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On appelle encore porte de fer une porte dont les chassis & les barreaux sont recouverts de plaques de tole, & qui sert aux lieux qui renferment des choses précieuses, & où l’on craint le feu. C’est ainsi que sont les portes des trésors & des archives.

Porte double, porte opposée à une autre dans une même baie, soit pour la sureté ou le secret du lieu, soit pour y conserver la chaleur.

Porte en décharge, porte composée d’un bâti de grosses membrures, dont les unes sont de niveau, & les autres inclinées en décharge, toutes assemblées par entailles de leur demi-épaisseur, & chevillées ; ensorte qu’elles forment une grille recouverte par-dehors de gros ais en rainures & languettes, cloués dessus avec ornemens de bronze ou de fer fondu. Telles sont les portes de l’église de Notre-Dame de Paris.

Porte feinte, c’est une décoration de porte de pierre ou de marbre, ou un placard de menuiserie avec des venteaux dormans, opposé ou parallele à une vraie porte pour la symmétrie.

Porte traversée, porte qui étant sans emboîtures est faite d’ais debout croisés quarrément par d’autres ais retenus par des clous dispersés en compartimens losangés. Les portes traversées les plus propres, ont près du cadre une moulure rapportée pour former une feuillure sur l’arrête de la baie qu’elles ferment. Dans les lieux où le chêne est rare, ces portes se font de bois tendres, tels que le sapin, l’aube, le tilleul, &c.

Porte vîtrée, porte qui est partagée en tout ou à moitié, avec des croisillons de petit bois, dont les vuides sont remplis de carreaux de verre ou de glaces. Dict. d’Archit. (D. J.)

Porte, s. m. (Stéreotom.) c’est une baie qui prend le nom, 1°. du mur dans lequel elle est percée comme porte en tour ronde, si elle est convexe ; porte en tour creuse, si elle est concave ; 2°. de l’endroit où elle est placée dans un angle rentrant, c’est une porte dans l’angle ; dans un saillant, c’est une porte sur le coin ; 3°. de la direction, comme porte droite, qui est perpendiculaire à sa direction ; biaise, si elle lui est oblique ; ébrasée si les piés droits s’ouvrent en-dehors, comme aux églises gothiques de Notre-Dame de Paris, de Reims, &c. (D. J.)

Porte, (Litt.) en latin janua, parce que Janus présidoit aux portes des temples & des maisons particulieres. Ovide le fait même portier des cieux. l. I. fastor.

Præsideo foribus coeli, cum mitibus horis
Et redit officio Jupiter, itque meo.

Dans le propre, la porte est l’ouverture par laquelle on entre ou l’on sort d’une maison ; & dans le figuré ce terme signifie le commencement d’une chose. On dit ouvrir la porte à la licence. Souvent les Latins se sont servi du mot limen, pour signifier une maison. Virg. Ænéïd. VII.

Reserat stridentia limina consul, &c.

Les Jurisconsultes on dit in limine litis, dans le commencement du procès, dès que la porte est ouverte à la chicane ; & c’est dans le sens figuré qu’ils ont fait le terme postliminium, qui signifie le retour d’une personne dans sa patrie, dans ses biens & dans sa maison, dont on avoit perdu la propriété en changeant d’état & de condition, par la perte de sa liberté ou du droit de cité.

Les portes des grands étoient toujours fermées à Rome ; ils avoient des portiers : celles des tribuns étoient au contraire toujours ouvertes, afin que la peuple pût en tout tems leur parler. Ceux qui briguoient des charges, affectoient de tenir de même leurs premieres portes ouvertes. Les Grecs & les Romains y mettoient des marteaux, dont Pollux & Eustathius ont fait mention ; Lucrece les appelle marculi, l.

I. v. 317. & l’on croit que Plaute a entendu dans ses Menech. act. I. sc. ij. v. 64, par cantharum, le marteau de la premiere porte.

Le portier avoit une petite chambre où il se retiroit ; & c’étoit dans ce même endroit que l’on tenoit de grands chiens enchaînés pour garder la maison pendant la nuit ; & afin qu’on ne s’approchât de trop près de ces animaux pendant le jour, on écrivoit sur la muraille ces mots, cave canem, dont Pétrone a fait mention, ainsi que Virgile dans son églogue huitieme.

Bylax in limine latrat.

Au reste les Grecs & les Romains ouvroient leurs portes en les poussant sur la rue ; & de crainte de blesser les passans, le portier avoit coutume de frapper en-dedans la porte avant que de l’ouvrir, pour avertir ceux qui passoient. A l’égard des portes de l’intérieur des maisons, on y mettoit des voiles que nous nommons aujourd’hui portieres.

On entroit d’abord dans un vestibule, où l’on plaçoit les statues, les portraits & les armes des ancêtres, dont ils tâchoient par ce moyen de conserver & d’honorer la mémoire ; ils y plaçoient même des statues de leurs dieux. Œlien rapporte dans le ch. xlj. du second livre de ses histoires, que Xénocrate de Chalcédoine revenant vainqueur d’un festin qu’on avoit donné au public, mit sur la tête d’une statue de Mercure qui étoit dans son vestibule, la couronne qu’il venoit de gagner.

On peignoit les portes de différentes couleurs : on les ornoit par des inscriptions, par l’exposition des dépouilles des ennemis que l’on avoit vaincus, par quelques animaux qu’on avoit tués à la chasse, selon le témoignage de Manilius :

Hoc habet, hoc studium portas ornare superbis
Pellibus, & captas manibus præfigere proedas.

usage qui subsiste encore parmi les gentilshommes.

Enfin, dans les occasions de fête & de réjouissance, on couronnoit les portes avec des guirlandes de toutes sortes de fleurs, avec des feuillages, & des arbres entiers qu’on plantoit à la porte solemnellement ; & dans les occasions de deuil, on se servoit d’un cyprès.

Et fronde coronas Funereâ,

dit Virgile, 4 Æneïd. lib. VI.

Ferales ante cupressos Constituunt.

Les plaintes que les amans font contre les portes qu’ils trouvent fermées, ne sont guère raisonnables. Ovide étoit de ces chantres nocturnes, élegie iij, lib. III.

Ille ego musarum purus Phoebique sacerdos
Ad rigidas canto carmen inane fores.

Sans doute qu’il ne se souvenoit pas, quand il fit ces vers, d’avoir fait celui-ci :

Ebrius ad durum formosæ limen amicæ
Cantat. (D. J.)

PORTES D’ENFER, (Mythol.) Selon Virgile, ce sont deux portes appellées les portes du sommeil, l’une de corne, l’autre d’ivoire. Par celle de corne passent les ombres véritables qui sortent des enfers & qui paroissent sur la terre, par celle d’ivoire sortent les vaines illusions & les songes trompeurs. Enée sortit par la porte d’ivoire. (D. J.)

Portes de Rome, (Antiq. rom.) Pline dit que de son tems il y avoit trente-sept portes à la ville de Rome. Il en reste encore neuf anciennes sans celles de trans Tebero & du Vatican.