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naissans, en latin ovili seu gemmæ populi nigræ. Ces yeux sont enduits & pénétrés d’un sac balsamique d’une odeur fort agréable. Tournefort recommande contre les diarrhées invétérées & les ulceres internes, l’usage intérieur d’une teinture tirée des yeux de peuplier. Plusieurs auteurs en recommandent encore l’usage extérieur ; par exemple, leur application en forme de cataplasme sur les hémorrhoïdes, &c. mais l’un & l’autre de ces usages est absolument négligé, & les bourgeons de peuplier ne sont absolument employés que dans la préparation de l’onguent populeum, auquel ils donnent leur nom, & dont voici la description d’après la pharmacopée de Paris.

Onguent populeum. Prenez des bourgeons de peuplier une livre & demie : broyez-les dans trois livres de sain doux, & gardez ce mélange dans un vaisseau de terre vernissé à orifice étroit & bien bouché dans un lieu temperé, jusqu’à ce que vous puissiez vous procurer dans le courant de l’été les matieres suivantes : savoir feuilles de pavot noir, de mandragore, ou à son défaut, de belle de nuit, de jusquiame, de grande & petite joubarbe, de laitue, de glouteron, de violette, de nombril de Vénus, ou à son défaut d’orpin, de jeunes pousses de ronces, de chacun trois onces ; de morelle des boutiques, six onces ; pilez toutes ces matieres ; mêlez-les exactement avec votre sain-doux chargé de bourgeons de peuplier, mises à feu doux, en agitant de tems-en-tems dans un vaisseau couvert ; passez, exprimez à la presse, & vous aurez votre onguent.

Cet onguent est d’un usage très-commun contre les tumeurs inflammatoires extérieures, & principalement contre les hémorrhoïdes très-douloureuses, dont il est regardé comme le calmant spécifique.

L’onguent populeum entre dans la composition de plusieurs médicamens officinaux externes ; par exemple, dans le baume hypnotique, l’onguent contre la gale, l’onguent hémorrhoïdal, & l’onguent épispastique de la pharmacopée de Paris. (b)

PEUR, FRAYEUR, TERREUR, (Synon.) ces trois expressions marquent par gradation les divers états de l’ame plus ou moins troublée par la crainte. L’appréhension vive de quelque danger cause la peur ; si cette appréhension est plus frappante, elle produit la frayeur ; si elle abat notre esprit, c’est la terreur.

La peur est souvent un foible de la machine pour le soin de sa conservation, dans l’idée qu’il y a du péril. La frayeur est une épouvante plus grande & plus frappante. La terreur est une passion accablante de l’ame, causée par la présence, ou par l’idée très forte de l’effroi.

Quelques exemples tirés de l’histoire romaine, vont justifier la distinction qu’on vient de donner de ces trois mots.

Pyrrhus eut moins de peur des forces de la république, que d’admiration pour ses procédés ; au contraire dans la suite des siecles, Attila faisoit un trafic continuel de la frayeur des Romains ; mais Julien par sa sagesse, sa constance, son économie, sa valeur, & une suite perpétuelle d’actions héroïques, rechassa les Barbares des frontieres de son empire ; & la terreur que son nom leur inspiroit, les contint tant qu’il vécut.

Auguste armé, craignoit les révoltes des soldats ; & quand il fut en paix, il redoutoit également les conjurations des citoyens. Dans la peur qu’il eut toujours devant les yeux d’éprouver le sort de son prédécesseur, il ne songea qu’à s’éloigner de sa conduite. Voilà la clé de toute la vie d’Octave.

On lit qu’après la perte de la bataille de Cannes, la frayeur fut extrème dans Rome ; mais il n’en est pas de la consternation d’un peuple libre & belliqueux, qui se trouve toujours des ressources de courage, comme de celle d’un peuple esclave qui ne sent que sa foiblesse.

Le célebre sénatus-consulte que l’on voit encore gravé sur le chemin de Rimini à Cezene, par lequel on dévouoit aux dieux infernaux quiconque avec une cohorte seulement, passeroit le rubicon, prouve combien le sénat appréhendoit les desseins de César. Aussi ne peut-on exprimer la terreur qu’il répandit lorsqu’il passa ce ruisseau. Pompée lui-même éperdu ne sut que fuir, abandonner l’Italie, & gagner promptement la mer. (D. J.)

Peur & Paleur, (Mytholog. Médailles, Littér.) divinités payennes qui avoient des autels chez les Grecs & les Romains, afin qu’elles préservassent de l’opprobre & de l’infamie. Thésée leur sacrifia dans cette vûe ; Alexandre en fit de même ; & par les mêmes principes, la Peur avoit une chapelle à Sparte ; passons à Rome.

La ville d’Albe ayant été soumise aux Romains par un traité fait après la victoire des Horaces, la paix ne dura pas long-tems ; elle fut rompue par la trahison du dictateur Metius Suffetius, & par la révolte des Albains qui attirerent dans leur parti les Fidénates & les Véïens. Le roi Tullus ayant pris la résolution de les combattre, il s’apperçut au milieu du combat, qu’à la sollicitation du dictateur, les Albains qui s’étoient d’abord déclarés pour les Romains, tournerent leurs armes contre eux. Tullus, pour prévenir l’épouvante qui pouvoit se répandre dans son armée, voua dans le moment, dit l’historien, douze Saliens & des temples à la Peur & à la Pâleur. Ce vœu eut son effet, Tullus fut vainqueur, &c.

Il y a deux médailles de la famille Hostilia, rapportées dans les familles romaines de Fulvius Ursinus, de Patin, & de Vaillant, lesquelles représentent la Peur & la Pâleur. La premiere offre une tête avec des cheveux hérissés, un visage étonné, une bouche ouverte, & un regard qui marque l’épouvante dans une occasion périlleuse. La seconde offre une face maigre, alongée, les cheveux abattus, & le regard fixe ; c’est la pâleur, laquelle est l’effet ordinaire de la peur : le sang & la couleur se retirent au-dedans de nous, lorsque nous l’éprouvons ; le visage devient pâle, la sueur froide, le tremblement, l’immobilité, succedent, &c. Aussi Lucrece applique ingénieusement à la peur les mêmes effets que Sapho attribue à un violent amour.

Verum ubi vehementi magis est commota metu mens,
Consentire animam totam per membra videmus
Sudores itaque & pallorem existere toto
Corpore, & infringi linguam, vocemque aboriri ;
Calligare oculos, sonere aureis, succidere artus :
Denique concidere ex animi terrore videmus
Sæpè homines.


(D. J.)

PEUREUX, adj. cheval peureux, voyez Ombrageux.

PEWTER, (Métallurgie.) nom que les Anglois donnent à un alliage dont l’étain fait la base, & dans lequel sur un quintal d’étain, on joint quinze livres de plomb, & six livres de cuivre jaune ; on en fait des vaisseaux & les ustensiles de ménage.

On fait aussi une autre composition ou alliage d’étain, dans lequel on fait entrer du régule d’antimoine, du bismuth & du cuivre, dans des proportions différentes.

On prétend que Jacques II. roi d’Angleterre, étant en Irlande, fit faire de la monnoie de pewter ou d’étain ; on y lisoit la légende melioris tessera fati.

PEYER, glandes de, (Anatomie.) Peyer de Schafouse s’est attaché à la recherche des glandes intestinales répandues dans les intestins grêles ; ces glandes portent son nom. Il a outre cela fait différentes découvertes, & nous a laissé différens traités.