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tube, afin que le point d’où les rayons commencent à être divergens après leur réfraction dans le verre objectif puisse être au foyer de l’oculaire. Alors si l’on approche l’œil du verre oculaire, on verra un seul objet répété autant de fois qu’il y a de concavités dans le verre objectif, mais il sera fort diminué. Wolf & Chambers. (T)

POLYPE, POULPE, polypus, s. m. (Hist. nat.) insecte aquatique, du genre des vers zoophytes. Il y a plusieurs especes de polypes ; les uns sont dans l’eau salée, & les autre, dans l’eau douce. Les plus grands polypes de mer ressemblent au calmar & à la seche, par la bouche, les yeux, & les visceres, & par le nombre des cornes, que l’on peut regarder comme des bras ou comme des jambes, car l’animal s’en sert comme de mains & de piés ; ces bras different de ceux de la seche & du calmar, en ce qu’ils sont tous d’égale longueur, & qu’ils ont deux rangs de suçoirs. Les polypes n’ont point de nageoires ; ils different aussi des autres animaux mous, en ce que leur ventre est plus petit & que leurs bras sont plus longs. Ils ont dans une vessie située au-dessous de l’estomac une liqueur rougeâtre, comme la seche a une liqueur noire. On trouve de ces polypes dans la haute mer, & d’autres sur les côtes. Ils sortent de l’eau ; leurs bras renaissent lorsqu’ils ont été mutilés ; ces animaux vivent de coquillages & de feuilles de figuier & d’olivier ; leur chair est dure & indigeste.

Les polypes de la seconde espece ont moins de volume que ceux de la premiere ; ils sont mouchetés, & ils ne valent rien à manger.

Ceux de la troisieme espece ont le corps plus court & plus arrondi que les autres, & les bras plus longs ; il n’y a qu’un rang de suçoirs sur chaque bras : ces polypes ont une odeur de musc.

On a donné le nom de polype à l’animal du coquillage appellé nautile. Voyez Nautile. Rondelet, Hist. des poissons, liv. XVII.

Les polypes d’eau douce ont été connus dans le commencement du siecle présent ; il en a été fait mention dans les Transactions philosophiques pour l’année 1703, par Leeuwenhoek, & par un auteur anglois anonyme, qui avoient des notions de la maniere naturelle dont les polypes se multiplient ; mais ce n’a été qu’en 1740 que M. Trembley, de la société royale de Londres, a découvert cette reproduction merveilleuse qui se fait dans toutes les parties d’un polype après qu’on les a séparées. M. Trembley a décrit trois especes de polypes qui sont doués de cette propriété, & qu’il appelle polypes d’eau douce, à bras en forme de cornes.

Les polypes de la plus petite de ces trois especes sont d’un assez beau verd ; lorsqu’on les voit attachés à la tige d’une plante aquatique & immobile, ils ressemblent à une plante parasite, à des brins d’herbes, ou à l’aigrette de la semence de dent de lion ; mais lorsqu’ils retirent leurs bras & qu’ils les font disparoître, lorsqu’ils se contractent subitement & si fort que le corps ne paroît être qu’un grain de matiere verte, lorsqu’ensuite les bras reparoissent & s’étendent, & que le corps reprend sa premiere forme, enfin lorsqu’on les voit marcher, on ne peut plus douter qu’ils ne soient des animaux. Leur corps est assez délié ; de l’une de ses extrémités sortent des cornes qui servent de piés & de bras & qui sont encore plus déliés que le corps : on peut donner à cette extrémité le nom de tête, parce que la bouche s’y trouve. Le corps & même les bras des polypes s’accourcissent & deviennent plus gros en se contractant ; ils se réduisent quelquefois à une ou deux lignes de longueur. Ils s’alongent & deviennent plus minces en se dilatant. Le corps de la plupart des polypes verds a cinq ou six lignes de longueur lorsqu’il est étendu. La longueur du corps des polypes de la se-

conde & de la troisieme espece, est long au moins

de huit lignes & au plus d’un pouce & demi ; la couleur de ces polypes est teinte de rouge & de brun. Le nombre des bras varie dans les polypes de ces trois especes, depuis six jusqu’à douze ou treize, & même dix-huit ; ceux des polypes verds n’ont que trois lignes de longueur ; les bras des polypes de la seconde espece sont ordinairement longs d’un pouce, & s’étendent jusqu’à deux & même trois pouces ; les bras ont jusqu’à huit pouces & demi de longueur dans les polypes de la troisieme espece ; aussi M. Trembley les a-t-il appellés polypes à longs bras.

Tous les insectes se contractent lorsqu’on les tire de l’eau ; la chaleur les anime, le froid les engourdit, mais il en faut un degré approchant de celui de la congellation pour les réduire à une parfaite inaction ; alors ils restent plus ou moins contractés dans l’état où ils étoient lorsque le froid les a saisis.

Les polypes renflent leur corps & le courbent à leur gré ; ils fléchissent aussi leurs bras en tout sens ; ils marchent comme les chenilles appellées arpenteuses, & divers autres insectes aquatiques. Lorsqu’un polype suspendu dans l’eau par la partie postérieure de son corps à la tige d’une plante veut changer de place, il courbe son corps en arc de cercle, & il applique la partie antérieure, ou seulement un bras, ou tous les bras contre la même tige ; il approche la partie postérieure de l’antérieure ; ensuite il éloigne l’antérieure de la postérieure, & par ce moyen il fait un pas. En répétant cette manœuvre les polypes se transportent d’un lieu à un autre, mais fort lentement ; ils ne parcourent qu’une longueur de sept à huit pouces en une journée d’été, & lorsqu’il fait moins chaud ils sont encore plus lents. Ces insectes ont différentes façons de marcher ; ils font quelquefois des culbutes au-lieu de faire des pas : lorsqu’ils sont fixés par les deux extrémités de leurs corps étant courbés en arc, ils relevent l’une des extrémités en s’étendant en ligne droite, & la font retomber de l’autre côté en se recourbant en sens contraire. Il peuvent marcher sous la surface de l’eau, en s’y attachant comme à un corps solide ; pour cet effet ils font passer une des extrémités de leur corps ou de leurs bras au-dessus de l’eau & l’y laissent secher ; étant seche elle s’y soutient, & l’insecte y trouve un point d’appui de la même façon qu’une épingle que l’on couche doucement sur l’eau y reste : le polype marche en faisant sortir & rentrer successivement les extrémités de son corps à différens points de la surface de l’eau.

Le corps des polypes est un tuyau creux d’un bout à l’autre ; l’orifice qui se trouve à l’extrémité antérieure du corps est la bouche, comme il a déjà été dit ; il y a aussi un orifice à l’extrémité postérieure mais il ne s’ouvre que rarement ; il ne fait pas les fonctions d’un anus, car les polypes rendent leurs excrémens par la bouche. Les bras sont creux, & leurs cavités communiquent avec celles du corps. Les polypes se nourrissent de petits insectes ; ils les arrêtent & ils les saisissent avec leurs bras, qui ont la propriété de se coller & d’adhérer aux différens corps qu’ils rencontrent, & de s’en séparer au gré de l’animal. Lorsqu’un polype a saisi un insecte avec ses bras, il les contracte & les raccourcit pour l’attirer vers sa bouche ; dès qu’elle touche à la poitrine, elle se dilate ; les levres s’étendent pour envelopper ce qui se présente & l’attirent dans le corps du polype par une sorte de suction. M. Trembley a nourri des polypes en leur donnant des mille-piés assez déliés, longs de sept à huit lignes, qui ont une trompe ou dard charnu au-devant de la tête ; de petits pucerons branchus, qui ont été ainsi nommés parce qu’ils ont deux bras ramifiés qui s’élevent au-dessus de leur tête, & qui leur servent de nageoire ; de petits vers & d’au-