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malgré toutes les recherches des Littérateurs & des Antiquaires, il reste encore bien des choses à entendre sur les masques ; peut-être que cela ne seroit point, si nous n’avions pas perdu les livres que Denis d’Halicarnasse, Rufus, & plusieurs autres écrivains de l’antiquité, avoient écrit sur les théâtres, & sur les représentations : ils nous auroient du-moins instruits de beaucoup de choses que nous ignorons, s’ils ne nous avoient pas tout appris.

Le P. Labbe dérive le mot de masque de masca, qui, dit-il, signifie proprement une sorciere dans les lois lombardes l. I. tit. XI. § 9. strix quæ dicitur masca. « En Dauphiné, en Savoie, & en Piémont, continue-t-il, on appelle encore les sorcieres de ce nom, & d’autant qu’elles se déguisent, nous avons appellé masques les faux visages ; & de-là les mascarades ». (D. J.)

Masques, s. m. (Hydr.) Voyez Degueulleux.

Masque, terme de Chirurgie, nom qu’on donne à un bandage qui sert principalement pour les brûlures du visage. Il est ainsi nommé par rapport à sa figure ; c’est un morceau de linge auquel on fait quatre ouvertures qui répondent à celles des yeux, du nez, & de la bouche. Voyez la fig. 6. Pl. XXVII. Cette piece de linge est fendue à six chefs, qui se croisent postérieurement & s’attachent au bonnet. (Y)

Masque, terme d’Architecture, est une tête d’homme ou de femme, sculptée & placée à la clé d’une arcade, dont les attributs & le caractere répondent à l’usage de l’édifice. Quoique cette sorte d’ornement soit assez d’usage dans les bâtimens, je pense que l’on devroit préférer les clés ou consoles : quelque bien sculpté que soient ces masques, ils ne présentent jamais qu’un objet imparfait, en n’offrant qu’une partie du corps humain : cette mutilation ne me semble tolérable qu’à une maison de chasse, à un chenil, à une boucherie, & où ils font un attribut de l’extérieur du bâtiment à l’usage de l’intérieur, soit par des abattis de bêtes fauves ou domestiques.

Quelque plaisir que l’on puisse avoir de considérer une belle tête dans un claveau, le pié & la main me semblent des parties presque aussi belles, & cependant il paroîtroit ridicule de les placer ou de les admettre dans une décoration, affectant de les faire passer à-travers la muraille, telle qu’une main armée qui montre au public la salle d’un maître d’escrime : de plus le claveau d’une arcade doit tenir les voussoirs de part & d’autre en équilibre, & sa solidité ne peut procurer à l’esprit l’illusion d’une espace libre pour contenir la tête d’une statue, ce qui annonce plûtôt un déreglement d’imagination que de l’ordre, du génie, & de l’invention.

La plûpart des Architectes apportent pour raison que ce ne sont que des masques moulés sur la nature qu’on affecte de mettre sur les claveaux des arcades, & non la représentation réelle, mais il n’en est pas moins vrai que cette fiction est vicieuse & ces effigies desagréables, soit que l’on y place des têtes d’une forme élégante ou hideuse ; car plus elles seront d’un beau choix, plus elles paroîtront soumettre l’humanité à la servitude & au supplice ; enfin, plus on affectera d’y placer des masques chimériques, tels qu’il s’en voit dans un grand nombre de bâtimens de réputation, & plus, ce me semble, on tombe dans le défaut d’allier les contraires, puisque cette espece de sculpture qui n’annonce que de l’extravagance s’unit mal avec la pureté, l’élégance, & la beauté des proportions de l’architecture qu’on y remarque avec admiration.

Masque, (Arquebus.) on appelle ainsi un des poinçons ou ciselets dont les Arquebusiers, Armuriers, Eperonniers, Fourbisseurs, & autres sembla-

bles ouvriers ciseleurs se servent pour leurs ciselures.

Ces poinçons sont gravés en creux, & représentent diverses têtes d’hommes, de femmes, d’anges, de lions, de léopards, de chiens, &c. suivant la fantaisie du graveur. Ils sont courts & d’un morceau bien aciéré, afin de mieux supporter le coup de marteau qu’on donne dessus, quand on veut en imprimer le relief sur le métal qu’on a entrepris de ciseler.

Après que le masque est frappé, on le recherche & on le répare avec divers autres ciselets tranchans ou pointus comme sont les gouges, les frisons, les poinçons, les filieres, &c.

Masques, (Peinture.) ce sont des visages ou faces humaines sans corps, dont les Peintres & les Sculpteurs font usage pour orner leurs ouvrages. On appelle mascarons les gros masques de sculpture. Les masques ont ordinairement l’air hideux ou grotesque.

MASQUE, en terme de Blason, se dit d’un lion qui a un masque.

MASQUER, v. act. (Jardinage.) On dit masquer une basse-cour, un bâtiment, une montagne, ou quelque aspect désagréable, quand on plante au-devant un rideau de charmille ou un bois.

MASSA, (Géog. anc.) Il y a beaucoup de petits lieux dans les anciens auteurs, nommés massa, avec un surnom qui les distingue les uns des autres. Mais il faut remarquer que ces petits lieux ne désignoient ordinairement qu’un village, un hameau, où le seigneur d’un lieu logeoit les esclaves destinés à l’agriculture. On en trouvera les exemples dans Ortelius, qui les a rassemblés, & dans Ducange. On a dit avec le tems dans le même sens, masa, mazada, masagium, masum, masio ; & c’est de ce dernier mot estropié que nos ancêtres ont fait le mot de maison. (D. J.)

Massa-Caréra, (Géog.) ville d’Italie, capitale du petit pays de même nom en Toscane, dans la Lunégiane, avec titre de principauté, que possédent les princes de la maison de Cibo. Massa est renommée par ses carrieres de marbre. Elle est située dans une belle plaine à une lieue de la mer, 4 S. E. de Sarzane, 10 N. O. de Pise, 22 N. O. de Florence. Long. 27. 45. lat. 44. 1. (D. J.)

MASSACRE, s. m. (Gramm.) c’est l’action de tuer impitoyablement ceux sur lesquels on a quelque avantage qui les a mis sans défense. Il ne se dit guere que d’une troupe d’hommes à une autre. Le massacre de la saint Barthélemi, l’opprobre éternel de ceux qui le conseillerent, de ceux qui le permirent, de ceux qui l’exécuterent, & de l’homme infâme qui a osé depuis en faire l’apologie. Le massacre des Innocens. Le massacre des habitans d’une ville.

Massacre riviere du, (Géog.) ou riviere de Monte-Christo ; riviere dans la partie de l’île de Saint-Domingue qui est aux François : les Espagnols veulent que cette riviere sépare leurs terres de celles des François du côté de cette montagne. On l’appelle riviere du massacre, parce que les deux peuples en sont souvent venus aux mains sur son rivage. (D. J.)

Massacre, s. m. en Vénerie & en Blason, se dit d’une tête de cerf, de bœuf, ou de quelqu’autre animal, quand elle est décharnée.

MASSADA, (Géog. sacrée.) forteresse de la Palestine, dans la tribu de Juda, à l’occident de la mer Morte ou du lac Asphaltite, sur un rocher escarpé, & où l’on ne pouvoit que très-difficilement monter. Hérode le grand fortifia cette place, & la rendit presque imprenable.

Après la derniere guerre des Juifs contre les Romains, Eléazar, chef des Sicaires, s’empara de Massada. Flavius Sylva que l’empereur Titus avoit