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les parties intérieures de l’oreille humaine, & j’en trouve la raison, 1°. dans la difficulté de découvrir les diverses parties de cet organe, qui sont la plûpart cachées dans des os très-durs ; 2°. parce que cette administration anatomique est fort embarrassée, & demande d’être variée pour appercevoir tantôt une partie, tantôt l’autre : 3°. parce que ces parties sont très-délicates & très-petites. Mais comme les anatomistes modernes ont eu plus de succès, récapitulons par ordre de date leurs travaux & leurs découvertes.

Vésale donna les vraies figures de deux des osselets internes de l’oreille.

Eustachi a depuis fait connoître le premier la trompe dont il est l’inventeur, l’étrier, le muscle nommé muscle d’Eustachi, la corde du tympan, la portion molle, &c. Voyez son ouvrage de auditûs organis, Romæ 1562, in-8°.

Ingrassias (Jean-Philippe) mort en 1580, âgé de 70 ans, assure qu’il a de son côté découvert à Naples en 1546, l’étrier, troisieme osselet de l’oreille, & qu’il l’a nommé tantôt scapha, & tantôt l’os deltoïde.

Fallope (Gabriel) a rendu de nouveaux services à l’anatomie de cette partie. Il a décrit dans ses observations, l’étrier, l’aqueduc, les deux fenêtres, les canaux demi-circulaires & le limaçon. Il est mort à Padoue en 1563, âgé de 39 ans.

Albertus (Salomon) a le premier décrit la coquille de l’oreille dans son livre intitulé, historia plerarumque humani corporis partium, Witteb. 1583, in-8°.

Fabricius d’Aquapendens a ajouté peu de choses à ses prédécesseurs. Il en a oublié plusieurs qui appartenoient à la gloire de Fallope, & a fait graver d’assez mauvaises figures.

Casserius a pris beaucoup de ses devanciers ; il paroît cependant avoir représenté le premier les muscles obliques & externes du marteau, & d’avoir tâché de s’instruire par l’anatomie comparée. Son histoire anatomique de auris auditus organo a été imprimée pour la premiere fois à Ferrare en 1600, fol. reg. L’auteur est mort en 1605, âgé de 60 ans, & pendant que son maître Aquapendens vivoit encore.

Folius (Cœcilius) passe pour avoir découvert l’apophyse du marteau ; & l’on doit convenir qu’il n’a pas mal décrit les parties du labyrinthe de l’oreille. Son livre intitulé aurium internarum delineatio, a paru Venet. 1645, in-4o.

M. Perault (Claude) a non-seulement traité physiquement la matiere du son, mais il a décrit encore avec exactitude la fabrique de l’organe de l’ouïe. On ne lui a point rendu toute la justice qu’il méritoit ; cependant il n’a rien avancé dans la description de cet organe, qu’après l’avoir vu distinctement. Ses figures sont belles, & faites sur ses propres desseins. Je ne loue pas ses explications, parce qu’elles sont fondées sur des fausses hypotheses. Il a précédé Méry & Duverney dont nous allons parler.

La description de l’oreille de l’homme par Méry vit le jour à Paris en 1681, in 12, avec fig. mais elle ne renferme rien de nouveau.

Il n’en est pas de même du traité de Duverney (Joseph-Guichard). Cet habile homme a le premier fait connoître parfaitement le muscle de l’étrier, les glandes cérumineuses, le limaçon, la portion molle, les canaux demi-circulaires, & plusieurs autres choses qu’il a mises dans tout leur jour. Son ouvrage a été imprimé à Paris en 1683, in-12. C’est la bonne édition ; & les figures qui sont d’une grande beauté, ont fait desirer la publication de tout ce qu’il avoit composé sur les autres sens.

Shellammer (Christophorus) a lu avec fruit les auteurs qui l’ont précédé, & a joint dans son ouvrage

la Physique à l’Anatomie ; mais il a fait dans ce dernier genre quelques fautes grossieres, entr’autres sur la corde du tambour & les canaux demi-circulaires. Son livre intitulé de auditu liber unus, a été publié à Leyde en 1684, in-8°.

Valsalva, né à Imola en 1666, a fait aussi des merveilles sur cette partie. Il a trouvé les petits muscles de l’oreille, a rétabli la structure & les muscles de la trompe, & y en a ajouté un troisieme nommé le palato-salpingée ; il a pris plus exactement la dimension des canaux demi-circulaires, & a considérablement augmenté la physiologie de l’oreille. Il a relevé quelques fautes de Duverney, & en a fait aussi lui-même ; tant la structure de cet organe est délicate & cachée ! La premiere & la belle édition du traité de Valsalva parut Bonon. 1704, in-4°. avec fig.

Vieussens (Raymond) a mis au jour son traité de la structure du cœur & de l’oreille à Toulouse en 1714, in-4°. avec fig. Ce livre est devenu rare ; cependant l’auteur, dans son traité de l’oreille, n’est guere que le copiste de Duverney ; ses descriptions mêmes sont embrouillées, & de plus ses figures sont obscures & mal gravées.

M. Winslow ne doit pas craindre un tel reproche ; car on trouve dans sa description de l’oreille l’ordre, la netteté, la précision & l’exactitude qui brillent par-tout dans son anatomie.

Cassebhom (Joan. Frid) est le dernier écrivain qui ait fait un traité exprès sur l’oreille de l’homme. Il est imprimé en latin, Francof. 1734, in-4°. avec fig. c’est un bon recueil, mais qui renferme peu de choses au-delà des découvertes de Duverney & de Valsalva.

A tous ces auteurs, on joindra les observations de Morgagni, de Manfredi, de Santorini & autres, répandues dans les mémoires de l’académ. des Sciences, & dans les Transactions philosophiques. Enfin les curieux savent que Ruysch, Albinus, Nicholls ont fait de leur côté de belles préparations & injections de diverses parties de l’oreille.

Quelques anatomistes, comme M. Hunauld, ont essayé de faciliter la connoissance de l’organe de l’ouïe en taillant des coupes d’os de grandeur double, triple ou quatruple de toutes les parties de l’oreille. M. Martiani, médecin sicilien, eut l’honneur de présenter en 1743 à l’académie des Sciences de semblables coupes artistement sculptées en bois de tilleul, au nombre de sept, qu’on peut voir au cabinet du roi, & dont M. Daubanton a donné l’explication & les figures dans le troisieme tome de l’explication de ce cabinet.

En un mot, les modernes n’ont rien oublié pour nous procurer des connoissances de l’organe de l’ouïe, mais s’ils sont parvenus à exciter notre admiration sur son artifice, ils n’ont pas été assez heureux pour le dévoiler un peu complettement, & selon toute apparence on n’y parviendra jamais. (Le Chevalier de Jaucourt.)

Oreille, les maladies chirurgicales de l’oreille ne sont pas en grand nombre, elles méritent cependant une attention particuliere : si elles étoient plus nombreuses, il s’éleveroit sûrement une espece de chirurgiens pour les traiter exclusivement, comme les maladies des yeux. Le conduit de l’oreille peut être bouché par vice de conformation par une membrane. Si cette cloison est profondément située dans le conduit auditif, il faut de la prudence pour y porter l’instrument tranchant. Si elle est superficielle, on la fend sans grand inconvénient. Il faut faire l’incision cruciale, & mettre dans le conduit une tente de charpie pour écarter les lambeaux de la membrane, jusqu’à ce que la consolidation des plaies soit faite.

Il arrive quelquefois à la suite des abscès de l’oreille, des excroissances charnues qu’il faut détruire.