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emporte leur force & leur âpreté malfaisante en se précipitant. Transact. philos. par Lowthorp, vol. II. pag. 297.

Cependant des marins expérimentés, & sur-tout ceux qui avoient cette machine à bord, ont assuré le public que l’eau de la mer rendue douce par la distillation, n’étanche point la soif ; mais qu’après en avoir bû autant qu’ils pouvoient, ils étoient aussi altérés qu’auparavant, tant les imprégnations que les eaux éprouvent dans leur passage sur la terre, sont nécessaires pour la rendre nourrissante.

Plus ces imprégnations sont riches & sulphureuses, plus les eaux deviennent douces & bonnes : nous en avons un exemple dans la bonté & la salubrité de l’eau de la Tamise, au-dessous de Londres ; sans doute elle lui vient des imprégnations qu’elle éprouve de la part du sol & des boues des ruisseaux de Londres.

D’où vient que l’eau de pluie ramassée au milieu de l’Océan venant des vapeurs que la mer exhale, est douce, au lieu que l’eau que l’on tire de l’eau de la mer, soit en la faisant bouillir ou en la distillant, se trouve toujours salée ?

Ceux qui ont étudié avec soin les secrets de la nature, je veux dire les habiles chimistes, & non ces ignorans qui affectent de l’être, ont jusqu’ici travaillé inutilement pour trouver une méthode de distiller l’eau de mer, ou en extraire l’eau douce ; ce secret seroit pourtant fort beau, & très-avantageux pour la navigation. Quoique dans la décoction & la distillation, qui reviennent en effet à la même opération, il reste du sel au fond du vase, l’eau ainsi séparée ne laisse pas que d’être salée, & n’est point potable, ce qui surprend ceux qui en ignorent la cause : on l’enseigne en Chimie, qui est la véritable philosophie ; on trouve que dans tous les corps deux sortes de sels, quoique parfaitement semblables pour le goût, different beaucoup l’un de l’autre pour les autres qualités. Les artistes appellent l’un sel fixe, & l’autre sel volatil. Le sel fixe, à cause de sa pesanteur, ne s’évapore point dans la distillation, mais demeure au fond du vaisseau, au lieu que le sel volatil est spiritueux. En effet ce n’est rien qu’un esprit très-subtil qui s’exhale aisément sur un feu doux, & qui par conséquent montant dans la distillation avec l’eau douce, se mêle avec elle à cause de la subtilité de ses particules. Les Chimistes trouvent ce sel fixe & ce sel volatil non seulement dans l’eau de mer, mais encore dans presque tous les corps, en plus ou moins grande quantité : les herbes qui ont un goût piquant en contiennent davantage ; les matieres huileuses & insipides en ont moins. Ainsi la difficulté est de séparer ce sel volatil, ou l’esprit de sel d’avec l’eau ; c’est ce qui a résisté jusqu’à-présent à tous les efforts qu’on a faits pour y parvenir.

Mais pourquoi l’eau de pluie est-elle aussi douce sur l’Océan que sur terre, puisqu’elle est produite des exhalaisons attirées de la mer par la chaleur du soleil, ou exhalées par la force d’un feu souterrein ; évaporation qui ne differe en rien de la distillation ? Il y en a, ce me semble, trois ou quatre raisons.

1°. Une évaporation lente & douce, par laquelle il ne s’exhale de l’Océan que la partie la plus subtile, qui à la vérité contient aussi l’esprit du sel, mais en bien moindre quantité que quand l’évaporation se fait par une forte chaleur. 2°. Le long espace que cette vapeur parcourt avant d’arriver à la région de l’air, où elle se condense en pluie, pendant lequel passage il est bien possible que l’esprit salin se détache petit-à-petit des particules aqueuses. 3°. Le mélange des autres particules douces d’eau qui se trouvent dans l’air. 4°. Le refroidissement & la coagulation ou condensation de la vapeur ; car en montant de l’Océan, ces vapeurs deviennent par degrés plus froi-

des, & se mêlent avec d’autres qu’elles trouvent en

chemin, se condensent & se changent en nuées. Dans le tems de cette réfrigération & condensation, les esprits salins s’échappent avec les particules ignées, & vont occuper le lieu le plus élevé de l’air.

Mais pourquoi la même chose n’arrive-t-elle pas dans la distillation, où les vapeurs exhalées deviennent plus froides & se condensent ? En voici la raison. 1°. Dans ce court espace l’esprit salin demeure étroitement uni avec les particules aqueuses. 2°. La vapeur est conservée dans un vaisseau qui ne laisse à l’esprit aucun jour pour s’échapper. Varenius, géog. physiq. (D. J.)

SALURN, (Géog. mod.) Les François écrivent Salourne, ce qui revient au même pour la prononciation ; gros bourg aux confins de l’Allemagne & de l’Italie, dans le Tirol, auprès du Trentin, dont il fait la séparation. Ce lieu est nommé en latin du moyen âge, Salurnum, & Salurnæ, au génit. arum. (D. J.)

SALUS, déesse, (Mythol.) Les Romains avoient personnifié & déifié non-seulement les vertus morales, comme l’honneur, la piété, la foi, &c. mais aussi toutes les choses utiles, comme la concorde, la paix, la liberté, enfin la conservation de l’empire sous le nom de la déesse Salus. Ædes cereris salutis, de coelo tactæ, comme dit Tite-Live. Son temple avoit été bâti sur le mont Quirinal par C. Junius Bubuleus, dans le tems de sa dictature, l’an 451 de Rome. (D. J.)

SALUT, s. m. (Gramm.) est l’action ou la cérémonie de saluer, & de rendre à quelqu’un le respect & la révérence. Voyez Saluer.

Il y a une grande variété dans les manieres de saluer : on salue Dieu par des adorations, des prieres, &c. En Angleterre on salue le roi par génuflexion ; en Europe on se salue les uns les autres en se découvrant la tête & inclinant le corps. Les Orientaux saluent en découvrant leurs piés & mettant les mains sur la poitrine.

Le pape ne salue personne que l’empereur, & c’est une grace qu’il lui fait que de l’admettre à baiser sa bouche.

A l’armée, les officiers saluent par de certains mouvemens de demi-pique ou d’esponton. Voyez Salut, art milit.

Les anciens croyoient que la statue de Memnon qui étoit dans un temple d’Egypte, saluoit le soleil tous les matins à son lever. Cette erreur venoit de ce que la statue étant creuse, la chaleur du soleil levant échauffoit l’air qu’elle contenoit, & cet air sortoit par la bouche en faisant un peu de bruit, que les prêtres disoient être une salutation que la statue faisoit au soleil.

Le salut sur mer est une marque de civilité, de devoir ou de soumission que les vaisseaux se rendent les uns aux autres, & aux forteresses devant lesquelles ils passent. Voyez Salut, Marine.

Salut, (Critiq. sacr.) Ce mot se prend, 1°. pour la conservation, la délivrance de quelque mal ; 2°. pour la vie ou la santé du corps ; 3°. pour la prospérité, Is. lx. 18. ; 4°. pour la victoire, sagitta salutis, IV. des Rois, xiij. 17, la fleche de la victoire ; 5°. la louange qu’on rend à Dieu. Salus & gloria Deo nostro. Apoc. xix. 1 : louez & glorifiez le Seigneur. 6°. Le salut de civilité, d’affection & d’estime. Les juifs de ces cantons saluent leurs freres qui sont en Egypte, salutem dicunt, II. Macc. j. 4. Enfin le salut éternel ; travaillez à votre salut avec crainte & tremblement. Rom. xiij. 11. (D. J.)

Salut, terme d’église, partie de l’office divin qui se fait le soir après complies chez les Catholiques romains en l’honneur de la Vierge, ou pour quelque fête solemnelle. Déclarerai-je, dit la Bruyere, ce que je pense de ce qu’on appelle dans le monde un beau