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quarteniers, font mention que c’est en considération des recommandables services rendus par leurs prédécesseurs à l’état & à la couronne, sous le regne des rois Jean, & Charles VII. & par les impétrans au feu roi Henri IV. & au roi Louis XIII. lui-même, durant les derniers mouvemens qu’il y avoit eu à Paris ; & pour leur donner moyen de continuer ces services à l’avenir, avec autant de soin, vigilance & travail de jour & de nuit, qu’ils avoient fait par le passé, dont Louis XIII. témoigne qu’il est grandement satisfait.

Il y eut seulement un tems où les quarteniers légitimement pourvus par la ville, furent troublés dans leurs fonctions. Ce fut pendant le tems funeste de la ligue ou les capitaines des quartiers furent nommés par une faction qui se forma à Paris en 1589, & que l’on nomma les seize. Les principaux de cette faction étoient au nombre de quarante ; ce fut un bourgeois de Paris nommé la Roche-le-blond, qui commença cette ligue particuliere pour s’opposer aux desseins du roi Henri III. lequel favorisoit, dit-on, les huguenots, & pour empêcher que le roi de Navarre ne succédât à la couronne de France.

La Roche-le-blond eut d’abord une conférence secrette avec deux curés de Paris, & un chanoine de Soissons qui prêchoit à Paris ; peu de jours après ces quatre personnes en attirerent huit autres dans leur parti ; ces douze séditieux furent les fondateurs de la ligue particuliere de Paris : elle fut bientôt augmentée de nouveaux confédérés, gens d’église, de palais & de boutique, dont les principaux, au nombre de quarante, formerent entr’eux un conseil pour délibérer sur les affaires publiques.

Ce conseil, pour garder quelque ordre dans cette conspiration, choisit seize des séditieux, auxquels il distribua les seize quartiers de la ville de Paris, afin d’observer ce qui s’y feroit, & d’y exécuter les ordres du conseil ; c’est de là que cette faction fut nommée les seize, ou le conseil des seize.

Cette faction se joignit à la grande ligue commencée à Perronne. Cependant elle eut aussi ses intérêts particuliers, & les seize ne seconderent pas toujours les intentions du Duc de Guise, ni celles du duc de Mayenne, auquel ils préférerent le roi d’Espagne.

On sait toutes les insolences & les désordres que commirent à Paris les seize, avec quelle audace Bussy-le-Clerc, l’un d’eux, conduisit le parlement prisonnier à la Bastille, & comment les seize firent périr ignominieusement le docte président Brisson, & deux conseillers qui s’opposoient à leurs desseins.

Mais autant cette faction fut aimée du duc de Guise, autant elle fut haïe du duc de Mayenne, son frere, qui fut après lui le chef de la ligue ; il en condamna lui-même neuf à mort en 1591, dont quatre furent pris & exécutés ; les cinq autres, du nombre desquels étoit Bussy-le-Clerc se sauverent : le duc de Mayenne envoya une abolition au parlement pour les autres coupables : il défendit toutes assemblées privées, sous peine de la vie & du râsement des maisons où elles se feroient ; c’est ainsi que cette faction des seize fut deshonorée & ruinée par le duc de Mayenne.

Les quarteniers légitimement pourvus, étant par ce moyen rentrés dans leurs fonctions, rendirent, comme on l’a déja observé, des services essentiels au roi Henri IV. & ensuite au roi Louis XIII. outre ceux dont il fait mention dans les lettres de 1618. On voit qu’ils furent encore employés pour son service en 1636, suivant un ordre qu’il envoya le 6 Août aux prevôt des marchands & échevins, portant, que comme il ne pouvoit fournir à ce qui étoit nécessaire pour l’équipage & attirail de son artillerie, ou pour monter sa cavalerie, s’il n’étoit secouru & assisté de ses bons sujets dans une si pressante nécessité, il or-

donnoit aux prevôt des marchands & échevins de

Paris, de députer aucuns des quarteniers, colonels & capitaines, en chacun des quartiers, pour faire la levée des chevaux dont S. M. avoit besoin ; savoir, un cheval de chaque personne ayant carrosse, avec lequel on envoyeroit un laquais ou cocher pour en avoir soin, &c.

Les lettres-patentes du mois de Mars 1663, obtenues par les cinquanteniers & dizainiers, pour l’autorisation de leurs statuts, portent entre autres choses, que quiconque prétendra à la charge de cinquanteniers & dizainiers de Paris, sera tenu de certifier au quartenier de son quartier, par les cinquanteniers & dizainiers, ou autres bourgeois du même quartier, ses bonnes vie, mœurs, religion catholique, apostolique & romaine, & de son affection pour le service du roi.

Le quartenier doit présenter aux prevôt des marchands & échevins le nouveau cinquantenier ou dizainier, lequel doit faire serment d’obéir aux mandemens du prevôt des marchands & échevins, & de son quartenier, & de garder exactement en tout l’ordre qu’ils lui auront prescrit.

Les cinquanteniers & dizainiers doivent exécuter en personne les mandemens des prevôt des marchands & échevins & de leurs quarteniers, sinon en cas d’excuse légitime, & pour-lors ils y peuvent commettre des personnes dont ils répondent, mais il faut qu’elles soient agréées par les quarteniers.

Les statuts portent encore, qu’afin que la tranquillité de la ville soit religieusement gardée, les cinquanteniers & dizainiers iront aux maisons des quarteniers prendre les clés des portes de la ville en tems de guerre, pour les ouvrir & les fermer lorsque les capitaines de leurs dizaines iront en garde, &c.

Il est dit aussi qu’ils feront les rôles des personnes résidentes dans leurs dizaines, par noms, surnoms, & qualités, pour les délivrer aux quarteniers selon l’ordre que l’on leur pourra enjoindre, & sans qu’ils puissent donner copie de ces rôles à qui que ce soit que par l’ordre des quarteniers.

Que pour maintenir le repos de la ville ils veilleront incessamment que l’on ne fasse aucunes assemblées générales ou particulieres, ni qu’il y ait amas de gens de guerre qui puissent tendre à sédition, dont en ce cas ils feront leurs procès-verbaux qu’ils porteront aux quarteniers pour y être pourvû par les prevôt des marchands & échevins.

Ils doivent prendre garde que les rues soient bien garnies de chaînes de fer avec leurs rouets & autres fermetures nécessaires pour les soutenir, à les faire tendre dans les désordres, tumultes, & séditions lorsqu’ils en reçoivent l’ordre de la part des prevôt des marchands & échevins ou des quarteniers.

Pour faire que la milice soit exactement observée parmi les bourgeois, il est dit qu’ils porteront aux quarteniers les rôles des colonels, capitaines, lieutenans, enseignes, & autres officiers qui décéderont dans leurs dizaines, ou qui changeront de demeure, afin que sur le rapport que les quarteniers en feront aux prevôt des marchands & échevins il soit procédé à la nomination de nouveaux officiers, &c.

Ils sont tenus d’avertir les bourgeois de prêter leur secours lorsque le feu prend dans quelque maison, & de faire fournir les seaux, crocs & outils, qui sont tant à l’hôtel-de-ville que chez les quarteniers, &c.

Ils délivrent aux quarteniers des certificats de ceux qui desirent obtenir droit & lettres de bourgeoisie, comme ils contribuent aux charges ordinaires de la ville, & sont actuellement résidans dans l’étendue de leurs dizaines, & sur le certificat du dizainier le quartenier donne le sien, par lequel il certifie à messieurs de la cour des aides & à tous qu’il appartiendra, qu’un tel est demeurant depuis tant de tems à