme, c’est-à-dire, résister au parti qu’on avoit suivi, embrasser une opinion contraire à celle qu’on avoit tenue ; d’où les Latins ont formé apostatare, mépriser ou violer quelque chose que ce soit. C’est en ce sens qu’on lit dans les Lois d’Edouard le Confesseur : Qui leges apostatabit terræ suæ, reus sit apud regem ; Que quiconque viole les lois du royaume est criminel de lese-majesté.

Apostasie se dit plus particulierement de l’abandon qu’une personne fait de la vraie religion pour en embrasser une fausse. Telle fut l’action de l’empereur Julien, quand il quitta le Christianisme pour professer l’idolatrie.

Parmi les Catholiques, apostasie s’entend encore de la désertion d’un ordre religieux dans lequel on avoit fait profession, & qu’on quitte sans une dispense légitime. V. Ordre & Dispense.

Les anciens distinguoient trois sortes d’apostasie : la premiere, à supererogatione, qui se commet par un Prêtre ou un Religieux qui quitte son état de sa propre autorité pour retourner à celui des laïcs, & elle est nommée de surérogation, parce qu’elle ajoûte un nouveau degré de crime à l’une ou l’autre des deux especes dont nous allons parler, & sans l’une ou l’autre desquelles elle n’arrive jamais : la seconde, à mandatis Dei, c’est celle que commet quiconque viole la loi de Dieu, quoiqu’il persiste en sa croyance : la troisieme, à fide ; c’est la défection totale de celui qui abandonne la foi. V. Renégat.

Cette derniere est sujette à la vindicte des lois civiles. En France un Catholique qui abandonne sa religion pour embrasser la religion prétendue réformée, peut être puni par l’amende honorable, le bannissement perpétuel hors du royaume, & la confiscation de ses biens, en vertu de plusieurs édits & déclarations publiées sous le regne de Louis-le-Grand. (GH)

APOSTAT, apostata, homme qui abandonne ou renie la vraie foi, la vraie religion. (G)

APOSTÈME, s. m. terme de Chirurgie, tumeur contre nature, faite de matiere humorale.

Nous remarquerons dans les apostèmes leurs différences, leurs causes, leurs signes, leurs tems, & leurs terminaisons.

Les différences des apostèmes sont essentielles ou accidentelles : celles-là viennent de l’espece de fluide qui produit la tumeur ; celles-ci viennent du de-

sordre ou dérangement que ces mêmes humeurs peuvent

produire.

Les apostèmes étant formés par les liqueurs renfermées dans le corps humain, il y a autant de différentes especes d’apostèmes qu’il y a de ces différentes liqueurs : ces liqueurs sont le chyle, le sang, & celles qui émanent du sang.

1°. Le chyle forme des apostèmes, soit en s’engorgeant dans les glandes du mésentere, dans les vaisseaux lactés, ou dans le canal thorachique ; soit en s’épanchant dans le ventre ou dans la poitrine.

2°. Le sang produit des apostèmes, par sa partie rouge ou par sa partie blanche. Il y a plusieurs especes d’apostèmes formés par la partie rouge du sang : Les uns se font par infiltration, comme le thrumbus, l’échymose, les taches scorbutiques. V. Infiltration. D’autres par épanchement proprement dit, comme l’empyème de sang. V. Empyème. Quelquefois le sang est épanché, & en outre infiltré dans le tissu graisseux ; tel est le cas de l’anevrysme faux. V. Anevrysme. Toutes ces différentes especes d’apostèmes sanguins sont produites par extravasation : il y en a de plus qui sont causés par le sang contenu dans ses vaisseaux, soit par leur dilatation contre nature, comme les anevrysmes vrais, les varices, les hémorrhoïdes ; d’autres sont produits en conséquence de la constriction des vaisseaux, ce qui produit l’inflammation, laquelle est phlogose, érésipele, ou phlegmon. Voyez ces mots à leur ordre.

La partie blanche du sang cause des apostèmes, en s’arrêtant dans ses vaisseaux, ou en s’extravasant. On range sous la premiere classe les skirrhes, les glandes gonflées & dures ; les rhûmatismes, la goutte ; l’œdème & l’hydropisie sont de la seconde : celui-là se fait par infiltration ; celui-ci par épanchement.

3°. Les liqueurs émanées du sang peuvent être des causes d’apostème : le suc nourricier, lorsqu’il est vicié ou en trop grande abondance, produit, en s’arrêtant ou en s’épanchant dans quelques parties, les callosités, les calus difformes, les excroissances de chair appellées sarcomes, les poireaux, les verrues, les condylomes, les sarcoceles. Voyez tous ces mots.

La graisse déposée en trop grande quantité dans quelque partie, forme la loupe graisseuse. Voyez Lipome.

La semence retenue par quelque cause que ce soit dans les canaux qu’elle parcourt, forme des tumeurs qu’on appelle spermatocele, si la liqueur est arrêtée dans l’épidydime ; & tumeur séminale, si la liqueur s’amasse en trop grande quantité dans les vésicules séminales.

La synovie, lorsqu’elle n’est point repompée par les pores resorbans des ligamens articulaires, produit l’ankylose, le gonflement des jointures, & l’hydropisie des articles.

La bile cause une tumeur en s’arrétant dans les pores biliaires, ou dans la vésicule du fiel, ou dans le canal cholidoque ; ce qui peut être occasionné par une pierre biliaire, ou par l’épaississement de la bile.

L’humeur des amygdales retenue dans ces glandes, cause leur gonflement. La salive retenue dans les glandes, produit les tumeurs nommées parotides ; & retenue dans les canaux excréteurs des glandes maxillaires, ou sublinguales, elle produit la grenouillette.

Le mucus du nez produit le polype par l’engorgement des glandes de la membrane pituitaire.

Les larmes, par leur mauvaise qualité, ou par leur séjour dans le sac lacrymal, ou dans le conduit