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quelquefois tenues par deux, trois, quatre des poursuivans le roi, les uns clercs, les autres laïcs, comme qui diroit les uns de robe & les autres d’épée.

Philippe-le-Bel, par une ordonnance de l’an 1289, regla que des poursuivans avec lui, c’est-à-dire des personnes de son conseil qui étoient à sa suite, il y en auroit toujours deux à la cour & non plus, qui seroient continuellement aux heures accoutumées en lieu commun pour ouir les requêtes, & qu’ils feroient serment qu’à leur pouvoir ils ne laisseroient passer chose qui fût contre les ordonnances, & que de toutes les requêtes qui leur seroient faites, qui appartiendroient à la chambre des comptes, au parlement, ou autres lieux où il y auroit gens ordonnés, ils ne les ouiroient point, mais les renverroient au lieu où elles appartiendroient, si ce n’étoit du fait de ceux qui auroient dû les délivrer, c’est-à-dire les expédier.

Cette ordonnance fait connoître que les plaids de la porte avoient pris le nom de requêtes de l’hôtel, & que ces requêtes ne se jugeoient plus devant la porte de l’hôtel du roi, mais dans quelqu’autre lieu commun, c’est-à-dire qui étoit ouvert au public.

Miraulmont fait mention d’une ordonnance donnée par Philippe le long, à Lorris en Gastinois, l’an 1317, portant que de ceux qui suivront le roi pour les requêtes, il y aura toujours à la cour un clerc & un lai.

Quelques années après, ces requêtes ou plaids furent appellées les requêtes de l’hôtel du roi, & ceux qui étoient députés pour ouir ces requêtes, les maîtres des requêtes de l’hôtel du roi ; on en trouve des exemples dès l’an 1317, & dans les années suivantes ; ils faisoient droit tant sur les requêtes de la langue françoise que sur celles de la langue d’oc, c’est pourquoi ils devoient être versés en l’une & l’autre langue.

Cette jurisdiction étoit d’abord ambulatoire à la suite du roi, & se tenoit dans les différens palais ou châteaux dans lesquels nos rois faisoient leur séjour.

Mais dès le tems de Philippe VI. dit de Valois, cette jurisdiction avoit son siege à Paris, ainsi qu’il paroît par une ordonnance du prince de l’an 1344, sur le fait des maîtres tenant les requêtes en son palais royal à Paris ; & depuis ce tems elle s’est toujours tenue dans l’enclos du palais. Le bâtiment où s’exerce cette jurisdiction, a son entrée par la grande salle du palais près de la chapelle, & s’étend jusqu’auprès de la tour de l’horloge du palais ; il a été reconstruit à neuf après l’incendie du palais arrivée en 1618.

Du tems de Philippe V, en 1318, plusieurs sujets du roi s’étant plaints qu’ils étoient souvent traduits mal-à-propos devant les maîtres des requêtes, il ordonna que les maîtres des requêtes de son hôtel ne pourroient faire ajourner personne devant eux ni en tenir court, c’est-à-dire audience, que quand il y auroit débat pour un office donné par le roi, ou en cas de demande pure personnelle contre quelques officiers de l’hôtel ; ce qui fut ainsi établi afin de ne pas distraire les officiers de leur service, mais ils ne devoient pas connoître des causes des autres personnes de l’hôtel du roi, il leur étoit enjoint de les renvoyer devant leur juge naturel ; il leur fut aussi défendu de condamner à aucune amende, à moins que ce ne fût en présence du roi, lorsqu’il tiendroit lui-même ses requêtes générales.

Quand le parlement ne tenoit pas, ils délivroient les lettres de justice, & en tout tems ils examinoient toutes les lettres auxquelles on devoit apposer le grand sceau ; ils envoyoient les requêtes signées au chancelier lequel y faisoit mettre le sceau s’il n’y avoit rien qui en empêchat. Les maîtres des requêtes ne pouvoient cependant pas connoître des causes, & sur-tout du principal, ni des causes qui avoient été portées au parlement ou devant les baillifs & séné-

chaux ; mais si une partie s’opposoit à la requête,

pour empêcher qu’il ne fût délivré lettre de justice au contraire, ils pouvoient bien connoître & ouir les parties sur le point de sçavoir s’il y avoit lieu ou non de délivrer les lettres de justice qui étoient demandées, & quand ils trouvoient trop de difficultés à décider sur cette contestation, ils devoient consulter le parlement.

Les écuyers d’écuries du roi ayant surpris de Charles VI. des lettres qui leur attribuoient la jurisdiction sur les valets de l’écurie du roi ; sur les représentations du procureur général des requêtes de l’hôtel, Charles VI. revoqua ces lettres le 19 Septembre 1406, & dans les lettres de révocation il est dit, que la cour & jurisdiction des requêtes de l’hôtel, est grande & notable jurisdiction ordinaire, fondée de très-grande ancienneté, & une des plus notables jurisdictions ordinaires du royaume après le parlement ; & que par les ordonnances du royaume il n’y a aucuns officiers de l’hôtel du roi, de quelque état qu’ils soient, qui puissent en l’hôtel du roi tenir aucune jurisdiction ordinaire, excepté ses amés & feaux conseillers les maîtres des requêtes, auxquels par les ordonnances appartient la connoissance des causes personnelles des officiers de l’hôtel du roi, en défendant & la punition & correction des cas par eux connus & perpétrés, & la connoissance des cas qui chaque jour adviennent en l’hôtel du roi, sur lesquels il convient asseoir forme de procès, & aussi la connoissance des causes touchant les débats des offices royaux, & que lesdits maîtres des requêtes sont généraux réformateurs, quelque part où soit sa majesté.

Il n’y a point d’autres juges aux requêtes de l’hôtel, que les maîtres des requêtes lesquels y servent par quartier.

Les autres officiers de ce tribunal sont un procureur général lequel a droit d’assister au sceau, un avocat général, un substitut du procureur général, un greffier en chef, un principal commis du greffe, un greffier garde-scel ordinaire des requêtes de l’hôtel, six huissiers.

Les maîtres des requêtes, dans leur tribunal des requêtes de l’hôtel, exercent deux sortes de jurisdictions, l’une à l’extraordinaire ou au souverain, l’autre à l’ordinaire.

Ils jugent souverainement & en dernier ressort au nombre de sept.

1°. Les causes renvoyées par arrêt du conseil, & toutes sortes d’instances qui s’intentent en exécution d’arrêts du conseil privé.

2°. Les causes touchant la falsification des sceaux des grandes & petites chancelleries, comme aussi l’instruction du faux incident aux instances pendantes au conseil, lorsque les moyens de faux y ont été déclarés admissibles.

3°. Les demandes des avocats au conseil pour leurs salaires, & les désaveux formés contre eux.

4°. L’exécution des lettres du sceau, portant privilege ou permission d’imprimer.

5°. Les appellations des appointemens & ordonnances que les maîtres des requêtes ont données pour instruction des instances du conseil, & les appels de la taxe & exécution des dépens adjugés au conseil.

Ils connoissoient aussi au souverain des propositions d’erreur qui s’intentoient contre les arrêts des cours souveraines, mais cela n’a plus lieu depuis que les propositions d’erreur ont été abrogées par l’ordonnance de 1667.

On ne peut faire ajourner aux requêtes de l’hôtel pour juger en dernier ressort, qu’en vertu d’arrêt du conseil ou commission du grand sceau.

Lorsque les maitres des requêtes jugent au souverain, ils prononcent les maîtres des requêtes, juges