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Ainsi périt dans une terre étrangere Minos II, qui auroit tenu une place honorable dans l’histoire, sans la haine qu’Athènes avoit conçue contre lui ; tant il est dangereux, dit Plutarque, d’offenser une ville savante qui a, dans les ressources de son esprit, des moyens de se vanger. La mémoire de Minos étoit odieuse aux Athéniens, à cause du tribut également cruel & humiliant qu’il leur avoit imposé. Les autres grecs embrasserent leur cause, pour travestir l’histoire de Minos, & la crayonner des couleurs les plus noires.

Les poëtes ensuite, qui ne prenoient aucun intérêt à Minos, ne manquerent pas d’employer la fable inventée & accréditée par les Athéniens, comme une matiere qui pouvoit leur fournir de belles peintures, & même de grands sentimens ; témoins ces vers de Virgile.

Hic crudelis amor tauri, suppostaque furto
Pasiphae, mistumque genus, prolesque biformis
Minotaurus inest, veneris monimenta nefandæ.

Æneid. lib. VI.

Et ces autres où il parle d’Icare :

Tu quoque magnam
Partem opere in tanto, sineret dolor, Icare, haberes,
Bis conatus erat casus effingere in auro,
Bis patriæ cecidere manus.

Je supprime à regret, les ingénieuses descriptions d’Ovide ; car quoi qu’en disent quelques modernes, la fable, la fiction, & tout ce qui est du ressort de l’imagination, sera toûjours l’ame de la Poésie. Le prétendu esprit philosophique, dont on s’applaudit tant aujourd’hui, a beau rejetter ces ornemens, ils seront toûjours précieux aux grands poëtes ; & ceux qui veulent qu’en vers la raison parle toûjours à la raison, montrent par-là même qu’ils n’ont ni la connoissance, ni le talent de la vraie poésie.

Les innocens mensonges dont Homere, Virgile, le Tasse & l’Arioste, ont rempli leurs poëmes, plaisent à tous ceux qui ont quelque goût ; & ne trompent personne, parce qu’on doit les regarder comme des peintures ingénieuses, des allégories, ou des emblèmes, qui cachent quelquefois un fait historique ; quelquefois aussi :

Le doux charme de maint songe,
Par leur bel art inventé,
Sous les habits du mensonge
Nous offre la vérité.

(D. J.)

MINSINGEN, (Géog.) ou MUNSINGEN ; petite ville d’Allemagne, dans les états du duc de Wurtemberg sur l’Elbe, entre Neutlingen & Blaubeuren. Long. 27. 26, lat. 48. 21. (D. J.)

MINSKI, (Géog.) ville forte de Pologne, dans la Lithuanie ; capitale d’un palatinat de même nom. Le tribunal supérieur de la Lithuanie s’y tient de 3 en 3 ans. Elle est située vers la source de la riviere de Swislocks. Long. 45. 32, lat. 35. 57. (D. J.)

MINTURNE, (Géog.) Minturnæ ; ancienne ville d’Italie dans le Latium, sur le fleuve Liris, un peu au-dessus de son embouchure, à 80 stades de Formies. Elle devoit sa naissance à une colonie romaine.

C’est à Minturne que Marius fut conduit, après avoir été pris dans les marais de Marica, qu’on nomme Maricæ paludes, ou Minturnensium paludes ; le magistrat de Minturne, croyant ne pouvoir se dispenser d’obéir aux ordres précis du sénat, envoya sur le champ à Marius, un esclave public, Cimbre de nation, pour le faire mourir.

Marius voyant entrer cet esclave dans la prison, & jugeant de son dessein par une épée nue qu’il avoit à la main, lui cria d’une voix forte : « Barbare, as-tu bien la hardiesse d’assassiner Caius Marius ? » L’esclave épouvanté du nom seul d’un homme si redoutable aux Cimbres, jette son épée, & sort de la

prison tout ému, en criant : « Il m’est impossible de tuer Marius ».

Les magistrats de Minturne regarderent la peur & le trouble de cet esclave, comme un avis du ciel, qui veilloit à la conservation de ce grand homme ; & touchés d’un sentiment de religion, ils lui rendirent la liberté. On sait la suite de ses aventures, les nouveaux périls qu’il essuya sur les côtes de Sicile, sa jonction avec Cinna, son entrée dans Rome, & les flots de sang qu’il répandit.

Enfin maître du monde, mais repassant dans son esprit ses anciennes disgraces, sa fuite, son exil, & tous les dangers qu’il avoit couru, il en perdit le sommeil. Ce fut pour se le procurer, & pour se débarrasser de ces idées funestes, qu’il se jetta dans la débauche de la table. Il cherchoit à noyer ses inquiétudes dans le vin ; & il ne trouvoit de repos, que quand il n’avoit plus de raison. Ce nouveau genre de vie, & les excès qu’il fit, lui causerent une pleurésie dont il mourut, accablé d’années, & le corps épuisé de fatigues & de tourmens, le 17e jour de son 7e consulat. (D. J.)

MINUIT, s. m. (Gramm.) le milieu de la nuit ; l’heure à laquelle le soleil, descendu sous notre horison, se retrouve dans le plan du même méridien.

MINURI, (Géog.) petite ville d’Italie au royaume de Naples, dans la principauté citérieure, avec un évêché suffragant d’Amalfi, dont elle est à deux lieues N. E. Long. 32. 9. lat. 40. 37.

MINUSCULE, adj. terme d’Imprimerie, qui se dit d’une sorte de lettres que l’on nomme plus ordinairement petites capitales. Voyez Capitales, Petites capitales, Majuscules.

MINUTE, s. f. (Géograph. & Astron.) c’est là soixantieme partie d’un degré. Voyez Degré. Ce mot vient du latin minutus, petit.

On appelle aussi les minutes, minutes premieres ; mais le mot de minutes tout court est plus usité.

Les divisions des degrés sont des fractions dont les dénominateurs croissent en raison sexagecuple, c’est-à-dire qu’une minute = de degré, une seconde . Voyez Seconde.

Dans les tables astronomiques, &c. les minutes sont marquées par un accent aigu en cette sorte ′, les secondes par deux ″, les tierces par trois ‴. Voyez Seconde & Tierce.

Minute dans le calcul du tems marque la soixantieme partie d’une heure. Comme le mot de minute est employé par les Astronomes dans deux sens, savoir comme partie de degré & comme partie de tems, on appelle quelquefois les premieres minutes de degré, & les autres minutes de tems. La terre dans son mouvement diurne fait 15 minutes de degré en une minute de tems, 15 secondes de degré en une seconde de tems, &c. Voyez Heure. Chambers. (O)

Minute méridionale, voyez Méridionale.

Minute de mersion, voyez Mersion.

Minute, en Architecture, marque ordinairement la soixantieme, la trentieme, la dix-huitieme & la douzieme partie d’un module.

Le module est le demi-diametre du bas de la colonne, & sert à mesurer toutes les parties d’un ordre. Voyez Module.

Minute, (Medec.) minuta ; épithete d’une fievre extrèmement violente accompagnée de syncope qui abat si fort les forces du malade, qu’il ne sauroit y résister plus de quatre jours. Castelli.

Minute, (Jurisprud.) est l’original d’un acte ; comme la minute des lettres de chancellerie, la minute des jugemens & procès-verbaux, & celle des actes qui se passent chez les notaires.

Les minutes des actes doivent être signées des officiers dont ils sont émanés, & des parties qui y stipulent, & des témoins s’il y en a.