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Il se perfectionne par la raison, la force & le conseil ; la raison voit & juge ; la force retient & modere ; le conseil éclaire, avertit.

L’énumération des vertus & la connoissance de la vertu en général dépendent de l’étude de l’homme. L’homme a deux facultés principales ; par l’une il connoît, par l’autre il desire. Ces facultés sont souvent opposées. C’est l’excès ou le défaut qui excite & entretient la contradiction.

Lorsque la partie qui raisonne commande & modere, la patience & la continence naissent. Lorsqu’elle obéit, la fureur & l’impatience s’élevent. Si elles sont d’accord, l’homme est vertueux & heureux.

Il faut considerer la vertu sous le même point de vue que les facultés de l’ame. L’ame a une partie raisonnable & une partie concupiscible. De-là naissent la colere & le desir. Nous nous vengeons, & nous nous défendons. Nous nous portons aux choses qui sont convenables à nos aises ou à notre conservation.

La raison fait la connoissance ; la colere dispose de la force ; le desir conduit l’appétit. Si l’harmonie s’établit entre ces choses, & que l’ame soit une, il y a vertu & bon sens. S’il y a discorde, & que l’ame soit double, il y a vice & malheur.

Si la raison domine les appétits, qu’il y ait tolérance & continence, on sera constant dans la peine, modéré dans le plaisir.

Si la raison domine les appétits, & qu’il y ait tempérance & courage, on sera borné dans son ressentiment.

S’il y a vertu ou harmonie en tout, il y aura justice.

La justice discerne les vertus & les vices. C’est par elle que l’ame est une, ou que l’homme est parfait & content.

Il ne faut se pallier le vice ni à soi-même, ni aux autres. Il faut le gourmander par-tout où il se montre, sans ménagement.

L’homme a ses âges, & chaque âge a ses qualités & ses défauts.

L’éducation de l’enfant doit se diriger à la probité, à la sobriété & à la force. Il faut en attendre les deux premieres vertus dans son enfance. Il montrera la seconde dans son adolescence & son état viril.

On ne permettra point à l’homme de faire tout ce qui lui plaît.

Il faut qu’il ait à côté de lui quelqu’un qui le commande, & à qui il obéisse, de-là la nécessité d’une puissance légitime & décente qui soumette tout citoyen.

Le philosophe ne se promettra aucun de ces biens qui peuvent arriver à l’homme, mais qui ne sont point à sa discrétion. Il apprendra à s’en passer.

Il est défendu de quitter son poste sans la volonté de celui qui commande. Le poste de l’homme est la vie.

Il faut éviter l’intempérance dans les choses nécessaires à la conservation ; l’excès en tout.

La tempérance est la force de l’ame ; l’empire sur les passions fait sa lumiere. Avoir la continence, c’est être riche & puissant.

La continence s’étend aux besoins du corps & à ses voluptés, aux alimens & à l’usage des femmes. Réprimez tous les appétits vains & superflus.

L’homme est mort dans l’ivresse du vin. Il est furieux dans l’ivresse de l’amour.

Il faut s’occuper de la propagation de l’espece en hiver ou au printems. Cette fonction est funeste en été, & nuisible en tout tems.

Quand l’homme doit-il approcher de la femme ? Lorsqu’il s’ennuyera d’être fort.

La volupté est la plus dangereuse des enchanteresses. Lorsqu’elle nous sollicite, voyons d’abord si la chose est bonne & honnête ; voyons ensuite si elle

est utile & commode. Cet examen suppose un jugement qui n’est pas commun.

Il faut exercer l’homme dans son enfance à fuir ce qu’il devra toujours éviter, à pratiquer ce qu’il aura toujours à faire, à desirer ce qu’il devra toujours aimer, à mépriser ce qui le rendra en tout tems malheureux & ridicule.

Il y a deux voluptés, l’une commune, basse, vile & générale ; l’autre grande, honnête & vertueuse. L’une a pour objet les choses du corps ; l’autre les choses de l’ame.

L’homme n’est en sûreté que sous le bouclier de la sagesse, & il n’est heureux que quand il est en sûreté.

Les points les plus importans de la politique se réduisent au commerce général des hommes entr’eux, à l’amitié, au culte des dieux, à la piété envers les morts, & à la législation.

Le commerce d’un homme avec un autre est ou agréable, ou fâcheux, selon la diversité de l’âge, de l’état, de la fortune, du mérite, & de tout ce qui différentie.

Qu’un jeune homme ne s’irrite jamais contre un vieillard. Qu’il ne le menace jamais.

Qu’aucun n’oublie la distinction que les dignités mettent entre lui & son semblable.

Mais comment prescrire les régles relatives à cette variété infinie d’actions de la vie ? Qui est-ce qui peut définir l’urbanité, la bienséance, la décence & les autres vertus de détail.

Il y a une amitié de tous envers tous.

Il faut bannir toute prétention de l’amitié, surtout de celle que nous devons à nos parens, aux vieillards, aux bienfaiteurs.

Ne souffrons pas qu’il y ait une cicatrice dans l’ame de notre ami.

Il n’y aura ni blessure, ni cicatrice dans l’ame de notre ami, si nous savons lui céder à-propos.

Que le plus jeune le céde toujours au plus âgé.

Que le vieillard n’use du droit de reprendre la jeunesse qu’avec ménagement & douceur. Qu’on voye de l’intérêt & de l’affection dans sa remontrance. C’est-là ce qui la rendra décente, honnête, utile & douce.

La fidélité que vous devez à votre ami est une chose sacrée, qui ne souffre pas même la plaisanterie.

Que l’infortune ne vous éloigne point de votre ami.

Une méchanceté sans ressource est le seul motif pardonnable de rupture. Il ne faut garder de haine invincible que pour les méchans. La haine qu’on porte au méchant doit perséverer autant que sa méchanceté.

Ne vous en rapportez point de la conversion du méchant à ses discours ; mais seulement à ses actions.

Evitez la discorde. Prévenez-en les sujets.

Une amitié qui doit être durable suppose des lois, des conventions, des égards, des qualités, de l’intelligence, de la décence, de la droiture, de l’ordre, de la bienfaisance, de la fermeté, de la fidélité, de la pudeur, de la circonspection.

Fuyez les amitiés étrangeres.

Aimez votre ami jusqu’au tombeau.

Rapportez les devoirs de l’amitié aux lois de la nature divine, & de la liaison de Dieu & de l’homme.

Toute la morale se rapporte à Dieu. La vie de l’homme est de l’imiter.

Il est un Dieu qui commande à tout. Demandez-lui le bien. Il l’accorde à ceux qu’il aime.

Croyez qu’il est, qu’il veille sur l’homme, & qu’un animal enclin au mal a besoin de sa verge & de son frein.

Un être qui sent la vicissitude de sa nature, cher-