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tannée, ce qui les pourriroit ; d’ailleurs les arbres seront tout aussi bien de cette façon que s’ils avoient d’abord été plantés dans les caisses. Mais il ne faudra pas oublier de les faire rester pendant 15 jours ou 3 semaines dans l’orangerie avant de les mettre en plein air.

La taille des orangers n’est nullement difficile. Elle consiste à conserver les branches vigoureuses ; à retrancher les rejettons qui se chiffonnent, se croisent & se nuisent ; à supprimer tout le petit bois gresle & trop mince pour donner des fleurs & produire de bon fruit. Comme cet arbre est susceptible de différentes formes, & que sa verdure en fait le principal agrément, ou du moins le plus constant, on doit s’attacher à ce que sa tête soit uniformément garnie au moyen d’une taille assidue & bien ménagée ; sans cependant y employer le ciseau du jardinier, qui en laissant une grande partie des feuilles coupées à-demi, montre une décharnure désagréable : la précision de la forme ne dédommage pas de cet inconvénient ; d’ailleurs les feuilles qui ont été atteintes du ciseau se fannent & font un mauvais effet. Il vaut beaucoup mieux laisser pointer légérement toutes les branches, plus elles approcheront de l’ordre naturel, plus l’aspect en sera agréable.

S’il arrive que la grêle, le vent, la maladie, ou tel autre accident, viennent à endommager & défigurer un oranger, on rabattra l’arbre en coupant toutes ses branches jusqu’à l’endroit où il paroîtra de la vigueur & de la disposition à former un nouveau branchage, capable de donner une forme qui puisse se perfectionner. Dès qu’on s’apperçoit qu’un oranger est malade, ce qui s’annonce par la couleur jaune de ses feuilles, il faut chercher promptement à y remédier, soit en le mettant à l’ombre s’il a souffert de la trop grande chaleur, ou bien en visitant ses racines où se trouve ordinairement l’origine du mal : dans ce cas, on doit en retrancher les parties viciées & renouveller la terre. Mais les punaises sont le plus grand fléau de cet arbre ; elles attaquent ses feuilles sur-tout en hiver. Dès qu’on s’en apperçoit, il faut y remédier en enlevant & en écrasant ces insectes avec les doigts, ou en frottant les branches avec une brosse & les feuilles avec un linge, après avoir trempé l’un & l’autre, soit dans du vinaigre, soit dans de l’eau empreinte d’amertume ou de sel.

L’agrément ne fait pas le seul mérite des orangers, on en retire aussi de l’utilité, ses fleurs servent à quantité d’usages ; on en compose des eaux, des liqueurs, des confitures, &c. tout le monde connoît l’excellente qualité de ses fruits ; ceux du plus grand nombre d’especes d’orangers sont bons à manger. On tire aussi parti des oranges aigres. Voyez Orange.

Le bois de l’oranger, quoique de bonne qualité, est de bien peu de ressource même dans les pays très-chauds, où ces arbres deviennent très gros, parce que le tronc se trouve toujours pourri dans le cœur.

Il y a une infinité de variétés de cet arbre ; on se contentera de rapporter ici celles que l’on cultive ordinairement.

1. L’orange aigre ou la bigarade.

2. Le même à feuilles panachées.

3. L’orange douce ou de Portugal.

4. L’oranger à feuilles coquillées ou le bouquetier ; ainsi nommé à cause de la quantité de fleurs qu’il donne.

5. Le même oranger à fleurs panachées.

6. L’orange cornue.

7. L’oranger hermaphrodite, dont le fruit participe de l’orange & du citron.

8. L’oranger de Turquie, dont la feuille étroite approche de celle du saule.

9. Le même à feuilles panachées.

10. Le pampelmousse : ce fruit est de la grosseur d’une tête humaine.

11. L’oranger femelle : ainsi nommé à cause de sa fécondité.

12. L’oranger tortu, a mérité ce nom à cause de sa difformité.

13. La grosse orange, dont la peau a des inégalités.

14. L’orange étoilée ; ainsi nommée à cause des 5 sillons dont elle est marquée à la tête, & qui représentent une étoile.

15. L’orange à écorce douce.

16. L’oranger à fleur double.

17. L’oranger de la Chine.

18. Le petit oranger de la Chine.

19. L’oranger nain, à fruit aigre : il est différent de celui de la Chine.

20. Le même dont les fruits & les feuilles sont panachés.

Ces orangers nains sont d’un agrément infini ; leurs feuilles sont très petites, & garnissent bien les branches : ils donnent une quantité de fleurs qui couvrent l’arbre, & forment naturellement au bout de chaque branche, un bouquet d’une odeur délicieuse. Mais il faut des soins & des précautions pour entretenir ces arbres en vigueur : les serrer plutôt, les sortir plus tard, & les tenir plus chaudement que les orangers ordinaires. Il en est de même du pampelmousse, de l’oranger de la Chine & de ceux à feuilles panachées. M. d’Aubenton le subdélégué.

Oranger, (Chimie, Pharmacie, Diete & Mat. méd.) Il y a deux especes d’oranger dont les hommes tirent des remedes & des alimens : savoir l’oranger à fruit doux, & l’oranger à fruit aigre.

Les feuilles, les fleurs & les fruits de l’un & de l’autre, sont les parties de ces arbres qui sont en usage.

Les feuilles, les fleurs & l’écorce des fruits sont chargées d’une huile essentielle abondante qui est très-pénétrante & très-aromatique ; cette huile est contenue dans des cellules assez considérables pour paroître distinctement à la simple vûe, celles de l’écorce du fruit sont même si amples & si pleines, qu’il n’y a qu’à la plier, la froisser ou la racler avec un corps raboteux, pour en faire couler cette huile abondamment. C’est ce principe qui donne cette flamme vive & claire qui traverse rapidement celle d’une bougie lorsqu’on presse entre les doigts un zest d’orange auprès de cette flamme : c’est ce même principe qui pique si vivement la langue & le palais, & qui met la bouche en feu lorsqu’on mâche l’écorce jaune d’une orange fraîche ; c’est encore cette huile qui irrite si douloureusement les yeux lorsqu’on en approche de très-près une orange que l’on pele.

Nous avons exposé à l’article Huile le procédé par lequel les Italiens ramassoient celle-ci aussi inaltérée qu’il est possible.

L’huile des fleurs d’orange, que les Italiens appellent neroli, n’en peut être séparée que par la distillation à l’eau, qui est le second procédé que nous avons décrit à l’article Eaux distillées, voyez cet article ; car la distillation des fleurs d’orange par le bain-marie que l’on emploie communément pour en retirer un autre produit beaucoup plus usuel, savoir l’eau essentielle dont nous allons parler dans un instant, ne fournit point d’huile essentielle. Voyez Huile essentielle au mot Huile, & ce qui est dit du bain-marie à l’article Feu, Chimie.

Cet autre principe dont nous avons à parler, savoir le principe aromatique qui s’éleve avec le principe aqueux surabondant ou libre (Voyez Eau distillée) dans la distillation des fleurs d’orange au bain marie, constitue la liqueur très-connue sous le nom d’eau de fleurs d’orange. Voyez à l’article Eau distillée, la maniere de la préparer, & son essence