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cette plate-forme sert pour diviser les roues. (D. J.)

Plate-forme des Juifs, (Critique sacrée.) la vulgate a fort bien rendu ce mot par celui des Latins, solarium. C’étoit une espece de terrasse construite au-haut des maisons des Hébreux, exposée au soleil, & même tout-autour d’un mur à hauteur d’appui, pour empêcher qu’on ne tombât de-là dans la rue. Moïse qui n’oublia rien de la police des villes, l’avoit ainsi ordonné dans le Deutéronome, chap. xxviij. 8. On couchoit ordinairement sur ces terrasses, comme nous le voyons par l’exemple de Saül, I. Rois, ix. 25. Il y avoit au milieu de cette plate-forme, une ouverture qui répondoit à la salle qui étoit au-dessous ; & c’est par cette ouverture qu’on avoit oublié de fermer d’une balustrade, que le roi Ochosias tomba dans la salle à manger, IV. Rois, j. 2. On pouvoit descendre de ces plates-formes par des escaliers qui étoient en-dehors de la maison ; c’est ce qu’on voit dans l’évangile où il est dit, que ceux qui portoient le paralytique, ne pouvant le faire entrer par la porte à cause de la foule, le porterent sur la plate-forme, par l’ouverture de laquelle ils le descendirent dans la salle où étoit J. C. & notre Seigneur ayant vû leur foi, dit au paralytique : « mon fils, vos péchés vous sont pardonnés ». Marc, ij. 4. Quant aux plates-formes des Romains, nous en avons parlé dans la description de leurs bâtimens. (D. J.)

PLATE-LONGE, s. f. (Manege.) longe de fil large de trois doigts, fort épaisse, longue de trois ou quatre toises, dont on se sert pour abattre un cheval, ou pour lever ses jambes dans un travail, afin de faciliter plusieurs opérations du maréchal.

Plate-longe, (Chasse.) bande de cuir longue, qu’on met au cou des chiens qui sont trop vîtes, afin de les arrêter : ces bandes s’appellent aussi bricoles.

Plates, touches plates, (Peinture.) se dit d’une façon de toucher la couleur en l’applatissant avec le pinceau ; ce qui forme une petite épaisseur presque insensible à chacun de ses côtés ; mais qui néanmoins donne un grand relief aux objets, lorsque ces touches partent d’une main savante. Rien ne caractérise tant l’homme certain de ses coups, que cette façon de faire, qui n’est cependant que pour les petits tableaux.

PLATERON, voyez Bordeliere.

PLATEUR, s. f. (Minéralogie.) c’est ainsi qu’on nomme dans les mines de charbon de terre, la partie où la couche de ce minéral, après s’être enfoncée, soit perpendiculairement, soit obliquement, commence à marcher horisontalement, & ensuite à remonter horisontalement vers la surface de la terre. Suivant M. de Tilly, les plateurs se trouvent ordinairement à trois ou quatre cens piés de profondeur ; quelques couches ne les ont qu’à sept cens piés ; celles qui sont le plus perpendiculaires, ont leur plateur à une très-grande profondeur. C’est dans cet état que les mines de charbon sont plus avantageuses & plus faciles à exploiter. Voyez mémoire sur l’exploitation du charbon minéral, par M. de Tilly. (—)

PLATILLE, s. f. (Toilerie.) on appelle platilles, certaines especes de toiles de lin très-blanches, qui se fabriquent en plusieurs endroits de France, particulierement dans l’Anjou, & en Picardie.

Les platilles se vendent en petites pieces de cinq aunes de long, sur trois quarts & demi de large, mesure de Paris ; les unes plus grosses, les autres plus fines. Ce sont les Espagnols à qui elles sont toutes envoyées, qui leur ont donné le nom de platilles. Elles sont pareillement propres au commerce qui se fait en quelques endroits des côtes d’Afrique, au-delà de la riviere de Gambie.

Il se tire de Silésie, particulierement de Breslaw, capitale de cette province d’Allemagne, quantité de toiles auxquelles l’on donne pareillement le nom de

platilles. Ces sortes de toiles qui sont à-peu-près semblables à celles d’Anjou & de Picardie, sont aussi destinées pour les mêmes pays, c’est-à-dire pour l’Espagne, l’Amérique, & l’Afrique ; & elles y sont portées par les Hambourgeois. Savary. (D. J.)

PLATINE, ou OR BLANC, s. f. (Hist. nat. Minéralogie & Métallurgie.) en espagnol platina, platina di pinto, ou juan blanco. Ce nom a été donné à une substance métallique blanche comme de l’argent ; autant & même plus pesante que l’or, très-fixe au feu ; qui ne souffre aucune altération ni à l’air, ni à l’eau ; assez peu ductile, & qui seule est absolument infusible au degré de feu le plus violent, mais qui s’allie par la fusion avec tous les métaux.

Le mot espagnol plata, signifie argent ; celui de platina, signifie petit argent ; il paroît que ce nom a été donné à la substance dont nous parlons à cause de sa couleur blanche. Quelques-uns cependant l’ont appellé or blanc, parce que la platine a plusieurs propriétés communes avec le plus précieux des métaux : c’est ce que nous aurons occasion de faire voir dans le cours de cet article.

Il n’y a que peu d’années que l’on connoît cette substance ; elle se trouve dans l’Amérique espagnole. Le premier auteur qui en ait parlé, est dom Antonio d’Ulloa ; dans son voyage du Pérou, imprimé à Madrid en 1748, il dit, que dans la province de Quito, au bailliage de Choco, il se trouve des mines d’or, que l’on a été obligé d’abandonner à cause de la platine dont le minerai est entremêlé. Il ajoute : « la platine est une pierre (piedra) si dure, qu’on ne peut la briser sur l’enclume, ni la calciner, ni par conséquent en séparer le minerai qu’elle renferme, sans un travail infini & sans beaucoup de dépenses ». Il est aisé de voir que c’est très-improprement que l’auteur appelle cette substance une pierre.

Dès l’an 1741, M. Charles Wood, métallurgiste anglois, avoit déjà apporté en Angleterre quelques échantillons de cette substance ; il les avoit reçus dans la Jamaïque ; on lui avoit dit qu’ils étoient venus de Carthagène ; sans lui déterminer précisément l’endroit d’où la platine avoit été tirée, on lui apprit seulement qu’il y en avoit des quantités considérables dans l’Amérique espagnole. On dit qu’il s’en trouve beaucoup, sur-tout près des mines de Santafé, & dans celles de Popayan. Quoi qu’il en soit, on assure que le roi d’Espagne a fait fermer ces mines, & a fait jetter à la mer une très-grande quantité de platines, pour prévenir les abus que ses sujets en faisoient. En effet, des personnes de mauvaise foi mêloient cette substance dans les lingots d’or, qu’ils adultéroient sans changer leur poids. Ce sont ces mesures si nécessaires, qui ont rendu la platine assez rare parmi nous. Quelques hollandois ayant été trompés de cette maniere, ne tarderent point à se venger cruellement des auteurs de cette supercherie ; étant revenus une seconde fois au même endroit, ils pendirent sans autre forme de procès aux mâts de leurs vaisseaux, les Espagnols qui leur avoient vendu de l’or falsifié avec de la platine. La fraude fut découverte, parce que les premiers lingots d’or s’étoient trouvés cassans comme du verre. Cette tromperie est d’autant plus dangereuse, que l’or allié avec la platine, ne souffre aucun changement dans son poids, & ne peut en être séparé par aucun des moyens connus dans la Chimie. Cependant on donnera à la fin de cet article les manieres de séparer l’or d’avec la platine.

Les Espagnols d’Amérique ont trouvé le secret de fondre la platine pour en faire des gardes d’épées, des boucles, des tabatieres, & d’autres bijoux semblables, qui sont très-communs chez eux, & qui s’y vendent à un prix très-inférieur à celui de l’argent.